Dans un pays où la coiffure reste souvent reléguée au rang de simple métier manuel, une femme s’est levée pour révolutionner cette perception. Carbrole Ebongué, figure emblématique de la coiffure camerounaise reconnue internationalement, s’apprête à lancer le tout premier KEMA Hair Event du 24 au 30 avril 2025 à Douala. Avec plus de 2500 personnes formées et une clientèle qui comprend les plus grandes célébrités africaines, cette visionnaire s’est donnée pour mission d’élever la coiffure au rang d’art. Dans cette interview exclusive accordée à 237online.com, elle nous dévoile son parcours inspirant, sa vision pour cet événement ambitieux et comment sa foi inébranlable guide chacun de ses pas. Une rencontre avec une femme déterminée à transformer un secteur entier et à créer des opportunités pour la jeunesse camerounaise.
Votre histoire avec la coiffure a commencé comment ?
Mon histoire avec la coiffure trouve son origine dans un don naturel que je considère comme un cadeau de Dieu. Déjà petite, à la maison, nous nous coiffions entre sœurs pour l’école. Ce qui n’était au départ qu’une pratique familiale s’est progressivement transformée en passion au fil des années. Bien que ma regrettée mère (que son âme repose en paix) rêvait de me voir évoluer dans le domaine de la santé, j’ai finalement choisi de suivre ma propre voie.
Le véritable déclic est venu d’une déception personnelle qui, plutôt que de m’abattre, m’a poussée à me concentrer sur moi-même et à croire en mon potentiel. Je me souviens avoir dit à mes sœurs qu’un jour, mon travail serait reconnu dans le monde entier, et ma grande sœur ne cessait de me répéter que si j’y croyais sincèrement, Dieu pourrait réaliser ce rêve.
Vous coiffez aujourd’hui des célébrités internationales. Quel a été le moment où vous avez réalisé que votre talent dépassait les frontières du Cameroun ?
Je n’ai pas attendu passivement que mon talent traverse les frontières. J’ai pris l’initiative de les franchir activement avec mon savoir-faire. C’est ainsi que j’ai réalisé que mon travail était déjà connu et apprécié à l’étranger, notamment grâce aux réseaux sociaux où je partage mes créations depuis 2016. Malgré les défis rencontrés, comme la perte de pages comptant des milliers d’abonnés, j’ai toujours su rebondir, portée par ma foi en Dieu.
Vous avez formé plus de 2500 personnes. Qu’est-ce qui vous motive à transmettre votre savoir-faire ?
Ce qui me motive profondément, c’est mon expérience personnelle et mon désir d’offrir aux autres les moyens de transformer leur vie. La coiffure est souvent un métier choisi par nécessité, que ce soit pour des mères célibataires, des orphelins ou des personnes en situation de précarité. Mon ambition est de leur donner les outils nécessaires pour réussir et vivre dignement de leur passion. Chaque masterclass est pour moi l’occasion de partager ce savoir qui libère.
Quand vous dites « Je tiens ma force de Jésus », comment votre foi influence-t-elle votre approche du métier et de vos projets ?
Jésus est le fondement de tout ce que j’entreprends. Ma foi me guide vers l’honnêteté et la confiance, créant ainsi un cercle vertueux d’opportunités. Bien que j’ai commencé sans formation, simplement avec ce don que Dieu m’a offert, j’ai pu évoluer jusqu’à organiser le KEMA Hair Event. Comme le dit Jérémie 29:11, je sais que Dieu a des projets de paix et d’espérance pour moi, alors je me laisse guider par Sa volonté.
D’où vient précisément l’idée du KEMA Hair Event et que signifie « KEMA » ?
L’idée est née d’un constat simple : alors que de nombreux événements célèbrent les talents camerounais dans divers domaines, la coiffure reste souvent absente. Pourtant, ce métier sublime quotidiennement des millions de personnes, leur redonnant confiance et estime de soi. KEMA, qui signifie « excellent », est une plateforme conçue par et pour les acteurs de la coiffure et du secteur de la beauté. Elle permet d’échanger, de célébrer nos réussites, mais aussi de discuter de nos défis et perspectives.
