Cameroun : De Bidoung à Manaouda…Le « masque » des Task force a la peau dure

Bidoung et Malachie

Après le lourd tribut de la Task force des infrastructures sportives, le Cameroun patine dans le bourbier de la Task force sur la gestion Covid-19.

Deux premiers ministres, deux Task force; les deux chefs du gouvernement toujours obligés de s’effacer, d’observer impuissants, à la touche, la gestion des grands projets juteux. Hier Philémon Yang largué et réduit en spectateur de la gestion de la construction des infrastructures sportives de la Can-2019. C’est au tour de Joseph Dion Ngute de boire la « tasse ». Alors qu’on croyait que le chef du gouvernement était les yeux et les oreilles de Paul Biya, il n’en est rien. La marge des manœuvres qu’il avait au mois de mars 2020 et l’aplomb sur la sensibilisation au respect des mesures barrières édictées par le président de la République pour lutte contre la progression du Covid-19 dont diluée, s’étiolent telle peau de chagrin.

Dépassé, isolé, réduit à tenir des concaves et des événements sans grande portée, ni influence certaine, Joseph Dion Ngute est à la croisée des chemins. Le Minetat/Sgpr quant à lui, à l’aise dans le beau rôle, partage l’onction de gabegie, verse dans le gaspillage à tout vent, du budget d’urgence (validé par Paul Biya) pour la riposte contre la propagation du Covid-19. Usant des privilèges et la gestion-autorisation exclusive de la Task force, Ferdinand Ngoh Ngoh passe des marchés spéciaux qui échappent à tout contrôle, en violation flagrante du code des procédures de passation des marchés publics. Les motivations de la Présidence de la République à utiliser des subterfuges, les voies de contournement dans les marchés publics sont insondables. Comment comprendre que la présidence soumette à l’épreuve de l’assainissement des finances publiques, les autres gestionnaires, les comptables des ministères, les institutions publiques, mais que ce respect de l’orthodoxie ne soit pas appliqué au palais d’Etoudi? S’agissant de l’approvisionnement en médicaments et consommables médicaux, pourquoi la présidence fait volte face, rame à contre-courant de la réglementation de l’arrêté No 169/cab/pm du 12 novembre 2010 portant création, organisation et fonctionnement de la commission des marchés spéciaux des médicaments et des dispositifs médicaux essentiels auprès de la centrale nationale d’approvisionnement en médicaments et consommables médicaux essentiels (Cename)? À quoi sert-il d’instrumentaliser le supplice, la peur, la panique les frayeurs du tribunal du Consupe; de faire planer le spectre du tribunal Criminel spécial (Tcs) sur les frêles épaules de certains gestionnaires présumés coupables, alors que la présidence de la République peut fouler au pied, s’affranchir des mesures de protection de la fortune publique?

« La présidence attribue les marchés selon des mécanismes internes et non selon le code des marchés », lance un conseiller en service au palais d’Etoudi. À bien regarder, le ministère délégué à la présidence de la République en charge des marchés publics (Minmap) est un feu de paille, de la poudre aux yeux. Dans les projecteurs, de manière effective, le vrai patron du Minmap est logé à la présidence de la République. « La présidence ne fait pas d’appel d’offres, elle passe les marchés de gré à gré; les procédures directes sont adaptées aux mécanismes de vérification interne »,argue un inspecteur en service au Contrôle Supérieur d’État. Cette situation doit-elle se poursuivre? Ces textes ne sont-ils pas à inscrire dans le passé d’une époque où, il n’était guère question de voir la présidence influer, s’engluer, se rendre incontournable dans les négociations directes, les accords spécieux avec les opérateurs économiques et les entreprises par le biais des Task force décrétées et logées à la présidence.

