Cameroun – Chute du prix du Pétrole: Peur sur l’exécution du budget 2015

Petrole en mer

Le gouvernement pense déjà à une stratégie pour parer aux contrecoups de la chute des cours mondiaux. Vers une baisse du Pib ? [pagebreak]En dégringolade ininterrompu depuis quelques semaines, les cours mondiaux du pétrole brut (moins de 50% le baril) ont déjà commencé à inquiéter le gouvernement du Cameroun, qui craint de ne pas pouvoir atteindre son objectif de réaliser 775 milliards F Cfa de recettes pétrolières en 2015. Le ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey a, au cours du dernier conseil de cabinet tenu à Yaoundé, laissé entendre que cette situation pourrait, si elle se poursuit, se traduire par une baisse considérable des recettes pétrolières au Cameroun en 2015. Pour parer aux contrecoups d’une telle situation et combler la moins-value en vue d’une exécution optimale du budget de l’Etat pour cette année, le gouvernement compte mettre sur pied une stratégie de collecte des recettes non pétrolières. Il est certain qu’une baisse drastique (telle qu’elle se dessine) des recettes pétrolières, qui représentent environ 30% des ressources budgétaires, va entraîner des pressions fiscales supplémentaires sur les opérateurs économiques. Sinon, c’est la poursuite des projets structurants qui s’en trouve hypothéquées, même si les avis d’experts sont divers sur la question. « Les investisseurs, indique l’économiste Bernard Ouandji, souhaitent plutôt une stabilité fiscale ; et les investisseurs étrangers encore plus. C’est d’ailleurs l’un des arguments de propagande de l’Agence de promotion des investissements. Le moment est très mal indiqué pour accroître les charges fiscales. Les ménages et les entreprises souffrent de la hausse des charges décidées en juillet 2014, notamment la hausse appliquée sur les carburants ».
Pour cet expert, « les catastrophes à venir c’est l’accumulation des arriérés intérieurs et la non réalisation des projets d’investissement. Ceci dit, les outils de politique conjoncturelle sont nombreux et peuvent être actionnés pour éviter ces catastrophes. Parmi ces outils, plusieurs pays dans les mêmes circonstances ont trouvé bonheur à appliquer le tax cut, le rate cut, le quantitative easing, etc. Et pourquoi pas nous. Et avant tout, il faut renforcer les capacités nationales en analyse prévisionnelle et gestion des risques sur les marchés spéculatifs ». Dieudonné Essomba pense pour sa part que le pétrole intervient de deux manières sur le budget de l’Etat. « D’une part, il contribue aux recettes à partir de la redevance de la Snh et de l’impôt sur les sociétés de cette entreprise. Ce montant représente grosso modo le tiers du budget de l’Etat. Mais d’un autre côté, le pétrole contribue en négatif sur le budget de l’Etat, à travers les subventions à la consommation, lesquelles ont été récemment allégées », explique l’économiste. Qui se dit que non seulement les recettes pétrolières vont baisser dès lors que les prix internationaux sont sur courbe descendante, mais également que l’inévitable baisse des subventions peut « se transformer plutôt en une recette de l’Etat, autrement dit, en impôts à la consommation. L’Etat peut ainsi rattraper à travers ces « subventions négatives » ce qu’il perd en recettes pétrolière. Par suite, si on fait le calcul que les recettes pétrolières représentent 30%, la baisse de 50% des prix va se traduire par une baisse des recettes budgétaires de 15% seulement ; et ces 15% peuvent être compensés par ces subventions négatives ».

Baisse du Pib
En définitive, appuie Dieudonné Essomba, la baisse du prix du pétrole n’aura pas directement d’incidence majeure sur le budget. « Par contre, pense-t-il, ce sont les effets indirects qui sont à redouter (…) Du fait de sa dépendance technologique, le Pib du Cameroun fortement est corrélé à ses recettes d’exportation : si les recettes baissent de 1 point, le Pib va baisser également de 1 point. En conséquence, la baisse de moitié du pétrole qui représente 40% des recettes d’exportation va entraîner une importante baisse du Pib, et par ricochet, une baisse des recettes fiscales de l’Etat. C’est cette baisse qu’il faut redouter puisque l’Etat n’a pas les moyens de la compenser. A moins, évidemment, de recourir à une dette extérieure. Donc, plutôt que de se focaliser sur le budget, il faudrait s’inquiéter des contrecoups sur l’ensemble de l’économie et de la menace de plus en plus précise d’un autre programme d’ajustement ».
Dieudonné Essomba, qui pense que les difficultés d’exécution optimale du budget au Cameroun n’ont pas attendu la baisse des recettes douanières, puisqu’elles datent de depuis au moins 5 ans, craint surtout que la baisse des recettes pétrolières pour l’ensemble de l’économie, et celle des recettes douanières pour l’Etat ne sont que des facteurs aggravants qui rendront la situation économique de plus en plus difficile.

Jean De Dieu Bidias

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