Suisse : Paul Biya sous la menace d’une insurrection

Paul BIYA en route pour Geneve

Des activistes établis en Europe se donnent rendez-vous pour perturber le séjour du président qui a quitté le pays dimanche pour l’Europe.

Dans un communiqué rendu public ce 12 juillet 2021, l’ambassadeur du Cameroun en suisse dénonce «un projet qui vise à déstabiliser [les] institutions» de la république du Cameroun, notamment le chef de l’Etat. Son excellence Léonard Henri Bindzi pointe des «groupes extrémistes [qui] menacent de s’en prendre à monsieur le président de la république, notamment lors d’une manifestation envisagée à Genève dans les jours à venir». Et de fait, des éléments de la Brigade antisardinard (Bas), ce mouvement qui sévit en Europe contre le régime de Yaoundé et ses soutiens, a annoncé sur les réseaux sociaux des manifestations devant l’hôtel intercontinental de Genève, où serait logé Paul Biya et son épouse qui ont quitté Yaoundé dimanche dernier pour «un court séjour en Europe», sans précision. Mais la destination du couple présidentielle n’est pas restée cachée longtemps.

L’on a retrouvé des traces de Paul Biya en suisse, où il a toujours eu ses habitudes depuis plusieurs décennies, jusqu’à ce que la Bas s’invite dans son séjour en 2019. Le haut représentant du Cameroun en Suisse redoute la manifestation annoncée avec pour objectif de «capturer» le président camerounais, selon des termes utilisés par certains activistes. « L’ambassade, outrée par des propos aussi virulents qu’odieux,… condamne sans réserve l’attitude irresponsable et haineuse des auteurs de ces propos obscurs et de ce projet insensé ». Le représentant de Paul Biya en confédération helvétique « tout en soulignant la nécessité pour tout Camerounais, où qu’il se trouve, de promouvoir le vivre-ensemble, et de ne pas céder aux discours haineux, invite les membres de la diaspora camerounaise de Suisse et de ses pays voisins, à ne pas s’associer aux manœuvres inacceptables visant par ailleurs à ternir l’image de notre pays et à porter atteinte aux excellentes relations d’amitié avec notre pays d’accueil». Indiquant avoir saisi les autorités sécuritaires de la Suisse au sujet de cette situation. Léonard Bindzi ne néglige pas la menace des activistes qui donnent rendez-vous devant l’hôtel du président, car un précédent existe.

Un précédent parlant

Lors de son dernier passage en terre suisse, Paul Biya avait essuyé un violent assaut des éléments de la BAS qui ont envahi son hôtel le 26 juin 2019. Les manifestants dénonçaient non seulement la fraude électorale, mais les interminables séjours couteux d’un président qui s’éternise au pouvoir alors que le pays sombre et patine en matière de développement. Ils exigeaient alors à Paul Biya qui y vient souvent pour des raisons médicales, de construire des hôpitaux de référence au pays et aux plateaux techniques élevés, pour s’y soigner et faciliter les soins aux Camerounais. Les assaillants qui avaient déjà pénétré l’immeuble logeant la délégation présidentielle, avaient été réprimés manu militari par des éléments de la sécurité présidentielle. Au passage, Adrian Krause, un journaliste de la Rts, la télévision nationale publique de la Suisse, avait payé les frais de sa présence en ces lieux. Molesté, le reporter avait été délesté de son sac et ses outils de travail. La suite des événements n’avait pas été heureuse pour le locataire de luxe de l’hôtel intercontinental. La justice suisse avait condamné les six membres impliqués dans l’agression du journaliste, respectivement à 4 mois (pour quatre membres) et trois (pour deux autres), tous avec sursis, avant d’être libérés immédiatement. Parmi les condamnés, une secrétaire de l’ambassade.

Les condamnés avaient fait appel de la décision de la justice, évoquant l’immunité diplomatique du président camerounais, mais la chambre pénale de recours avait rejeté cet appel et confirmé les condamnations. « Au regard du caractère privé de la visite de Paul Biya, l’intervention de son service de sécurité destinée à disperser des opposants et empêcher un journaliste d’exercer son métier ne peut être considérée comme une manifestation de souveraineté de l’Etat camerounais. Par ailleurs, selon le parquet, l’immunité du Chef de l’Etat ne s’attache qu’à sa personne, à son conjoint et aux membres de sa suite ayant un rang élevé. Ce n’est pas le cas des prévenus», avait rapporté le journal La tribune de Génève.

Cette première visite en terre helvète depuis cet incident, ne diffère pas de l’autre, en nature. Il s’agit encore d’une visite privée. La représentation diplomatique camerounaise en suisse espère avoir de son côté les services de sécurité suisses pour endiguer toute tentative d’invasion de l’hôtel de Biya pendant son séjour. Depuis l’incident de juin 2019, le président camerounais est devenu casanier et n’est plus allé qu’en France en 2020, lors du sommet sur la santé organisé en France.

Lindovi Ndjio

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