Un cas qui persiste alors que le Cameroun a célébré hier, la Journée internationale des droits de l’homme.
Jeudi 10 novembre 2015. La salle des consultations de l’Hôpital Central de Yaoundé (Hcy) est bondée de monde. Les patients, pour la plupart assis dans la salle d’attente, espèrent que le médecin scande leurs noms. Madame Ayissi attend depuis près de quatre heures lorsqu’enfin, le docteur prononce son patronyme. Vingt minutesplus tard, elle est de retour avec une ordonnance entre les mains. Elle sait désormais qu’elle souffre de la toxoplasmose. Une certitude qui va disparaître une fois devant la pharmacie de l’hôpital : «Je dois boire cinq boîtes de ce médicament. Et une seule coûte 10 000 Fcfa. Je n’ai pas cet argent sur moi», indique madame Ayissi, avant de se diriger vers le portail. «Je vais payer les remèdes peut-être demain», lance-t-elle en repartant.
Yves, quant à lui, n’a pas encore eu la chance de quitter l’hôpital. Depuis deux semaines, il est alité à l’Hôpital Central de Yaoundé. Alors qu’il prend de l’air sur les bancs devant sa salle d’hospitalisation, il ne décolle pas son téléphone portable de son oreille. Ses conversations tournent autour de sa facture d’hôpital qui s’élève à près de 100.000 Fcfa, «en plus des frais d’hospitalisation. Dès que je suis arrivé, j’ai payé la consultation à 2600 Fcfa, ensuite les frais d’hospitalisation pour dix jours à près de 30 000 Fcfa. On m’a dit qu’on ne paye pas moins de dix jours pour occuper une chambre», énumère ce conducteur de moto-taxi qui pense contracter un crédit auprès de la tontine dont il est membre.
Des cas comme ceux de Yves et de madame Ayissi sont légion. Nombreux sont ceux qui n’ont pas accès aux soins médicaux faute de moyens. D’ailleurs, il y en a qui sont obligés de rester dans les centres hospitaliers une fois guéris, le temps de payer leur dû. La pratique des surcoûts et les ruptures de stocks de médicaments viennent se greffer aux difficultés. D’après un rapport publié en 2015 par Les mutuelles de santé au Cameroun, environ 40 % des populations camerounaises n’ont pas accès aux soins de santé de qualité et près de 60 % éprouvent des difficultés à faire face aux dépenses de santé.
Sécurité sociale
C’est dire si l’accès aux soins médicaux est loin d’être la chose la mieux partagée au Cameroun. Pourtant hier 10 décembre 2015, le Cameroun, de concert avec la communauté internationale, célébrait la Journée internationale des droits de l’homme. Un concept qui implique la liberté d’expression, le droit à l’éducation ou encore le droit à la santé… Des droits que le gouvernement et les organisations privées essayent tant bien que mal de garantir aux populations. Sauf que le chemin reste encore long. «Il faudrait qu’on pense à une caisse de maladie. La population est en majorité pauvre et elle a pourtant besoin de se faire soigner. Il y a un problème de sécurité sociale qui se pose. Il faudrait des structures qui prennent cela en charge», analyse un agent du ministère de la Santé publique (Minsanté). Une mission débutée en partie par le Centres des urgences de Yaoundé (Cury). Celui-là qui se donne pour mission «de prendre en charge toutes les urgences médico-chirurgicales et solliciter le paiement par la suite». Sauf que cinq mois après son inauguration, cette structure croule sous une dette de plus de 30 millions de Fcfa. D’ailleurs, une collecte de fonds a été organisée par l’Agence de coopération internationale de la Corée, le 03 décembre dernier, pour sauver le Cury.
Nadine Guepi