Cameroun – Ferdinand Ngoh Ngoh: Récompense pour un homme de devoir

Ferdinand Ngoh Ngoh et Paul BIYA

Conscient qu’on ne confie sa fonction qu’à un homme fidèle, travailleur et efficace, le secrétaire général de la présidence de la République, promu ministre d’Etat dans le gouvernement du 04 janvier 2019, refuse de se laisser distraire par les obus décochés contre lui par les prétendants au trône pour se concentrer sur les hautes missions que lui confie le chef de l’Etat.

Ces dernières années, rarement haute personnalité aura été autant prise en grippe au même moment par la presse et les réseaux sociaux. Dès l’annonce du retrait de la Can 2019 au Cameroun, la machine à broyer s’est aussitôt mise en branle, donnant l’impression d’une machination savamment orchestrée. Pendant plusieurs semaines d’affilée, Ferdinand Ngoh Ngoh est sous les feux aveuglants des projecteurs. Le ministre secrétaire général de la présidence de la République (Sg/Pr), pour mériter un tel intérêt, est présenté comme le principal responsable de ce qu’il est convenu de qualifier d’humiliation nationale. Tous les qualificatifs lui sont collés : prévaricateur, assoiffé ou boulimique du pouvoir…

Le président de la République, réputé pour « sa connaissance et sa mémoire des dossiers et des hommes », doit sans doute sourire en lisant les synthèses de cette abondante littérature nauséeuse. Paul Biya tombe peut-être même des nues en lisant ce que la presse écrit sur son principal collaborateur, qui est de nature à ébranler la confiance la plus aveugle. Mais on ne choisit pas un collaborateur pour occuper un poste aussi stratégique au hasard. Jean-Marie Atangana Mebara, ancien Sg/Pr, sait précisément de quoi il parle quand il écrit dans son livre intitulé ‘’Le secrétaire général de la présidence de la République au Cameroun’’: «Au plan professionnel, le président Paul Biya semble avoir toujours tenu à ce que son plus proche collaborateur soit une personnalité qu’il connaît personnellement».

Fidèle parmi les fidèles

Plus loin, il se veut plus précis: «Le Président met un soin particulier à choisir son plus proche collaborateur. Je sais, a posteriori qu’il fait mener des enquêtes sur la personne ou les personnes pressenties ; et ce genre d’enquêtes peut durer plusieurs mois, voire des années». Tout comme il est difficile que Paul Biya conserve un Sg/Pr pendant pratiquement huit ans (un record de longévité à ce poste sous le Renouveau) s’il n’a pas éprouvé ses qualités. Depuis 1982, la durée de vie moyenne d’un Sg/Pr est de moins de deux ans. Dans l’histoire administrative du Cameroun, il n’y a que l’actuel chef de l’Etat (1967-1975), et dans une moindre mesure Samuel Eboua de regrettée mémoire (1975-1982), qui peuvent se targuer d’une telle longévité à ce poste. Pour durer à cette fonction depuis sa première nomination le 09 décembre 2011, le titulaire d’un doctorat de 3e cycle en relations internationales obtenu à l’Iric doit bien avoir prouvé à Paul Biya qu’il est un fidèle parmi les fidèles. Abondant dans ce sens, Parfait Siki, dans un article bien renseigné publié dans Repères du 19 mai 2010, note que «la fonction de Sg/Pr apparaît comme une consécration de la confiance absolue du Président». C’est peut-être cette fidélité jamais démentie qui vaudra à Ferdinand Ngoh Ngoh, qui ne se pose ni en félon ni en dauphin, d’intégrer le cercle très restreint des ministres d’Etat (ils sont quatre) lors de la formation du gouvernement du 4 janvier. Un quasi miracle pour ceux qui, s’abreuvant à la source immonde des dénonciations qui ont fleuri ces derniers temps dans la presse et dans les réseaux sociaux, ne vendaient plus cher son maintien au poste. Une preuve aussi que Paul Biya connaît bien son principal collaborateur. Et continue d’apprécier l’efficacité de cette cheville ouvrière de ses actions, notamment en matière de défense et de sécurité, dans un contexte de péril sécuritaire dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest ainsi que dans l’Extrême-Nord. Une charge prenante, au regard des missions dévolues au Sg/Pr, chargé notamment de la coordination de l’action des départements ministériels et services rattachés à la présidence de la République, des renseignements généraux de la police, de l’armée, des services secrets et du contre-espionnage. Ce que ne dément pas Titus Edzoa, Sg/Pr de juillet 1994 à septembre 1996, qui confie dans un entretien accordé à Sévérin Tchounkeu, patron de La Nouvelle Expression: «Le jour où j’ai été nommé ministre de la Santé publique, j’ai poussé un ouf de libération parce que à la présidence de la République on n’a pas un seul instant pour soi».

Travail accablant

Dans son ouvrage ‘’Une décennie avec le Président Ahidjo-Journal’’, Samuel Eboua ne dit pas autre chose: «Mon travail est accablant. Il ne me laisse pas souffler…Je rentre chaque jour fatigué, cassé (…). Je n’ai pratiquement pas de distractions… C’est vraiment abrutissant». Pour s’en sortir à cette fonction, il faut donc nécessairement être une boule d’énergie, un travailleur acharné. Surtout lorsqu’en plus de ses missions traditionnelles on doit s’occuper de chantiers spéciaux et urgents. L’attribution de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2019 au Cameroun a apporté une charge de travail supplémentaire à Ferdinand Ngoh Ngoh.

Créée par le président de la République qui l’a placée sous son autorité, la Task Force supervise au quotidien tous les projets de construction/réhabilitation des stades, des hôpitaux et autres infrastructures dédiées à l’accueil de la grand-messe du football africain. Fonction prenante donc, fonction qui expose aussi son occupant. Une fonction qui expose d’autant plus que, écrit Samuel Eboua: «Chacun pense que ce proche collaborateur du chef de l’Etat est à l’origine de tout, qu’il est tout-puissant». Il est donc forcément la source des disgrâces des uns, des limogeages ou des promotions des autres, des échecs ou des blocages des projets, etc. Surtout quand, comme Ferdinand Ngoh Ngoh, on est Sg/Pr au moment où la fin de règne et la succession habitent et hantent pratiquement les esprits. Honni, hué, voué aux gémonies ou désigné pour la potence, l’actuel plus proche collaborateur de Paul Biya accepte d’être l’agneau du sacrifice, le fusible du Président. Qui prend des coups mais accepte de souffrir en silence, refuse toute attitude revancharde. Une posture qui pourrait le distraire et le détourner de ses missions. Conscient que c’est à l’aune de sa loyauté, de son efficacité et par ricochet des résultats qu’il est jugé par son patron.

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