En manque d’inspiration, certains artistes musiciens forcent le passage et basculent dans les déviances s*e*xuelles.
«Coller ! coller ! la petite, sanga ! sanga ! la petite.» Voilà le refrain que chantaient hier matin, en toute innocence, des bambins de l’école publique de Ngoumou, région du Centre, en chemin aller pour leur établissement. Un peu partout ailleurs, le cliché est parlant. Nombreux sont ces jeunes et moins jeunes qui raffolent ce genre musical qui plonge ses racines dans les déviances s*e*xuelles. Interdit de diffusion l’an dernier par le Préfet de la Mifi à Bafoussam (région de l’ouest), cette galette musicale «Coller la petite» de l’artiste musicien Franco de son vrai nom Franck Junior, a plutôt connu une grande expansion notamment sur la Toile. L’acte du chef de terre a connu plutôt un résultat mitigé, faisant couler au passage assez d’encre et de salive. Du coup, le débat sur les déviances s*e*xuelles dans la musique a refait surface.
À l’observation, la musique camerounaise est aujourd’hui traversée par des déviances de toutes natures, notamment des propos obscènes, des paroles ordurières, des expressions s*e*xuelles crues et des gestes érotiques. Sans aucun recul, certains artistes fredonnent le s*e*xe, l’acte s*e*xuel ou l’amour érotique. D’autres vont plus loin, tout en gazouillant, ils minent l’acte s*e*xuel et autres attitudes corporelles déviantes. Comment oublier dans un passé encore récent, les paroles avilissantes et les contorsions s*e*xuelles de l’artiste musicienne Katino dans « Ascenseur, le secret de l’homme», ainsi que Pedro du Cameroun dans «Nsono-nsono» ou Messi Ambroise dans «La Première fois». La liste est bien longue tant au Cameroun que dans le reste du monde où les artistes sont devenus des papes du s*e*xe, faisant appel aux propos plus directs et obscènes.
Musique de poubelle
Interrogés, la plupart des Camerounais condamnent ce genre musical. Stéphane Epo’o, gardien de prison à Ngoumou est de cet avis : «je suis contre tous ces musiciens qui en mal d’inspiration truffent leurs morceaux de paroles obscènes», déplore cet homme en tenue. Dans la même veine, Amougui De Minkoulou habitant à Oveng dénonce : «le chômage et la misère poussent certains parmi eux à pondre sur du violon, des navets pleins d’obscénités.» Pour lui, les consommateurs doivent sanctionner ce genre en refusant d’acheter et d’écouter ces pamphlets érotiques. Poursuivant la réflexion, il pense que l’État doit sévir afin de décourager les potentiels auteurs qui font revivre les villes antiques de Sodome et Gomorrhe, détruites par la colère divine à cause de l’extrême.
Le climat social ambiant marqué par le lessivage des valeurs morales, la faillite de l’éducation de base, la négligence des parents, le manque d’inspiration des musiciens concourent de nos jours à la prolifération de la musique po*r*nographique. Pourtant les nostalgiques reconnaissent la belle époque où la musique décente était un vecteur de la morale. «Je suis très sélectif aujourd’hui dans mes écoutes musicales, parfois je fais appel à l’ancienne musique, le Makossa le Bikutsi où les artistes comme Nkodo Si Tony ou Sallé Njoh ont fait vibrer le Cameroun et le monde entier», regrette Stéphane Epo’o.
Élie Pagal