Cameroun – Coin du droit: Les effets relatifs aux rapports pécuniaires entre époux

Pour régir les conséquences pécuniaires du mariage, le Code civil a prévu deux corps de règles.
Le régime matrimonial primaire et le régime matrimonial secondaire.
Le régime matrimonial primaire, qui seul nous intéressera dans cet article, est un ensemble de règles de base impérative qui s’applique aux gens mariés quel que soit leur type de régime matrimonial proprement  dit par le seul fait du mariage. Les rapports dont il s’agit sont tantôt les rapports de réciprocité tantôt les rapports d’autorité. Qu’en est-il de leurs contenus ?

Les rapports de réciprocité
Les rapports de réciprocité concernent les obligations pécuniaires des époux. En plus, la loi aménage des mécanismes de représentation et de suppléance dans l’exercice des pouvoirs entre époux.

Les obligations pécuniaires
Elles concernent le devoir de secours et la contribution aux charges du mariage.
 
Le devoir de secours
Il est prévu par l’article 212 du Code civil. Il est entendu comme l’obligation pour chaque époux de fournir à son conjoint ce qui est nécessaire à son existence ou à sa subsistance. C’est une application de l’obligation alimentaire existant d’une manière plus générale entre parents et alliés.
Dans le contexte du droit camerounais autorisant la polygamie, la question s’est posée de savoir si ce devoir liait les épouses entre elles, étant donné qu’elles sont toutes les partenaires d’un même ménage. En l’absence de texte et de jurisprudence répondant à cette question, la doctrine  estime que le devoir de secours existe entre le mari et chaque femme et non entre femme. Par conséquent, le mari ne saurait utiliser les revenus de l’une des épouses pour subvenir aux besoins de l’autre. Besoin d’aide juridique ? Contactez nous à [email protected] L’obligation alimentaire dans les rapports entre époux s’exécute de manières différentes selon qu’ils vivent ensemble ou non. Lorsque les époux vivent ensemble, l’obligation de secours est pratiquement masquée par l’obligation qu’ont les époux de contribuer aux charges du mariage. Ces charges comprennent les besoins des époux et ceux des enfants. En assumant sa contribution de la manière que lui impose le régime matrimonial, chaque époux exécute le devoir de secours qui lui incombe. Lorsqu’il n’y a plus communauté de résidence ou de vie entre les époux, le devoir de secours s’exécute sous la forme d’une pension alimentaire. Il en est ainsi en cas d’obtention par la femme d’une résidence séparée et en cas de relâchement du lien matrimonial notamment en cas de séparation de corps.
En principe, la dissolution du mariage met fin au devoir de secours. Mais de manière exceptionnelle, il peut être maintenu après la dissolution da mariage. C’est ainsi que la doctrine voit dans la pension alimentaire en cas de divorce résultant de l’article 301 alinéa 1 du Code civil la continuation du devoir de secours entre époux.
L’inexécution de l’obligation de secours peut entrainer des sanctions civiles et pénales. Sur le plan civil, le manquement au devoir de secours peut constituer une faute cause de divorce ou de séparation de corps et motiver également une condamnation à des dommages-intérêts si ce manquement a entrainé un préjudice. L’inexécution de l’obligation de secours peut aussi donner lieu à l’application des sanctions pénales prévues par la loi réprimant soit l’abandon pécuniaire (article 180 du Code pénal) soit l’abandon de foyer (article 358 du Code pénal).

La contribution aux charges du mariage
De manière générale, les charges du mariage sont les frais d’entretien du ménage ainsi que les frais nécessaire pour l’éducation des enfants. On s’accorde d’ailleurs à considérer que les charges du mariage doivent être entendues largement. On y englobera bien entendu les dépenses de nourritures, de logement, des vêtements des époux et des enfants. Cependant, les charges  ne se limitent pas aux dépenses nécessaires. Elles comprennent aussi celles qui ont pour objet l’agrément de la vie ou l’aménagement de son cadre tel que les frais d’installation de l’habitation familiale, les frais de vacances et de loisir. Besoin d’aide juridique ? Contactez nous à [email protected]
Les charges du mariage incombent à titre principal au mari en sa qualité de chef de famille. La femme en est également tenue notamment lorsqu’elle exerce une profession séparée de celle de son mari. La mesure de la contribution est fixée soit conventionnellement entre époux soit judiciairement en fonction des facultés respectives des époux.
Bien que l’obligation de contribuer aux charges du mariage  soit distinct du devoir de secours, elle comporte les mêmes sanctions.

Représentation entre époux
Dans l’exercice des pouvoirs pécuniaires que la loi lui reconnait, l’un des époux a la possibilité de représenter l’autre. Cette représentation peut être conventionnelle. L’époux confiera à l’autre mandat d’agir en ses lieu et place lorsqu’ils ne sont pas séparés de corps (article 218 du Code civil). La représentation peut enfin être fondée sur la théorie de la gestion d’affaire qui est le fait pour une personne, le gérant d’affaire, de s’immiscer spontanément et volontairement dans la gestion du patrimoine d’une autre, le maitre d’affaire, soit par un acte matériel(exemple réparer un mur ou un toit soit même ) soit par un acte juridique ( embaucher un ouvrier pour faire une réparation). Ainsi, en vertu de l’article 1375 du Code civil, le maitre dont l’affaire a été bien administrée (ici l’époux a été représenté) doit remplir les engagements que le gérant(l’époux qui a représenté son conjoint) a contracté en son nom, l’indemniser de tous les engagements personnel qu’ils a pris et lui rembourser toute les dépenses utiles ou nécessaire qu’il a fait.

Rapports d’autorité
La qualité de chef de famille du mari se traduit au niveau patrimonial par le pouvoir de gestion dont il est investi. Ainsi l’article 214 alinéa3 du Code civil fait-il de lui l’ordonnateur principal du ménage. La femme n’étant que son délégué. De même, le mari est-il l’administrateur des biens de ses enfants mineurs en même temps qu’il en a la jouissance légale. La femme n’est pas dépourvue de tout pouvoir mais sa marge d’action est réduite. Ainsi n’a-t-elle que le pouvoir de représenter le mari pour les besoins du ménage (article 220 alinéa 1 du Code civil). C’est le traditionnel pouvoir domestique  de la femme mariée.
Dans son exercice, la femme peut se faire ouvrir un compte-ménage. En principe les actes passés dans ce cadre obligent le mari. La femme peut également exercer une profession séparée de celle de son mari. Le mari ne peut s’opposer à l’exercice d’une telle profession que dans l’intérêt du mariage et des enfants. Il revient au juge d’apprécier si l’exercice d’une profession par la femme met en péril l’intérêt du mariage et des enfants. La femme exerçant une profession séparée jouit ainsi de la liberté de gestion. Elle a ainsi la possibilité de se faire ouvrir un compte en banque pour y déposer ou en retirer les fonds issus de son travail. Elle peut utiliser ses gains et salaires pour acquérir des biens dit biens réservés. Biens dont elle a l’administration et la libre disposition après s’être acquittée de sa contribution aux charges du mariage.

Estelle Djomba Fabo
Conseiller juridique
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