Cameroun: L’accès aux toilettes, une urgence sanitaire à Yaoundé

Toilettes publiques

Dans la ville de Yaoundé, les populations vivent dans la promiscuité. La situation perdure depuis des années et les populations en ont marre et craignent un retour du choléra.

Malgré de nombreuses sensibilisations sur l’assainissement des toilettes, plusieurs familles à Yaoundé n’ont pas accès aux toilettes modernes. Selon les témoignages recueillis sur le terrain par la reporter du quotidien Le Messager, la situation est alarmante et préoccupante au quartier Etam-Bafia. « Il y a certains appartements ici qui n’ont qu’une seule toilette. Un appartement qui abrite une vingtaine de personnes », raconte Melissa. Dans ce quartier de la ville de Yaoundé, les populations vivent dans la promiscuité. La situation perdure depuis des années et les populations en ont marre et craignent un retour du choléra.

Dans ces quartiers défavorisés, trouver un endroit où faire ses besoins est une lutte de tous les jours. Beaucoup pratiquent la méthode des “toilettes volantes ” : les habitants utilisent des sacs plastiques qu’ils jettent ensuite sur les toits ou le plus loin possible de leurs habitations. Lorsque ceux-ci disposent de latrines, à l’image du petit Jordan, leur contenu, évacué dans un trou ou une fosse septique, est rarement vidé par un service régulier d’évacuation. Et lorsque celui-ci est en fonction, seule une petite partie des matières fécales est retraitée. Le reste débouche dans les rivières, où l’on puise bien souvent l’eau pour la consommation de la population et du bétail.

L’absence des toilettes décentes est une réalité dans de nombreux quartiers populaires de Yaoundé. Et, la situation semble contraindre les habitants à déféquer de plus en plus à l’air libre. A deux chevaux à Yaoundé, certaines personnes défèquent dans les plastiques, pour ceux qui n’ont pas de toilettes. Oriane est une locataire dans ce quartier. Cette dernière a été obligée de fabriquer une toilette avec la moustiquaire imprégnée. « C’est
très surprenant et bizarre de vivre dans une maison sans toilette. Quand je me plains auprès des gens que je loue une maison sans toilette, ils ont du mal à me croire. J’attends juste de finir mon contrat avant de partir. Pour déféquer le plus souvent je vais chez les voisins, ou alors dans les toilettes publiques où je paie 100f. Quand je suis en train de manger chez moi, des mouches qui viennent des toilettes se posent dans mon plat de nourriture et dans mon verre d’eau
», se désole Oriane. Vraiment la promiscuité ici à deux chevaux est grave. « Parfois certains riverains urinent et défèquent dans les bouteilles qu’ils balancent dans les bacs à ordures », raconte-t-elle. Les conséquences sur la santé sont désastreuses. Selon le Dr. Jules Mityene, chaque année, 314 000 enfants de moins de 5 ans meurent de maladies diarrhéiques liées à la consommation d’eau.

Un sujet longtemps tabou à l’Onu Offrir à ces populations des conditions de vie décentes, c’est tout l’enjeu des 17 Objectifs de développement durable
(Odd) qui ont été votés à l’unanimité par 195 États en septembre 2015 à l’Onu et qui prévoient notamment, dans leur Objectif 6, un accès universel à l’assainissement d’ici à 2030. Un objectif très ambitieux. Trop, sans doute, tant l’assainissement est un domaine ignoré depuis longtemps. “Les pourvoyeurs d’aide consacrent en général 10 fois plus de ressources à l’eau qu’aux installations sanitaires. Dans les programmes “eau et assainissement”, ils omettent souvent de dégager les budgets pour l’éducation à l’hygiène, la promotion des toilettes ou la construction de systèmes d’évacuation des eaux et des excréments ”, s’indignait ainsi Maggie Black, spécialiste britannique des problématiques liées à l’eau dans un article paru en 2010 dans Le Monde diplomatique.

“C’est une question taboue, surtout dans l’enceinte majestueuse des Nations unies où aucun représentant de pays n’a envie de raconter ses problèmes de toilettes et d’eaux usées. L’autre difficulté tient au fait que l’accès aux réseaux d’assainissement exige de passer par les pouvoirs publics, contrairement à d’autres services moins vitaux comme le téléphone portable. Ainsi, vous ne pouvez pas décider dans votre coin de raccorder votre maison au réseau d’assainissement existant. C’est d’autant plus difficile dans le cas des États souvent fragiles des pays en développement. Mais attention, ce n’est pas parce qu’un pays est pauvre qu’il est forcément déficient dans le domaine. Et vice versa. “Il s’agit vraiment d’une question de volonté politique, explique Gérard Payen.

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