Affaire Avima Iron : Le Congo se défend

Avima Iron Ore Limited

Le pays de Denis Sassou Nguesso a produit de longs arguments pour justifier sa motivation à retirer le permis d’exploitation du gisement de fer de Avima, une localité comprise entre le Cameroun et la République du Congo.

La société Avima Iron a porté devant la Chambre internationale d’arbitrage basée à Paris, reprochant à l’Etat congolais de n’avoir pas joué franc jeu et retirant le permis d’exploitation.

Ce 9 juin 2021, le Congo a servi des arguments pour montrer ce qui l’a contraint à prendre cette mesure forte. Dans la synthèse du document, il y a huit raisons majeures. LEtat congolais soutient entre autres que : «Ce retrait fait suite à de multiples mises en demeure adressées à la société, suite à l’incapacité de celle-ci à développer la moindre infrastructure depuis 2013 – Le retrait a été effectué dans le respect le plus total du Code Minier de la République du Congo de 2005 et de son Décret d’Application de 2007-• Sundance Resources Limited ne présente plus de dossier bancable afin de permettre le développement du permis dit Mbalam- • L’entreprise n’a par ailleurs jamais respecté certaines clauses légales prévues dans la convention d’exploitation lui ayant été octroyée le 29 novembre 2012, notamment au regard de ses capacités techniques et financières ou de celles d’un consortium partenaire-• L’État du Cameroun ne devrait pas prendre à sa charge le remboursement des coûts d’exploration avancés par Sundance Resources Limited », lit-on dans le document de synthèse servi au Tribunal.’

C’est donc clair pour le Congo que : «L’entreprise n’a jamais respecté certaines clauses légales prévues dans la convention d’exploitation lui ayant été octroyée le 29 novembre 2012, notamment au regard de ses capacités techniques et financières ou de celles d’un consortium partenaire», nous fait-on comprendre

Le code minier congolais

Pour se défendre plus solidement, les autorités congolaises ont fait appel aux textes en vigueur qui encadrent le code minier élaboré en 2005. Dans son article 62, il est écrit : « Le titulaire d’un permis d’exploitation qui, au bout de douze mois à compter de la date d’attribution n’a pas commencé́ les travaux de développement du champ minier, peut se voir retirer ledit permis par décision du Conseil des Ministres sur proposition du Ministre chargé des Mines, sans droit à indemnisation», et ce n’est pas tout puisque l’article 91 nous dit encore que : «Outre les cas visés aux articles 36.53 et 62, tout titulaire d’un titre minier ou d’une autorisation d’amodiation de titre minier peut, après mise en demeure, se voir retirer son titre ou autorisation d’amodiation dans l’un des cas suivants :

– défaut de paiement des redevances minières dues à l’Etat et aux collectivités locales, selon le régime fiscal en vigueur, cession ou amodiation non conforme aux règles établies par le présent Code ;

– infractions graves aux prescriptions de l’administration centrale des mines en matière de police, de sécurité́ et d’hygiène ou en cas d’inobservation des mesures imposées en application de l’article 138. L’entreprise qui ne respecte pas les clauses peut voir son permis de recherches rapporté pour : – inactivité́ prolongée ou persistante, activité́ manifestement sans rapport avec l’effort financier souscrit, inobservation des engagements souscrits tels que visés dans l’acte attributif du titre et dans la Convention visée à l’article 98».

En complément donc de cet arsenal de textes, il est également prévu que, l’entreprise contractante qui brille par une forte inactivité voit son titre et son autorisation d’exploitation repris pour absence ou insuffisance prolongée d’exploitation manifestement contraire aux potentialités du gisement ou à l’intérêt des consommateurs et non justifiée par l’état du marché, exploitation effectuée dans des conditions de nature à compromettre gravement l’intérêt économique, la conservation et l’utilisation ultérieure des gisements, inobservation des conditions fixées à l’article 134 et non-respect des engagements mentionnés aux articles 99 et 101 de la présente loi.

A en croire donc les autorités congolaises, Avima Iron est tombée sous le coup de tous ces manquements. Le pouvoir congolais explique avoir été obligé de décider autrement. « Suite au décret N°2020-644 du 30 novembre 2020, le permis d’exploitation pour le fer dit permis Nabéba a été retiré à la société Congo Iron S.A, filiale de Sundance Resources», a expliqué les sources au Ministère congolais en charge des mines

Il faut peut-être alors le rappeler, Congo Iron avait bénéficié du permis d’exploitation Nabéba durant une période de plus de 7 ans. Au cours de celle-ci, Congo Iron n’est parvenue à réaliser aucune avancée significative, privant ainsi la République du Congo, et par extension, la République du Cameroun, d’importantes retombées sociales et économiques. Afin de sauvegarder l’intérêt national et régional, l’État du Congo s’est appuyé sur le Code Minier de 2005 afin de retirer ledit permis.

La question des dédommagements

Un autre aspect qui agite les populations dans cette affaire, c’est la question des dédommagements. Avima réclame 27 milliards de dollars soit environ 15 mille milliards Fcfa au Congo. Une mauvaise demande selon le gouvernement congolais qui explique que : «L’État du Cameroun ne devrait pas prendre à sa charge le remboursement des coûts d’exploration avancés par Sundance Resources Limited. Ces coûts devraient figurer au sein du cahier des charges de l’entreprise à laquelle sera réattribuée le permis Mbalam. … Cette société, sélectionnée par appel d’offres, gagnerait à être en partenariat direct avec Bestway Finance Limited, ou sa société mère, Qiandga Mining Group, dont la filiale, Sangha Mining Development SASU, détient l’ensemble des permis Avima, Badondo et Nabeba, en République du Congo.», nous explique-t-on pour faire comprendre clairement que même si Sundance Resources n’a pas encore dévoilé le montant qu’elle pourrait exiger du Cameroun, il lui est déjà expliqué la bonne porte à laquelle il faudra frapper.

En attendant, un éclairage de plus nous a été donné : «Sundance Resources s’est montrée incapable de développer les deux gisements combinés depuis plus de 8 ans que la convention minière relative à Mbalam lui a été attribuée. La probabilité qu’elle y parvienne dans le cadre de ce nouveau contexte est très faible, d’autant plus que Sundance Resources a échoué, durant plus d’une décennie, à mettre en place un consortium apte à assurer la structuration, technique et financière, du projet combiné. C’est d’ailleurs cet échec qui explique que la société ne se soit jamais vu attribuer de permis d’exploitation, puisque la mise en place dudit partenaire technique et financier était un préalable à l’octroi de ce titre», des informations non contestées, ni infirmées par l’autre partie

Dans les documents officiels, il nous a été présenté le potentiel de production en Direct Shipping Ore de Mbalam. Il a été démontré que sur les 12 premières années ; il y a une production estimée à 10 millions de tonnes par an, tandis que le potentiel de Nabéba s’élève à près de 30 millions de tonnes par an. Nabéba représente donc 75% du potentiel de production DSO des 12 premières années. Le gisement de Nabéba offre par ailleurs un fer de meilleure qualité, disposant de teneurs en alumine et silice particulièrement faibles, et donc attractives d’un point de vue commercial. Le plan d’exploitation de Mbalam prévoyait de fait de mixer les fruits de l’extraction de son gisement avec celui de Nabéba afin d’améliorer son potentiel commercial.

Alphonse Jènè

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