L??abbé Prosper Ekoto Medjoh a été muté dans une autre paroisse alors qu??il combattait ouvertement les pratiques de ces groupes. Ces derniers avaient par ailleurs « prédit » cette affectation deux mois avant. Les paroissiens dénoncent. Les dimanches se suivent, mais ne se ressemblent. C??est du moins ce que l??on a pu vivre ce 26 février 2012 à la paroisse de Kye Osi. Très tôt dans la matinée, vers 7h30, des fidèles accourus vont se rendre
compte qu??il n??y aura qu??une seule messe. Celle de 10 heures. Et pour cause, c??est la dernière qui sera célébrée en présence de leur curé bien aimé, l??abbé Prosper Ekoto Medjoh. L??ambiance n??est pas tout à fait joyeuse, alors que les paroissiens sont en train de faire le ménage dans la chapelle. La plupart sont en effet attristés par le départ de cet abbé qui les a conduits vers la foi depuis près de deux ans. On dirait donc des brebis abandonnées au milieu d??une meute de loups. Et la réalité n??est pas vraiment différente. Du moins, si l??on s??en tient aux récits des membres de cette paroisse catholique. L??ambiance néfaste qui prévaut en effet en cette matinée à Kye Osi tient lieu du fait que les paroissiens ne sont pas tout à fait d??accord avec la décision de l??Evêque du diocèse d??Ebolowa, Mgr Jean Mbarga. Ce dernier, le 20 février dernier, a décidé de muter l??abbé Prosper Ekoto Medjoh pour la paroisse d??Abang Minkok, toujours dans la région du Sud. Une décision qui, selon nombre de paroissiens, serait un règlement de comptes à l??endroit du curé. Notre enquête au sein de la communauté catholique de Kye Osi tend à démontrer que l??abbé Prosper Ekoto Medjoh serait « tombé » sous les coups de boutoir des sectes et de l??administration. « Notre curé était très véhément contre les sectes qui fleurissent dans la ville. Il n??avait de cesse de les invectiver », affirme un membre d??un groupe charismatique de l??Eglise. Le curé de Kye osi, âgé seulement de 34 ans, avait en effet pris son courage à deux mains pour dénoncer sans cesse certaines « dérives » au sein de la communauté. Sa première cible était les sectes, qui étaient passées maîtresses dans le recrutement au sein de la paroisse. « Nous avions constaté que de plus en plus des gens venaient repérer des jeunes et des femmes pour les recruter dans ces sectes. Le curé aussi. Et il n??avait jamais eu de cesse d??en parler au cours de ses homélies », explique un paroissien. La seconde cible du curé sortant était l??administration publique. Il rappelait en effet sans cesse aux autorités administratives qu??elles devaient travailler sans relâche pour les populations car « c??est Dieu qui donne le pouvoir et ce dernier doit être utilisé pour servir le peuple ». Avant la Pâques Ces prises de position incessantes ont, selon de nombreux témoignages, courroucés les différentes catégories de personnes concernées. D??après toujours les déclarations des croyants, la pression des sectes aura été très forte. Au sein de la paroisse, certains groupes reconnus auraient écrit à plusieurs reprises à l??Evêque d??Ebolowa pour demander le remplacement de ce curé qui, manifestement, gênait. Les membres supposés de ces sectes, en décembre 2011, auraient même annoncé à qui voulait l??entendre que « votre curé ne verra pas Pâques 2012 » dans la paroisse de Kye Osi. Difficile de mettre la main sur les supposés sectaires, qui seraient de connivence avec certains hauts commis de l??Etat dans la localité. Mais, le sous préfet de Kye Osi, par ailleurs président d??honneur du conseil paroissial, estime que cela n??est pas nécessaire que les paroissiens voient cette affectation sous cet angle. « Je n??ai aucun problème avec le curé sortant (??) Je ne fais pas partie d??une secte (??) Et il n??y a pas de problèmes au sein de la paroisse. Juste des petites incompréhensions », fait entendre André Marie Essono. Le chef de terre de cette ville frontalière donne de surcroît un conseil au nouveau curé et fait comprendre « au petit frère » qu??il doit tenir compte du fait que cette paroisse est particulière. De son côté, l??abbé Prosper Ekoto Medjoh éprouve un sentiment de joie pour avoir fait son travail selon la volonté de Dieu. Même s??il avoue être triste de laisser ses ouailles. Il a certainement conscience de ce à quoi elles restent exposées sans lui. En espérant que son successeur ira dans la même lancée que lui.
