Mathias Eric Owona Nguini : « La mobilisation populaire traduit un regain d’intérêt »

La tenue de l’élection présidentielle de 2018 a donné lieu à une mobilisation populaire peu ordinaire, voire sans précédent. Comment pouvez-vous expliquer cela dans un contexte longtemps marqué par une sorte de défiance du citoyen envers la politique ?

La mobilisation populaire qui s’est manifestée tout au long du processus relatif à l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 traduit un regain d’intérêt des différentes couches de la population pour la politique en général et pour la compétition spécifique qu’est l’élection présidentielle en particulier. Ce regain d’intérêt est largement lié à la configuration des candidats en compétition. Effectivement, il y a eu parmi les candidats certains qui avaient déjà été là lors de l’élection présidentielle d’octobre 2011, tels que le président Paul Biya, les ministres Garga Haman Adji et Adamou Ndam Njoya. Ce qui a également entrainé ce surcroît d’intérêt c’est l’arrivée des nouveaux acteurs dans la compétition de l’élection présidentielle comme le Pr. Maurice Kamto, Me Akere Muna, Cabral Libii, Serge Espoir Matomba, Joshua Osih et le pasteur Franklin Ndifor.

On a constaté que certains meetings faisaient foule à des endroits précis, indépendamment du candidat concerné….

Il faudrait interroger un échantillon significatif de ceux qui ont participé à ces meetings politiques, notamment ceux qui se sont tenus autour du fameux stade Cicam de Douala, pour savoir quelles étaient leurs motivations. Toujours est-il que le public qui assistait à ces meetings devait avoir des motivations hétérogènes. Certains devaient être là parce qu’ils s’intéressaient de manière accentuée à la campagne électorale, d’autres étaient là parce que de manière circonstancielle ils ne se trouvaient pas loin des lieux, d’autres encore étaient là parce qu’ils suivaient ceux qui s’intéressaient à ces meetings-là.

Qu’est-ce qui peut bien attirer le citoyen-électeur vers un candidat plutôt que vers un autre ? Le message véhiculé en période électorale par les acteurs politiques a-t-il répondu aux attentes du public ?

L’intérêt que les candidats suscitaient au sein du public dépend de plusieurs considérations qui sont d’abord liées aux penchants sentimentaux que certains pouvaient avoir pour tel ou tel candidat. Cet intérêt peut être aussi lié à la sensibilité idéologique des uns et des autres et de ce qu’ils attendent des candidats ayant pris part à l’élection présidentielle du 7 octobre 2018.

Au-delà de l’affluence, peut-on parler vraiment d’une élection inclusive dès lors que certains Camerounais se sont estimés exclus du jeu ?

Ce que l’on peut dire c’est que les institutions chargées d’organiser le processus de l’élection présidentielle d’octobre 2018 ont fait tout ce qui était en leur capacité pour que cette élection-là soit la plus inclusive possible. Il se trouve néanmoins que cette élection s’est déroulée dans un contexte où certaines régions du Cameroun sont concernées par une crise de sécurité accentuée. C’est pour cela qu’on a pu avoir l’impression, en fait fausse, que cette élection n’était pas aussi inclusive qu’on le pensait. En vérité, Elections Cameroun et les autorités politico-administratives ont fait tout ce qui était possible pour que l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 puisse se dérouler malgré le climat de sécurité tendu dans les régions du Nord-ouest et du Sud-Ouest parce qu’effectivement, ces deux régions font partie du territoire de la Répu- blique du Cameroun.

Le regain d’intérêt constaté pour la politique est-il selon vous un phénomène ponctuel ou peut-il s’inscrire dans une dynamique durable ?

C’est beaucoup plus tard qu’on saura si le regain d’intérêt qui semble s’être manifesté à l’occasion de l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 est un phénomène purement circonstanciel ou s’il s’agit d’une évolution ayant un sens structurel, un sens durable.

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