Cameroun: Le chef Bangoua impose sa langue ancestrale menacée

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Le glas d’une époque ? Face à l’essor des langues étrangères et camerounaises, le chef traditionnel sa Majesté Djampou Anick Júlio vient de prendre un décret radical dans son village : l’obligation de s’exprimer en langue traditionnelle bangoua pour protéger ce patrimoine culturel en voie de disparition. Coup de projecteur sur cette décision symbolique.

Une note pour sauvegarder la langue et culture bangoua

C’est le 31 janvier dernier que le chef supérieur du groupement Bangoua, Sa Majesté Djampou Anick Júlio, a signé une note à portée historique pour l’ethnie bangoua et son identité linguistique. Un texte adressé aux chefs traditionnels et aux membres de la diaspora visant à imposer l’usage de la langue ancestrale en toutes circonstances.

« A l’effet de sauvegarder la langue et la culture bangoua, il est formellement recommandé de diriger votre séance de travail et de prendre la parole en langue bangoua partout où le peuple bangoua se réunit » peut-on ainsi lire dans le préambule de cette note aux accents de cri d’alarme. Avant de préciser « il est strictement interdit aux chefs de quartier de prendre la parole en public dans une autre langue que le bangoua ». Des consignes claires assorties de sanctions.

Une volonté de préserver ce patrimoine culturel en danger

Si ce décret peut surprendre, il témoigne avant tout de l’inquiétude grandissante des autorités traditionnelles bangouas à l’égard des menaces qui pèsent sur leur idiome ancestral. Avec la montée en puissance du français et des grandes langues camerounaises véhiculaires, les dialectes minoritaires comme le bangoua souffrent en effet d’un déficit criant de visibilité.

De quoi accélérer leur attrition et à terme leur possible disparition, comme c’est déjà le cas pour près de 20% des 250 langues recensées dans le pays au début du siècle. D’où la volonté du chef Djampou Anick Júlio de donner un sérieux coup de fouet à la transmission de ce patrimoine culturel immatériel de plus en plus marginalisé.

Vers un regain des langues traditionnelles au Cameroun ?

Même si son application concrète reste sujette à caution, ce décret symbolique n’en constitue pas moins un jalon important. Car au-delà du cas bangoua, c’est toute la problématique du déclin des dialectes locaux camerounais qui se trouve posée.

Un sujet encore tabou mais qui mériterait une véritable prise de conscience collective pour que ces trésors linguistiques ne tombent pas dans l’oubli. Quitte à s’inspirer des initiatives courageuses de chefs traditionnels comme Djampou Anick Júlio, ultimes remparts face à l’uniformisation culturelle. La balle est plus que jamais dans le camp des pouvoirs publics pour enrayer ce déclin.

Par Cédric Kouakou pour 237online.com

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