Canberra avait induit en erreur Paris avant de rompre le contrat des sous-marins (Paris)

Jean-Pierre Thébault

Le mensonge du gouvernement australien lors de la résiliation unilatérale du contrat de construction de sous-marins signé avec la France en 2016 était délibéré. C’est ce qu’a déclaré l’ambassadeur de France en Australie, Jean-Pierre Thébault, lors d’un discours prononcé mercredi devant le National Press Club of Australia.

M. Thébault avait noté que « le gouvernement français n’avait aucun reproche à faire à l’Australie et au peuple australien », mais qu’il considérait les actions du gouvernement du pays, dirigé par le Premier ministre Scott Morrison, comme un « mensonge délibéré ». Il a rappelé que le 30 août 2021, deux semaines avant la rupture du contrat, la responsable de la politique étrangère australienne, Maris Payne, avait signé un communiqué avec son homologue français qui « soulignait l’importance de l’accord de construction de sous-marins avec la France ». « Face à la forte incertitude liée à l’accord alternatif, [les autorités australiennes] devaient préserver la possibilité de bénéficier [du contrat français] et il était donc impératif de nous laisser dans l’ignorance », a-t-il déclaré.

Le chef de la diplomatie avait également critiqué les affirmations du premier ministre australien selon lesquelles les sous-marins de la société française Naval Group auraient été trop coûteux et « seraient devenus obsolètes au moment de leur lancement ». « La classe [de sous-marins] Attack est délibérément sous-estimée pour […] justifier la décision prise de longue date », a-t-il déclaré, soulignant que la résiliation du contrat avec un allié historique, qui comprenait notamment le transfert d’informations classifiées, « était un véritable coup de poignard dans le dos ».

La déclaration de l’ambassadeur français est intervenue après que M. Morrison eut déclaré mardi que son gouvernement avait été contraint de chercher une alternative à l’accord avec Naval Group, car ce contrat « présentait de très graves problèmes, avec des retards dans sa mise en œuvre et une augmentation des coûts ». Le Premier ministre australien avait également déclaré que le président français Emmanuel Macron était au courant des « problèmes liés au contrat » et aurait pu s’attendre à ce qu’il soit résilié. La chancellerie de M. Morrison a rendu publique une partie de la correspondance des deux dirigeants, notamment un SMS du dirigeant français demandant des nouvelles du projet. La divulgation de ces données avait été décrite par Paris comme une nouvelle action « inélégante et inefficace » de Canberra.

L’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont annoncé, le 15 septembre, la création d’un nouveau partenariat sécuritaire, AUKUS. Ainsi, l’Australie envisage notamment de construire dans le cadre de l’accord – sur la base de technologies américaines et britanniques – au moins huit sous-marins nucléaires, dont les premiers devraient entrer en service en 2036, et d’équiper ses troupes en missiles de croisière américains. Dans ce contexte, le pays a rompu un contrat sans précédent dans ce domaine avec la France, en précisant qu’il ne répondait plus à ses intérêts nationaux. Paris a réagi en accusant les autorités australiennes de mensonge prémédité et a rappelé pour consultations ses ambassadeurs en Australie et aux États-Unis

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