Quels obstacles avez-vous dû surmonter pour concrétiser ce projet qui demande un budget de plus de 55 millions FCFA ?
Les obstacles sont nombreux, surtout financiers. J’ai investi toutes mes économies dans ce projet, et nous sommes encore loin des attentes initiales. Cependant, nous restons fidèles à notre vision, convaincus que Dieu nous guidera vers les solutions. C’est aussi l’occasion d’appeler les entreprises et partenaires potentiels à nous rejoindre dans cette aventure, car seul, on ne peut rien accomplir de grand.
Parmi toutes les activités prévues, laquelle représente le mieux votre vision pour l’avenir de la coiffure africaine ?
Sans hésitation, le défilé de mode de la collection de coiffure et le concours du meilleur coiffeur incarnent parfaitement ma vision. Ces activités mettent en lumière la créativité et l’excellence de notre métier, tout en offrant une vitrine aux talents émergents.
Comment avez-vous convaincu Muriel Blanche de devenir la marraine de cet événement ?
Muriel Blanche a été une véritable inspiration pour moi. Son énergie, son professionnalisme et sa bienveillance m’ont donné le courage de concrétiser ce projet. Lorsque je l’ai sollicitée, j’étais tellement nerveuse mais avec sa générosité habituelle, elle a immédiatement accepté, m’encourageant et me prodiguant des conseils précieux. Pour moi, c’était une évidence : personne d’autre ne pouvait incarner mieux cette marraine.
Pourquoi est-il fondamental selon vous de considérer la coiffure africaine comme un art à part entière ?
La coiffure africaine est bien plus qu’un simple métier manuel. C’est un art qui puise ses racines dans nos traditions tout en se renouvelant constamment. C’est aussi un secteur économique vital, offrant des opportunités à ceux qui n’en ont pas ailleurs. À l’étranger, c’est souvent par la coiffure que nos frères et sœurs de la diaspora trouvent leur place.
En quoi le secteur de la coiffure peut-il concrètement contribuer au développement économique du Cameroun ?
En valorisant notre patrimoine culturel à travers des créations modernes, la coiffure stimule l’économie locale. C’est un secteur qui peut absorber une grande partie du chômage des jeunes, à condition d’être mieux structuré et soutenu.
Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui hésite à se lancer dans la coiffure par peur des préjugés ?
Soyez déterminé, croyez en votre talent et formez-vous sans relâche. Aujourd’hui, la maîtrise des réseaux sociaux et des compétences entrepreneuriales est tout aussi importante que le savoir-faire technique. Fixez-vous des objectifs ambitieux et travaillez avec passion, car le Cameroun regorge de talents extraordinaires dans ce domaine.
Au-delà du nombre de visiteurs attendus, comment mesurerez-vous le succès de cette première édition du KEMA Hair Event ?
Le véritable succès se mesurera à l’impact durable sur les participants : le nombre de talents découverts, les connexions professionnelles créées et les perspectives concrètes qui en découleront pour l’ensemble du secteur.
Quels sont vos projets après le KEMA Hair Event ? Envisagez-vous une édition internationale ?
Absolument ! Mon rêve est de faire du KEMA Hair Event une référence continentale, en organisant des éditions dans d’autres pays africains. L’objectif est de créer un réseau panafricain de professionnels de la coiffure et de la beauté.
En une phrase, que souhaitez-vous que les gens retiennent de votre parcours et du KEMA Hair Event ?
Je souhaite qu’ils retiennent que la coiffure est un art noble, un vecteur d’émancipation et que chaque talent, aussi modeste soit-il, mérite d’être révélé et célébré.
Pour plus d’informations sur le KEMA Hair Event qui se tiendra du 24 au 30 avril 2025 à Douala (ARENA Bonamoussadi), vous pouvez suivre les pages officielles de Carbrole Hair and Wigs et du KEMA Hair Event.