Une plainte à Paris contre l’Etat du Cameroun

Palais presidentiel d'etoudi

Le Conseil des Camerounais de la Diaspora (Ccd) vient de saisir le Procureur de la République près le Tribunal de grande Instance de la capitale française pour « dénonciation de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et génocide au Cameroun ».

La rumeur circulait depuis quelques jours déjà, dans les milieux des Camerounais expatriés dans l’hexagone, notamment à Paris. Le fait est devenu réalité. Le Conseil des camerounais de la Diaspora, organisation de la société civile constituée des ressortissants camerounais de la diaspora pour la promotion des valeurs démocratiques a saisi , le 11 mai 2020, le Procureur de la République près le Tribunal de Grande instance de Paris pour « mettre en cause l’État du Cameroun, certains de ses dirigeants, les autorités militaires ainsi que tous les autres acteurs impliqués dans la crise dite anglophone et dans les violences ayant suivi le contentieux de l’élection présidentielle du 7 octobre 2018 ». Le document de cinq pages, égrène les motifs de la plainte. « Depuis fin 2016, il se vit dans les régions anglophones du Cameroun notamment les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest une crise dite anglophone, qui remonte à la période où les avocats, les étudiants et des enseignants anglophones ont commencé à protester contre leur sous-représentation au sein du gouvernement central, et leur marginalisation culturelle par ce dernier. La réponse des forces de sécurité gouvernementales a notamment consisté à tuer des civils, à incendier des villages et à recourir à la torture et à des détentions arbitraires ».

L’écrit note : «le 28 septembre 2016, des étudiants de l’Université de Buéa qui réclamaient le paiement de leur prime d’excellence et l’arrêt de l’extorsion de 10 000 Fcfa aux étudiants s’étant acquittés avec retard de leurs droits universitaires vont, sur ordre de Madame Nalova Lyonga Pauline Egbe, alors Recteur et actuellement ministre des enseignements secondaires, être violentés, torturés, violés et forcés de se baigner dans les torrents d’excréments humains par des éléments des forces de maintien de l’ordre. Certains des étudiants qui avaient réussi à s’échapper du campus seront ultérieurement recherchés partout dans la ville de Buéa, interpellés dans leurs chambres pour être soumis à de pires sévices ». Rappel également des violences qui ont émaillé les manifestations du 26 janvier 2019 à la suite de la présidentielle, en 2018, avec à la clé l’arrestation de plusieurs dizaines de militants du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (Mrc) dont son président, Maurice Kamto.

Ce dernier a été libéré plusieurs mois après, pas son Vice-président Yacouba Mota. « 12 000 morts dans la crise anglophone » Les évènements du 6 février 2019, où « les forces de sécurité, dont des militaires du Bataillon d’Intervention Rapide (BIR) placé sous l’autorité respective du Général Bouba Dobekreo et du Général Mayer Heres, ont pris d’assaut le marché du village de Bole Bakundu, dans la région du Sud-Ouest, tuant jusqu’à dix hommes non armés », ceux du 4 avril 2019, quand « des militaires, des gendarmes et des membres du BIR camerounais ont mené une attaque meurtrière contre le village de Meluf, dans la région du Nord-Ouest, tuant cinq hommes, dont un avait un handicap mental, et blessant une femme», et du reste de l’année sont consignés. « Le 15 mai 2019, avec « des soldats de l’armée de l’air et des militaires du BIR ont attaqué Mankon, à Bamenda, dans la région du Nord-Ouest, incendiant plus de 70 habitations et tuant un homme ; le 10 juillet, des soldats de l’armée de l’air sont retournés à Mankon et ont tué deux hommes. Le 24 septembre, des militaires du Bir ont attaqué le Palais royal de Bafut, classé au Patrimoine mondial de l’Unesco, blessé un homme par balle et pillé le musée du Palais, s’emparant de plusieurs objets précieux », insiste le Ccd. Enfin, les drames de l’année 2020, avec des militants du Mrc arrêtés à Bangangté, en janvier, les massacres perpétrés par des élément de l’armée dans le village de Ngarbuh, le 14 février, et les 15 civils innocents tués à Babanki, le 29 février, apparaissent sur la plainte du Ccd qui affirme que « la crise anglophone, aux dires de certaines Ongs, auraient fait 12 000 morts depuis la fin de l’année 2016 ».

Pour Maître Florence Noumo, avocat du Ccd, « Cette plainte, déposée par une association loi 1901, de droit français, avec constitution de partie civile d’un citoyen camerounais résident à Paris, est totalement conforme à l’universalité du droit en matière de Dénonciation de Crimes contre l’humanité, Crimes de guerre et Génocide au Cameroun ». Le procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Paris, a maintenant plusieurs semaines, mois voire années, pour se prononcer sur la recevabilité ou non de la plainte.

Jean-Célestin EDJANGUE à Paris

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