Hier, l’avocate a adressé un « droit de réponse » à Cameroon Tribune dans lequel elle fustige les propos du ministre de la Communication.[pagebreak]C’est un document de 29 pages, préparé par Lydienne Eyoum du fond de son cachot. L’avocate réagit aux propos tenus par Issa Tchiroma Bakary lors d’un point de presse organisé suite à sa condamnation à 25 ans de prison. Cameroon Tribune en avait relayé son intégralité sur deux pages. A son tour, l’avocate « somme » le quotidien gouvernemental de publier sa réplique sur le même espace. Même si elle présente cela comme un « droit de réponse », le pamphlet de Lydienne Eyoum ne vise en rien le journal. « Le porte-parole du gouvernement, lui, a pris des raccourcis comme si le procès public et contradictoire n’a jamais eu lieu. Il refait le procès et malheureusement, je suis toujours l’accusée préalablement déclarée coupable.
Il est juge, procureur général, avocat de l’Etat et moi, accusée, condamnée d’avance. Le public qui a assisté aux débats, qui a écouté et entendu la vérité de tous les faits, a pu se faire sa propre idée de celle-ci. Cette vérité factuelle a même été relatée dans la presse locale après chaque audience y compris par Cameroon Tribune tout au long du procès et chaque organe de presse selon sa ligne éditoriale, s’est efforcé de ne relater que les faits débattus », précise l’avocate dès l’entame de son « droit de réponse ». Elle s’adresse donc à Issa Tchiroma.
Que reproche au juste Lydienne Eyoum au ministre de la Communication ? « Monsieur le porte-parole prend le risque sans grand danger de commettre le triple exploit de violer à la fois le principe de la séparation des pouvoirs, celui de la non-ingérence dans les affaires judiciaires, et les infractions pénales de diffamation et de commentaires tendancieux qui dans un pays de droit devraient provoquer une enquête judiciaire et pourquoi pas une enquête parlementaire, la justice étant mise en cause par les deux parties ! », écrit Lydienne Eyoum.
Pour la première fois depuis 2005, hors des Cours et Tribunaux, Lydienne Eyoum s’exprime publiquement sur ce qui lui vaut la prison depuis cinq ans. L’avocate accuse ! « J’accuse monsieur le porte-parole du gouvernement de profiter de sa position pour tenter d’influencer l’opinion des honorables membres de la Cour suprême saisis de mon recours en cassation. Car où a-t-on vu un représentant de l’exécutif porte–parole du Gouvernement faire ce type d’exercice dans un Etat de droit alors même que le procès est toujours en cours?
Un tel exercice inédit dans une République n’apporte-il pas la preuve s’il en était encore besoin, de cette ingérence de l’exécutif sur le judiciaire ? ».
Obstruction
Face à ce qu’elle appelle « une campagne médiatique persistante de Issa Tchiroma » pour convaincre le public du bien fondé de sa condamnation, elle a cru devoir apporter sa « vérité des faits ». Elle répond à Tchiroma sur chacun des aspects qu’il a évoqués lors de sa rencontre avec les médias. Entre autres : la procédure de saisie attribution exercée sur les comptes de la Sgbc à la Beac, sur les honoraires payés par Akame Mfoumou, sur l’argent viré dans le compte personnel de Lydienne Eyoum plutôt que dans le compte client, sur les différentes décisions de justice qui ont déjà été rendues dans cette affaire et qui ont entrainé le procès devant le Tcs.
Lydienne Eyoum parle pêle-mêle de Amadou Ali, de Me Emmanuel Mbiam, de Me Maloka qu’elle considère entre autres comme les personnes qui ont orchestré les accusations portées contre elle. Lydienne Eyoum n’en a pas fini avec M. Tchiroma. « Monsieur le porte-parole du gouvernement, je voudrais vous dire qu’à force de sévir méchamment et de faire obstruction pour empêcher que la voix des citoyens camerounais qui se sentent tyrannisésne parvienne au Président de tous les camerounais, vous devrez souffrir, que nous, simples citoyens désespérés, employions les faibles moyens dont nous disposons pour attirer son attention sur des dérives dangereuses pour la justice et la démocratie de l’Etat dont il est le Chef Suprême.
Je voudrais aussi dire en toute simplicité à tous ceux qui parlent et agissent pour leur propre intérêt en tyrannisant leurs compatriotes au nom du Chef de l’Etat, qu’ils ne doutent jamais qu’à tout moment la sanction du Maître s’abattra sur eux et que la Justice de l’Etat de droit camerounais ou celle du Monde leur demandera des comptes quand les citoyens camerounais les saisiront ». Ce « droit de réponse » a été transmis a Cameroon Tribune hier, 13 octobre.