Cameroun – Me Christian Bissou : « Les moyens non violents sont hiérarchisés »

Caro Louise Ndialle

Le président de la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés du barreau fait un décryptage juridique du drame survenu ce 14 octobre à Buéa.

A quel moment peut-on parler d’une bavure policière ?

Une bavure policière c’est simplement l’action de la police qui ne respecte pas un certain nombre de règles. Je vous rappelle que le corps de la sureté nationale des fonctionnaires de police est régi par le décret N°2001/ 065 du 12 mars 2001. Ces statuts disposent clairement en leur article 28 qu’il est interdit à tout fonctionnaire de police en service ou non d’abuser de sa qualité de son emploi ou de sa fonction. Je crois que cet article 28 pose les règles de base de la bavure policière. Cet article 28 pose un certain nombre d’infractions qui sont les fautes contre l’honneur, le devoir et la probité. Parmi ces fautes contre l’honneur, le devoir et la probité il y a la violence et les voies de fait.

A quel moment un policier ou un gendarme déployé dans un poste de contrôle peut faire usage de son arme ?

Par rapport à l’usage de l’arme, il y a ce qu’on appelle en droit les principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes. En réalité c’est un instrument international qui a été adopté par l’Onu en 1990. Lorsqu’on lit les principes de base et les recours à l’utilisation de l’arme à feu, il est mentionné que celui qui a la force doit autant que faire se peut, employer les moyens non violents. Dans ce texte, les moyens non violents sont hiérarchisés. On parle d’abord d’armes non meurtrières, d’armes neutralisantes et qu’on ne peut avoir recours à la force que si on a conscience que les autres moyens utilisés sont restés sans effet. Avant de faire usage de cette force, il faut d’abord que le policier se fasse connaitre, il faut ensuite qu’il donne un avertissement et enfin il doit laisser un temps suffisant entre l’avertissement donné et l’usage de cette arme qui doit être le dernier recours.

Que risquent ces jeunes gens qui ont bastonné à mort l’auteur du coup de feu qui a coûté la vie à la fillette ?

Ce gendarme a été victime d’un lynchage et je vous rappelle que le lynchage est une justice expéditive qui a été instaurée par un planteur en Virginie pendant la guerre d’indépendance qu’on appelait Charles Lynche. Cette méthode consistait à rendre justice sans procès à exécuter un présumé coupable. Cette justice n’existe plus, le Cameroun a les institutions judicaires. La justice n’est pas seulement une institution mais c’est aussi une vertu. Il faut donner le temps à la justice de démêler le vrai et le faux lors d’un procès équitable. Tous ceux qui sont là pour rendre une justice en exécutant les gens sans procès sont passibles de meurtre. Il y a meurtre lorsque vous décidez de lyncher par exemple un présumé malfaiteur que vous avez arrêté.

Propos recueillis par P.N. 237online.com

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