Mali : il est temps de diversifier les alliances internationales (Aliou Diallo)

Aliou Diallo

Alors que la France se retire progressivement du nord Mali, depuis quelques semaines, Bamako songe de plus en plus à se tourner vers la Russie pour assurer la défense de son territoire.

Si ce rapprochement est salutaire, certaines personnalités politiques appellent à diversifier davantage les alliances stratégiques afin de se sortir de la dépendance. Parmi ceux-ci figure Aliou Diallo, président d’Honneur de l’ADP-Maliba et candidat présomptif à la prochaine élection présidentielle. Ce dernier souhaite que les autorités maliennes sollicitent aussi l’expertise des USA, de la Chine et la Turquie, entre autres.

Des brouilles entre Paris et Bamako

Comme annoncé par Emmanuel Macron, les forces françaises de l’opération Barkhane ont commencé leur retrait des bases du nord, notamment de Kidal, Tessalit et bientôt Tombouctou. Cette transformation du dispositif sécuritaire français intervient au moment où les relations entre Paris et Bamako sont devenues très délétères. Fin septembre, à la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU, le Premier ministre malien Choguel Maïga a déploré un « abandon en plein vol » et une décision « unilatérale » sans « concertation ». Lâché ainsi brutalement, le Mali a menacé de faire appel au groupe paramilitaire russe Wagner pour combler l’absence de la France. Une option qui inquiète fortement l’Union européenne et la France.

Mais la junte malienne en a apparemment cure. Elle a même déjà commandé quatre hélicoptères de type Mi-171 à la Russie. Et elle n’a pas tort. En effet, ce rapprochement avec Moscou est largement salué par la population malienne, la jeunesse en tête. Celle-ci demande à la France de s’en aller de son territoire, l’accusant invariablement de couvrir le terrorisme ou de piller le Sahel. La majeure partie de la classe politique soutient aussi ce nouveau positionnement. Aliou Diallo, par exemple, invite à aller au-delà de la simple satisfaction de voir un allié devenu inutile plier bagages.

La diversification des partenariats

« La France a récemment annoncé la fin de la mission Barkhane. Au lieu de gémir sur la situation, ou de nous en indigner, essayons au contraire d’en tirer profit pour renforcer nos capacités militaires et notre situation stratégique », a suggéré le président d’Honneur de l’ADP-Maliba dans une nouvelle tribune sur les réseaux sociaux. Considérant que les « relations internationales sont des rapports de force, pas de la mendicité », il appelle à tisser des alliances avec d’autres puissances mondiales. « La Russie, les USA, la Chine et la Turquie par exemple, comme bien d’autres pays, ont les capacités et le savoir-faire pour être des partenaires importants afin de nous aider à atteindre notre objectif : renforcer massivement notre appareil militaire pour vaincre les groupes armés terroristes et ramener sécurité et unité au Mali », a-t-il souligné.

L’homme d’affaires malien précise que ces nouveaux partenaires devraient être axés sur la formation, la fourniture d’équipements et le renseignement. Il apprécie d’autant cette possibilité qu’elle se fera, pour la première fois, sous entière souveraineté malienne en l’absence de Paris. Mais cette posture ne devrait pas signifier un divorce total d’avec la France, estime l’ex député de Kayes. Avec ce pays, le Mali a une histoire particulière, marquée par la douleur mais aussi des liens forts et fructueux. Aliou Diallo estime simplement que l’ancienne puissance tutélaire doit simplement comprendre que les temps ont changé. « Nos liens avec la France sont anciens et solides, mais l’époque postcoloniale est bel et bien révolue », relève-t-il. 

Les temps ont changé

Le riche entrepreneur malien note qu’il existe aujourd’hui une jeunesse bien instruite, connectée au monde et qui n’a surtout pas connu la colonisation. Elle a soif de liberté, de progrès et de respect dans les relations. Ces derniers mois, elle exprime ses opinions, dites panafricanistes, dans de nombreux pays du continent. « Le monde du XXIe siècle est multipolaire et les alliances stratégiques doivent être multiples, évolutives et complémentaires. Nous ne devons rien nous interdire pour accroître notre défense nationale et être prêts à frapper à toutes les portes pour donner à nos soldats les moyens de mener à bien leur mission », insiste Aliou Diallo.

Un plan Marshall pour moderniser l’armée

Toutefois, le PDG d’Hydroma pense que cette coopération ne doit pas enfermer son pays dans une nouvelle dépendance envers l’extérieur. « Au-delà de la coopération militaire avec nos alliés, le Mali doit également recruter et acquérir des armements et du matériel militaire pour renforcer ses capacités et bâtir l’armée malienne de demain. Il s’agit d’investissements qui entreront dans le cadre de mon Plan Marshall en créant des emplois et en sécurisant de manière efficace les zones où le gouvernement malien n’a aujourd’hui plus le contrôle », souligne-t-il. Aliou Diallo compte doter son plan Marshall de 15.000 milliards de Francs CFA afin de moderniser les FAMA. Il s’agira notamment de mieux les équiper et les former sur le sol malien, avec par exemple l’ouverture d’une école de guerre.

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