Chasse au « Maguida » du Minsanté

Comme si l’on était en plein dans la « tragédie de la poule et du lézard », le ministre de la Santé publique Manaouda Malachie est dans la ligne de mire, tel un agneau du sacrifice que le Minetat/Sgpr Ferdinand Ngoh Ngoh veut faire guillotiner, brûler sur le feu de l’autodafé. La correspondance signée le 20 avril 2021, du Minetat/Sgpr instruisant au Minsanté, l’attribution et la signature des contrats dans le cadre de la riposte contre le Covid-19 est à questionner. Est-ce que la présidence de la République est devenue l’espace technique et opérationnel où se discutent et se négocient les contrats? Pourquoi après avoir arrêté le casting des entreprises, les montants, les quantités et la qualité de la commande des équipements et les consommables, c’est au Minsanté que les documents sont acheminés pour achever le boulot dans sa partie de la figuration en terme de signatures ? Si jamais la situation explose demain qui fera les frais ? N’y a- t- il pas un mauvais coup fumant en perspective? Si le Minetat Sgpr peut sélectionner les entreprises, arrêter les montants de manière unilatérale, il n’y a pas de raison qu’il ne signe pas les contrats.En grattant le vernis, on peut penser que quelqu’un veut pousser Manaouda Malachie dans le fils barbelés, ou lui tordre la tête dans un ring de boxe.

Parceque logée au palais d’Etoudi, la Task force ne doit pas permettre à certains de se « sucrer », à obtenir certaines faveurs,; mais pour les autres être des cadeaux empoisonnés. Après avoir tenté en vain d’envoyer le Minsanté et une bonne fourchette des membres du gouvernement à l’inquisition, dans les griffes du Minetat Laurent Esso qu’il voulait utiliser comme le bourreau sacrificiel chargé d’actionner la moulinette broyeuse, la présidence de la République ne désarme pas. Signalons que le Minetat/Sgpr a déjà envoyé le contrôle Supérieur de l’Etat aux trousses du Minsanté. Cette institution n’a pas encore rendu sa copie, mais il n’empêche qu’en date du 29 mars 2021, prescrivant l’accélération de la mission d’audit sur la gestion des fonds Covid-19 au ministère de la Santé publique, le Minetat/Sgpr a au nom du président de la République adressé une autre lettre au ministre de la Justice Garde des Sceaux, d’ordonner l’ouverture d’une enquête judiciaire contre « les auteurs, coauteurs, et complices des cas de malversations financières » desdits fonds.Doit-on penser que cet emballement aux allures d’acharnement et de chasse aux sorcières à défaut d’être un règlement de comptes subodore que Ferdinand Ngoh Ngoh veut assouvir une grandeur vengeresse contre Manaouda Malachie. L’acharnement ressemble étrangement à une cabale.

Remember Bidoung Mpkwatt

Le ministre Manaouda Malachie n’est pas le premier membre du gouvernement de Paul Biya à essuyer les foudres du Minetat/Sgpr. Signalons l’impertinence, la volte-face il y a trois ans d’Abba Sadou Ministre délégué auprès de la présidence de la République, chargé des marchés publics avait violé les consignes de Ngoh Ngoh au sujet de l’attribution du marché de construction de la pénétrante Est allant du pont sur la Dibamba au stade Japoma. Abba Sadou avait osé défier le Sgpr ( il n’était pas encore devenu le très puissant Minetat) et confié le marché à une entreprise chinoise; alors que les préférences de Ferdinand Ngoh Ngoh étaient pour les français de la société Razel. Abba Sadou fut viré et chassé du gouvernement comme un malpropre. Le ministre Pierre Ismaël Bidoung Mpkwatt, sauvé de justesse des charbons ardents de la Task force n’a jamais oublié. Au cours d’une des réunions avec Philémon Yang après le retrait de la Can-2019, le ministre des Sports et l’éducation physique avait publiquement tancé, décrié l’incurie et l’inertie de l’Etat central. Le Minsep fustigeait les pesanteurs et les lenteurs dans l’attribution, la passation des marchés; des pertes de temps absurdes dans la signature des contrats.

Pierre Ismaël Bidoung Mpkwatt avait exprimé ses plaintes et doléances à la 22ème session du Comip-Can sur la situation des chantiers de la Can 2019 retirée au Cameroun. Pour avoir osé dénoncer la Task force, son insolence avait failli lui faire perdre son poste ministériel. Pierre Ismaël Bidoung Mpkwatt fût sauvé de justesse de la disgrâce, mais il sera « largué » au ministère des Arts et de la culture. Pointer un doigt contre Ferdinand Ngoh Ngoh, l’accuser de boulimie du Pouvoir est une frontière outrancière à ne pas traverser. Le Minetat/Sgpr est de réputation intrépide, tenace, intraitable et impitoyable.

Souley ONOHIOLO


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