Francis Ngannou: Je vous promets de ramener cette ceinture au Cameroun et pour très longtemps

Francis Ngannou

En séjour au pays depuis le 26 janvier dernier, « The predator » revient sur les circonstances de sa défaite pour le titre de champion du monde de l’Ufc.
Pourquoi vous appelle-t-on « The predator » ?
« The predator », c’est le surnom que j’ai choisi. J’ai trouvé qu’il était approprié pour moi, parce que j’aime l’instinct de ces fauves, de ces chasseurs qui sont très objectifs. Une fois devant leur cible, ils ne s’occupent plus de ce qui est autour. Peu importe si l’autre gibier leur traverse dessus, ils se focalisent sur leur véritable proie, au point de ne pas voir ce qui tourne au tour.

Dans la nuit du 20 au 21 janvier dernier, vous avez perdu le combat pour le titre de champion du monde des poids lourds de l’Ultimate fighting championship (Ufc) face à Stipe Miocic. Que s’est-il passé ?
J’avoue que ce combat était à ma portée. Je ne l’ai pas perdu parce que mon adversaire était au-dessus de moi. Je ne l’ai non plus perdu parce que je manquais de capacité. J’avais le potentiel pour gagner ce combat. Malheureusement, j’étais un roi sans notables. C’est-à-dire, je suis arrivé à l’Ufc il y a deux ans. Mon ascension a été fulgurante. Je n’ai pas eu le temps de construire les choses. Je n’ai non plus eu d’entourage, pas beaucoup de soutien. Je suis monté tout seul. Alors, quand le vent a soufflé, je suis tombé. Je suis arrivé à un niveau où je titillais les plus forts du monde. Les meilleurs de la catégorie. Ceux qui pratiquent ce sport depuis leur enfance. Mais, j’ai manqué de soutien. J’ai pris le combat contre le titre parce que c’était une opportunité. Je n’avais que six semaines de préparation. J’étais persuadé de gagner, puisque je connaissais mon adversaire depuis très longtemps. Je le suivais parce qu’il était sur la liste de mes proies. Une seule chose que j’avais ignorée, c’était l’impact médiatique qu’il y avait autour. Pour l’Ufc, j’étais le combattant qui devait rajeunir et redonner une dynamique à la catégorie. C’était également la même chose pour les journalistes.
Il y a eu beaucoup de sollicitations, puisque l’Ufc voulait à tout prix promouvoir le combattant et le combat, ils (les responsables, ndlr) n’ont pas réfléchi sur certaines choses et m’ont poussé dans les médias où j’ai assuré. A six semaines du combat, je n’avais pas toujours une équipe autour de moi. Je me suis rendu compte que j’étais un roi sans notables, lorsque je voyageais pour des conférences de presse. Il fut une semaine où j’ai eu du mal à m’entraîner trois fois. Dans ces tournées médiatiques, je me suis rendu à l’évidence que tous ceux qui faisaient la même chose que moi avaient une équipe autour d’eux, à leurs frais. Je n’avais pas eu le temps de construire. Je ne pouvais pas avoir des coachs à ma disposition, des nutritionnistes à mes frais, puisque j’avais des difficultés pour me prendre en charge. Je me suis rendu compte que si je suis tombé plusieurs fois dans la vie, c’est parce que je me suis relevé autant de fois.

A 31 ans, pensez-vous encore devenir champion du monde ?
Je viens juste de commencer ma carrière. Rien n’est encore fait. Généralement dans ce sport, en quatre ans, certains sont encore amateurs. Mais je suis allé titiller le toit du monde. Et ce n’était que le début. Je vous promets de ramener cette ceinture au Cameroun et pour très longtemps.

En quittant le Cameroun, vous boxiez déjà. Comment s’est fait le passage de la boxe au Mixed martial arts (Mma) ?
Le passage de la boxe au Mma s’est fait lorsque je suis arrivé en France. Je me suis présenté dans une salle de sport. Je n’avais pas encore connaissance du Mma. J’ai demandé à rencontrer le coach, il était malheureusement absent. On m’a présenté son assistant. Je lui ai expliqué que j’étais arrivé la veille, je n’avais pas de famille, encore moins des sous. Je dormais dans la rue. Mais que pour moi, ce n’était pas un problème. La seule chose que je voulais, était une autorisation pour m’entraîner, parce que je devais être champion du monde. Il était un peu surpris. Mais, il m’a néanmoins accordé du crédit, juste pour mon physique. Par la suite, j’ai rencontré le coach et j’ai commencé à m’entraîner dans cette salle. Au bout de quelques séances, j’ai découvert le Mma. Je n’étais pas intéressé au départ. Mais après plusieurs explications, l’insistance des entraîneurs, j’ai fini par le pratiquer.

Aujourd’hui, vous faites la fierté du Cameroun. Quel a été l’apport du gouvernement dans votre carrière ?
Je suis sorti du Cameroun de façon peu orthodoxe. J’ai également commencé ce sport de façon peu orthodoxe. Tout comme la population camerounaise, le gouvernement camerounais vient de me découvrir, peut-être à travers les écrans et le drapeau (vert-rouge-jaune) que je porte à l’extérieur. Donc, c’est à l’avenir qu’on verra, puisqu’ils (les membres du gouvernement, ndlr) ont promis d’être dorénavant impliqués, de me soutenir pour la suite.

Quels sont vos projets au Cameroun ?
J’ai créé une association dénommée : « Seca », qui signifie : Sport education and caritavive association. C’est une association qui a pour but de permettre le développement du sport dans les zones rurales et de permettre également aux jeunes défavorisés de pratiquer des activités sportives.

Quel(s) conseil(s) prodiguez-vous aux jeunes qui aimeraient vous emboîter le pas ?
Je dirais à tous ceux qui veulent faire comme moi, ou mieux, que le mot « impossible » ne doit pas exister dans leur vocabulaire. C’est juste une excuse que certaines personnes avancent lorsqu’elles sont face à un obstacle. C’est certes difficile, mais la route qui mène vers le trésor est la plus minée. Plus c’est difficile, mieux la récompense sera grande.

Renaud Inang

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