Cameroun – Affaire Mida : A quand le bout du tunnel ?

Un an après l’arrêté du préfet du Mfoundi suspendant les activités de cette organisation, les souscripteurs ne sont toujours pas entrés en possession de leur argent tel que promis par le gouvernement.

Un grand portail légèrement ouvert une moto garée devant ledit portail. C’est à cette vision sobre que l’on a droit le 08 avril dernier dans l’après-midi, au niveau de ce qui était encore, il y a un an, le siège de la Mission d’intégration et de développement pour l’Afrique (Mida) au quartier Ahala à Yaoundé. Devant cette entrée, des motos effectuent des va-etvient sur la route actuellement en travaux, laissant dans leur sillage une trainée de poussière. La présence humaine n’est pas abondante. Rien à voir, d’après des témoignages, avec l’ambiance qui y régnait pendant les beaux jours de la Mida. « Quand la Mida fonctionnait, tout le monde y trouvait son compte. […] Je peux dire que les femmes qui ne menaient aucune activité étaient devenues des commerçantes. Même les femmes qui vendent les bâtons de manioc au marché s’étaient déportées ici », se souvient une voisine du siège de la Mida. Egalement souscriptrice de cette organisation, cette dernière relève aussi que des enfants avaient, à cette occasion, installé des photocopieuses. Plus loin, dans une concession voisine, se trouve D. Eko. Elle compte parmi celles qui ont mené une activité commerciale durant cette période de « vaches grasses ». A midi, la marchandise était déjà épuisée, d’après elle. Celle qui attend également son dû à la Mida souligne qu’elle gagnait aussi de l’argent grâce à la location des espaces pour le stationnement des véhicules. A cet effet, pouvait engranger, d’après son témoignage, jusqu’à 10 000 Fcfa par jour.

Dans un autre lieu, Barnabé Akoa Akoa s’est lui également fait de l’argent grâce à la création d’un espace de stationnement. De plus, étant donné le grand nombre de potentiels souscripteurs, ce jeune homme servait d’intermédiaire entre ces derniers et la Mida pour la souscription. Grâce à ses entrées faciles à l’intérieur du siège, il obtenait une commission de la part de ses « clients ». A titre d’exemple, sur un montant de 2 millions Fcfa, Barnabé Akoa Akoa pouvait taxer sa commission à 30 000 Fcfa. Par ailleurs, il se substituait aux souscripteurs qui ne voulaient pas subir la formation dispensée par la Mida. Pour cela, il demandait 10 000 Fcfa par nom à ses interlocuteurs. Pour D. Eko, l’arrêt des activités de cette organisation a été synonyme de « retour à la galère ».

Arrêté préfectoral

Avril 2018 est un mois spécial pour les nombreux souscripteurs de la Mida, mais aussi pour ses dirigeants. C’est le mois au cours duquel le préfet du Mfoundi, Jean Claude Tsila, signe un arrêté suspendant les activités de cette organisation. C’est aussi le début de ce qu’il convient d’appeler « l’affaire Mida ». Plus tard, l’accès au siège sera interdit. Les lieux seront surveillés nuit et jour par des éléments des forces de l’ordre. Une importante somme d’argent sera finalement saisie. Les responsables de la Mida seront finalement écroués. Dans l’une des communications de l’ex-ministre de la Communication (Mincom), Issa Tchiroma Bakary, à propos de cette affaire, l’opinion publique est davantage édifiée. « Au total, au titre des septième et huitième vagues de souscription, il a été recensé une somme de 18 807 425 000 Fcfa collectés et correspondant à 17 301 souscripteurs pour 1 504 594 parts souscrites », révèle l’ex-Mincom. Quant à la somme d’argent saisie, elle s’élève à 3 850 442 275 Fcfa, selon le membre du gouvernement. Une somme largement en deçà des plus de 6 milliards Fcfa que le commandant en second, Alphonse Anicet Awoa Foe annonçait être présents dans le bureau de l’administrateur Patrick Essa’Ala N. Au cours de cette même communication, Issa Tchiroma Bakary précise que « l’action du gouvernement dans ce dossier […] s’est inscrite en droite ligne de son devoir régalien de protection des citoyens et de leurs biens ».

Pourtant, dans une lettre anonyme et attribuée à un souscripteur, on peut lire que « le jour de la perquisition les paiements se faisaient. Alors comment accuser le coordonnateur de la Mida d’escroquerie ? En plus pourquoi ne pas restituer les fonds saisis ? C’est notre argent. Nous le voulons ». « le jour de la perquisition, les paiements se faisaient normalement. Alors comment accuser le coordonnateur de la Mida d’escroquerie ? En plus, pourquoi ne pas restituer les fonds saisis ? C’est notre argent. Nous le voulons ». « Nous avions la certitude du soutien des autorités de police, de l’administration et du gouvernement. La police assistait aux paiements […] », souligne-t-il plus haut. Avant d’ajouter : « Le peuple est meurtri. La jeunesse qui avait une lueur d’espoir est abattue. Beaucoup sont les familles qui sont divisées. […] Des dettes couplées à des hypothèques. Certains fuient leurs créanciers ».

Yaoundé 3e

L’affaire Mida a donné lieu à plusieurs convocations des souscripteurs à la sous-préfecture de Yaoundé 3e à Efoulan. Celle du mois de mai 2018 était en rapport avec le communiqué gouverneur de la région du Centre, Naseri Paul Bea, invitant les souscripteurs et personnes concernées par les réclamations relatives au remboursement à se rapprocher de ladite sous-préfecture. C’est là qu’était logée la sous-commission d’enquêtes et des réclamations. Plusieurs mois plus tard, Naseri Paul Bea invitait « les représentants des associations souscriptrices dont les noms des représentants ne sont pas précisés sur les listes de souscripteurs, à bien vouloir consulter lesdites listes […] ». Une démarche qui a fait penser à un dénouement heureux.

Mais, hélas, jusqu’ici, ni le paiement ni le remboursement des souscripteurs n’ont eu lieu. Pour marquer leur mécontentement, une manifestation publique était prévue ce jour, 12 avril. Mais elle a été interdite par le sous-préfet de Yaoundé 1er. Par ailleurs, l’on apprend qu’une rencontre entre des souscripteurs et le gouverneur s’est tenue le 10 avril dernier. Enfin, une conférence de presse est annoncée du côté des souscripteurs.

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