Cameroun: Ferdinand Ngoh Ngoh, un stratège au bras long

Ferdinang Ngo Ngo et le président Paul BIYA

Très controversé, le Secrétaire général de la présidence est devenu l’une des pièces maîtresses du système, au point de ne craindre rien ni personne.

À Yaoundé, nombreux étaient ceux qui spéculaient sur la disgrâce prochaine du Secrétaire général de la présidence de la République (Sgpr), Ferdinand Ngoh Ngoh, qui a joué un rôle important dans les chantiers (foireux) de la Coupe d’Afrique des nations 2019. Il ne s’est pas publiquement justifié, mais son entourage assure que, au moment où la présidence a repris en main la direction des chantiers, les retards étaient déjà impossibles à rattraper.Moqué, méprisé, craint, envié ou admiré, Ferdinand Ngoh Ngoh est de facto devenu, neuf ans après avoir pris les commandes du secrétariat général de la présidence, une pièce maîtresse du pouvoir de Yaoundé. Agé de 60 ans, il est d’abord un diplomate de formation et de carrière. Si ses prédécesseurs composaient avec la pluralité d’opinions et les antagonismes au sein du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), le parti au pouvoir, lui n’accepte aucune contestation. Au besoin, il sait montrer les crocs pour se faire entendre. Il a écarté des caciques et autres vieux cadors du régime, placé ses hommes dans toutes les administrations, avant de s’entourer d’une nouvelle nomenklatura d’hommes d’affaires milliardaires.

Louis Georges Njipendi, le directeur général de Camair-Co, est l’un de ses filleul, tout comme Victor MbemiNyaknga (Société nationale de transport d’électricité), Bertrand Pierre SoumbouAngoula (École nationale d’administration et de magistrature), Antoine Félix Samba (inspecteur général des services administratifs et budgétaires), Joseph Ngoh (Agence de régulation des marchés publics) ou encore Jean-Paul SimoNjonou, ex-conseiller économique à la présidence (Société nationale de raffinage). Au secrétariat d’État à la Défense (Sed), Galax Landry Etoga, est l’un de ses anciens collaborateurs au ministère des Relations extérieures (dont il a été le secrétaire général d’août 2010 à décembre 2011). Son réseau de connexions dans la sphère du pouvoir, avec le haut commandement militaire et la communauté du renseignement, ainsi qu’au sein du milieu des affaires confère un poids certain au natif de Nanga-Eboko. Même le directeur de cabinet civil de la présidence, Samuel MvondoAyolo, en prend pour son grade. Il ne se passe pas un mois sans qu’il soit éreinté par le Sgpr, tant et si bien que les Camerounais les comparent à ces belles-filles qui se disputent les faveurs de leur belle-mère.

Parcours teinté d’opportunisme

De cadre au ministère des Relations extérieure avant d’être détaché au Cabinet civil de la présidence de la République du Cameroun de 1997 à 1998, en passant par la Mission permanente du Cameroun auprès des Nations Unies de 2002 à 2006, puis Secrétaire général du Minrex, le parcours de Ferdinand Ngoh Ngoh est un exemple d’opportunisme politique. « Il est d’une grande intelligence opérationnelle », dit de lui un ministre qui a fait les frais de la purge gouvernementale. La désignation de Ngoh Ngoh comme Sgpr en 2011 était le souhait du président, car elle obéissait à une stratégie bien définie, décode cet ancien patron du portefeuille des Travaux publics. Cette stratégie consiste surtout à rajeunir l’entourage du chef de l’Etat afin de rendre plus dynamique les services de la présidence. Surtout, le grognard sert de porte-flingue et accuse certains caciques du pouvoir de comploter contre le chef de l’État et de fabriquer des dossiers pour salir ses proches.

Ngoh Ngoh exécute parfaitement la feuille de route, tant et si bien que certains pensent que sa mission est aujourd’hui terminée puisque plusieurs pontes ont été neutralisés. Et, pour l’instant, il a l’avantage. En tant que secrétaire général de la présidence, il dispose d’une délégation de signature du chef de l’État, ce qui lui permet d’agir sur « hautes instructions ». Sommes-nous en fin de mission pour celui qu’on surnomme le « vice-dieu » ? Lui, ne l’entend pas de cette oreille. « Il est devenu aussi incontournable qu’incontrôlable. À l’exception de Paul Biya, personne n’est en mesure de lui faire face », avertit un ponte du Rdpc.

Ahmed MBALA

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