Cameroun – Phénomène – Milieux universitaires: Les étudiants aux abonnés «alcool»

Nos milieux universitaires sont de plus en plus envahis par des débits de boisson. Devant des autorités s’en émeuvent peu ou prou, mais semblent embarrassées par l’ampleur du phénomène.[pagebreak]«Foyer du Combattant», « Restaurant la Côtière », « Terrasse la Flèche », … ce sont autant de bistrots qui pullulent autour de l’Université de Yaoundé I, et à l’entrée de la cité universitaire (généralement appelée Cité U). Des débits de boisson qui, de fil en aiguille, naissent comme des champignons. Nombre de consommateurs rencontrés dans ces endroits se recrutent parmi les étudiants (es). Paradoxal, quand on attend d’eux qu’ils mettent à contribution leur génie pour l’avancement de la science, au lieu de se reconvertir en disciples de Bacchus. Une incursion dans cet univers mercredi 23 avril dernier, a permis de se faire une idée du gouffre dans lequel s’enfoncent nos jeunes étudiants. Il est fréquent de les voir déserter les cours, pour se retrouver dans ces bars, « afin de noyer les soucis de la vie », profèrent-ils. « Il n’y a pas de meilleur endroit qu’ici (Terrasse la Flèche, Ndlr) pour tuer le temps, et se retrouver avec les potes autour d’une bière. Ça fait pratiquement quatre ans que je présente sans succès les concours de l’Iric, l’Enam et de l’Injs ; au point de me demander à quoi bon faire de longues études au Cameroun », s’indigne Ghislain Kanmi, étudiant en master de droit.

« J’ai été admise au rattrapage (du premier semestre, ndlr), au point où je me demande si je vais obtenir le quota requis pour le niveau 3 », se résigne sa camarade Ronelle Emadac, étudiante de deuxième année biologie animale en faculté des Sciences. Ce ne sont pas en tout cas les raisons qui manquent pour justifier cette consommation régulière, lorsqu’il est question de « lever le coude » (expression consacrée au Cameroun pour désigner la consommation d’alcool). Certains s’y sont lancés par aventure. Et, l’habitude étant une seconde nature, ils ont aujourd’hui du mal à s’en défaire. « Au début, j’ai voulu juste faire le show devant mes amis ; mais avec le temps, je m’y suis habitué au point où il m’est difficile de passer une semaine sans consommer au moins 4 bières », confesse un étudiant de l’Ecole Polytechnique.

Non sans aborder des conversations aux confins de la morale. Normal !
Puisqu’emportés par l’effet de la boisson. « Je me dope pour affronter ma meuf ce soir, surtout que nous avons eu quelques problèmes lors de notre dernier rencard », peut-on les entendre dire. Fait plus surprenant encore. Même les étudiants de l’Institut national de la jeunesse et des sports (Injs) ne dérogent pas à la règle. Assiégeant la « Boulangerie Le Best » ou Le maquis du couloir », situés à un jet de pierre de leur établissement. Malheureusement, pas pour s’offrir un hamburger ou un pot de yaourt. C’est la bière qui coule à flots dans le secteur. Même le fait que le prix des boissons soit supérieur à ceux homologués par le ministère du Commerce, soit 500francs en moyenne, ne les décourage pas pour autant. Lorsque nous les approchons, c’est la même rengaine. « La bière c’est combien ici ? 700, 800, 1000francs. La bière c’est combien ici, vous avez peur ? Augmentez le prix, on va toujours boire. » En référence à l’artiste Malox Viber.

Laxisme des responsables universitaires en cause
Même l’enceinte du campus n’est pas épargné par ce phénomène hollywoodien. Un détour au secteur des « stands champignons », qui jouxtent la faculté des lettres et sciences humaines (Falsh), indigne le passant. Les tables sont pleines de bouteilles de bière soit vides, soit entamées. Sans que les tenanciers des bars incriminés ne soient inquiétés. Ces débits de boisson s’installent au mépris des instructions du recteur, le Pr Maurice Aurélien Sosso, dont les collaborateurs déclarent avoir demandé aux éléments de Campus police de les traquer jusqu’à leurs derniers retranchements. Les détenteurs de ces débits s’en défendent. « Nous ne pouvons pas nous installer de notre propre gré, sans l’aval des autorités. Et, à partir du moment où nous payons nos taxes, où est le problème ? », laisse entendre Emile, barman. Des soupçons de complicité de ces derniers avec Campus police sont évoqués.

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