Grands chantiers: Que se passe-t-il au ministère des travaux publics ?

Avec beaucoup de foin pour un résultat quasiment nul, le ministre des Travaux publics a fait de ce département ministériel une vache à lait pour lui et sa cour. Petit florilège.

06 novembre 2018, le président Paul Biya prête serment pour un nouveau mandat de 7 ans à la tête du pays. Ceci, après sa brillante réélection au scrutin présidentiel du 7 octobre. Moment faste et de communion populaire autour du président réélu. Mais la plupart des esprits sont ailleurs, notamment au sein du gouvernement où des ministres savent que c’est leur dernier moment d’honneurs. Une coutume républicaine veut en effet qu’un nouveau gouvernement intervienne au début d’un nouveau mandat présidentiel. Et Emmanuel Nganou Djoumessi, ministre des Travaux publics, sait que la messe est dite pour lui.

Au lendemain de cette prestation de serment, le ministre des Travaux publics (Mintp) fait ses cartons et débarrasse progressivement – et en catimini – son bureau situé au 12e étage de l’immeuble ministériel n° 1 (plus connu comme « immeuble de la mort »). Cet ancien préfet originaire des Bamboutos dans la région de l’Ouest fait profil bas; et en petit comité, il prépare ses proches à sa sortie du gouvernement. « Pour le ministre, il ne serait pas reconduit. Il a fait vider son bureau et les membres de son cabinet aussi ont commencé à remballer », confie un proche.

Surfacturations

Cette certitude d’avoir fâché le « Prince », Emmanuel Nganou Djoumessi la tient de sa gestion décriée du ministère des Travaux publics. Mais davantage du fait que l’ancien secrétaire général adjoint des services du Premier ministre sait que son dernier casse va l’emporter : la surfacturation de la pénétrante est de la ville de Douala. L’affaire dite des « 9 km à 45 milliards FCFA », révélée par la presse en aout 2018. « La surfacturation de la pénétrante est de la ville de Douala était la goutte d’eau », commente une source. Notre interlocuteur poursuit, « au ministère des travaux publics, surfacturer est devenue un mode de management. Aucun chantier n’est épargné ».

Des sources révèlent par exemple que lors de son arrivée au ministère des Travaux publics en octobre 2015, le ministre Emmanuel Nganou Djoumessi trouve sur sa table le projet de réhabilitation de l’axe lourd Douala-Yaoundé. Cette route névralgique a déjà dépassé sa durée de vie, et la phase d’entretien est forclose. La réhabilitation implique que les plus de 210 km de bitume soient enlevés et complètement remplacés. Des agrandissements sont par ailleurs prévus.

Le nouveau ministre va mettre ce projet au rebut et commander une nouvelle étude qu’il va tenter de surfacturer. En bute à l’acrimonie des ingénieurs de la Direction des études du Mintp qui ont refusé la magouille, le ministre va les dessaisir du dossier pour le confier à un affidé. Il en sera de même pour le projet de remplacement des buses sur ledit axe.
Lorsqu’il ne surfacture pas tous les projets gérés par son département ministériel, cet administrateur civil diplômé de l’Enam s’illustre par un favoritisme, matinée de tribalisme. « Tous les postes de rente sont aux mains de ses proches, la plupart du temps, des ressortissants de l’Ouest comme lui », déplore un autre responsable. Ainsi, le ministre s’assurerait de ce que tous les postes de péages routiers les plus juteux aient à leur tête un proche, dont certains ont déjà dépassé l’âge de départ à la retraite. Il en est ainsi des postes de péage d’Edéa, de Njombe et celui de Bekoko.

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