Cameroun – Célébration: Ernest Ouandié, le prophète sans armes

La jeunesse camerounaise est invitée à s’inspirer du leader nationaliste mort il y a 46 ans dans le « maquis » malgré lui.
L’Union des populations du Cameroun (Upc) n’a jamais été créée pour faire la guerre. Ses fondateurs y ont été contraints. Ils n’étaient guère préparés matériellement. Voilà l’essence de l’argumentaire développé par le philosophe Sindjoun Pokam. 237online.com Une fois de plus, l’intellectuel a pris la parole sur le sujet, le temps de la soirée anniversaire de la mort d’Ernest Ouandié, fusillé le 15 janvier 1971 sur la place du marché à Bafoussam. Le leader nationaliste s’était rendu quelques mois plus tôt, après 10 ans de lutte dans le maquis. Quarante-six ans plus tard, la veillée des martyrs organisée ce 13 janvier 2017 à Yaoundé a été l’occasion de se poser la question de savoir pourquoi l’Upc, un mouvement aussi puissant, populaire et dynamique, a échoué et n’a pas pu conquérir le pouvoir ; du moins a perdu le combat pour ses idées et son programme politique, sinon le combat du nationalisme camerounais contre l’oppression coloniale et néocoloniale. « Ouandié était un prophète désarmés, tout comme l’avaient été avant lui Um Nyobe, Ossendé Afana ou encore Félix Roland Moumié, assassinés eux aussi », explique Sindjoun Pokam. C’est un avis partagé au sein du Front progressiste et panafricaniste, plateforme lancée en juillet 2013 par trois partis politiques : le Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem), le Mouvement citoyen (Moci) et l’Union des populations africaines (Upa). Ces formations politiques se revendiquent toutes de la lutte des premiers upécistes. Ruben Um Nyobe et ses camarades avaient engagé la lutte armée sans en avoir les moyens. « L’Upc n’a jamais eu envie d’entrer dans le maquis, il y a été poussé par le camp d’en face, c’est-à-dire le pouvoir colonial français et le pouvoir du président Ahidjo. Ils s’étaient préparés à faire la guerre à l’Upc et à ses leaders », renchérit Sindjoun Pokam. Ernest Ouandié, prophète désarmé, est alors présenté comme le leader nationaliste ayant porté sur ses épaules tous les problèmes de la lutte camerounaise. En effet, après la mort de Félix Roland Moumié, empoisonné à Genève en Suisse, Ernest Ouandié abandonne l’exil et revient au Cameroun en 1961 où il prend les commandes de la fameuse Armée nationale de libération du Kamerun (Anlk). « Sa vie sous maquis a été un enfer. Il a aimé son pays jusqu’à lui donner sa vie », écrit dans son témoignage une militante upéciste. Anicet Ekane du Manidem l’a aussi dit avec ses mots à lui, appuyé par le président de son parti, Dieudonné Yebga. Le président national du Moci, Théophile Yimgaing Moyo, l’a également martelé. Sindjoun Pokam a ajouté que la population camerounaise n’était guère préparée à la violence, ni matériellement, ni psychologiquement. Pourtant le combat doit se poursuivre avec la nouvelle génération. Sindjoun Pokam conseille alors aux jeunes de « tirer les leçons de l’histoire et de suivre l’exemple des prophètes armés comme Nelson Mandela ». Il poursuit : « la jeunesse doit s’imprégner de la doctrine de la guerre, mesurer ce qu’elle peut faire, rester extrêmement vigilante pour neutraliser les traîtres, ne pas se laisser désarmer et liquider par des discours lénifiants sur la paix alors que la guerre continue sous d’autres formes. »

Assongmo Necdem

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