Cameroun – Parc de la Bénoué: Des éleveurs armés s’attaquent aux éco-gardes :: Cameroon

Deux motos et des documents de travail brûlés par des éleveurs.
Les éco-gardes Nganse Amadou, Esso Mengue Eric, Dolga Etienne et Amawissa Jean Paul en service dans le parc national de la Bénoué, ont eu la peur de leur vie le 25 février 2014.[pagebreak] Il est 9 h quand les quatre éco-gardes et un guide de piste enfourchent les deux motos de service pour une patrouille de routine dans certaines zones du parc. A peine à deux kilomètres de la base vie du parc, ils sont stoppés net par un groupe d’éleveurs armés de couteaux et de flèches empoisonnées. «Cette attaque était minutieusement préparée car, tout porte à croire qu’ils nous attendaient. Ils savaient que nous sortirions ce jour et que passerions par là. Ils nous ont encerclés après nous avoir barré le passage. Nous nous sommes enfuis à pied en abandonnant les motos. Ils ne voulaient probablement pas nous faire du mal puisqu’ils nous ont laissé filer. Ils se sont intéressés aux motos qu’ils ont incendiées», raconte un des éco gardes victimes de l’attaque.

Cela ne faisait pourtant pas longtemps que le parc a été doté de ces deux motos brûlées. Une grosse perte, puisqu’en plus; elles étaient les seuls engins opérationnels dans cette réserve naturelle. «C’est un coup dur pour le parc car ces motos étaient les seuls moyens de déplacement que nous avions à notre disposition. Nous venions de les acquérir. Tous les autres engins sont en panne. Le conservateur s’est battu pour que notre structure puisse en être dotée. Ces motos nous avaient permis de relancer nos activités et en moins de cinq semaines, nous avons patrouillé quasiment dans tout le parc. Elles nous facilitaient le déplacement et nous permettaient de traquer les occupants illégaux du parc. Je pense que la colère de ces éleveurs vient des multiples patrouilles que nous effectuons au quotidien depuis l’acquisition de ces motos», précise pour sa part Esso Mengue Eric.

Les éleveurs acceptent mal les patrouilles des éco gardes. En effet, depuis la nomination du conservateur Mbam Mbam Jean Calvin en janvier 2014, les éleveurs et autres orpailleurs ont perdu le sommeil. Des sites illégaux d’exploitations minières sont détruits et des troupeaux des bœufs en divagation dans le parc sont également saisis. Des opérations que les éleveurs n’apprécient pas, «Nous ne sommes pas aidés dans notre travail ni par les autorités traditionnelles, ni par notre propre hiérarchie, bien que nous le faisons au péril de notre vie. Des menaces nous sont proférées au quotidien. Mais nous ne reculerons pas. Lorsque nous saisissons du bétail ou détruisons les camps des orpailleurs, les réactions d’intimidation viennent de partout au point où, nous nous demandons si nous sommes réellement dans un Etat de droit.

Les autorités traditionnelles quant à elles, ne reculent devant aucun moyen pour obtenir la restitution des bœufs ou du matériel de travail saisis dans le parc. Le parc n’a plus d’animaux. Le conservateur fait verser régulièrement le sel un peu partout dans le parc, pour retenir les animaux comme cela se fait partout ailleurs, mais ce sont les bœufs qui lèchent tout ce sel. Or, nous savons que le sel est un aliment très prisé par les animaux car, il est indispensable pour leurs fonctions vitales et reproductives. Quand ils n’en trouvent pas naturellement ils migrent vers d’autres cieux. Il faut dire, notre parc est agonisant et même sur le point de disparaître. A l’allure où vont les choses, la flore et la faune disparaîtront. L’Etat est interpellé s’il tient encore aux aires protégées», explique l’éco-garde Ngamse Amadou.

Selon des observateurs, le problème des aires protégées dans le Nord, vient de l’insuffisance des couloirs de migration. D’où l’urgence pour le gouvernement, de redéfinir les corridors de passage des animaux. Ceux qu’ils existent actuellement, sont dépassés par l’importance des mouvements des animaux. «Les aires protégées représentent plus de 42% de la superficie de la région du Nord. C’est beaucoup et cela nécessite des couloirs de migration pour animaux. Une piste de solution peut être le regroupement par l’Etat de tous les trois parcs de la région et crée un corridor en continu qui permet aux animaux de se déplacer sans trop de soucis. Il s’agit en fait, de procéder au déclassement des aires protégées. Sans cette politique, nous connaîtrons les mêmes difficultés puisqu’il va falloir toujours faire paître les animaux» note un responsable à la délégation régionale de la Forêt et de la faune.

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