Acteurs du dialogue inclusif: Mancho Bibixy, Le journaliste anglophone qui défie l’Etat

Arrêté en janvier 2017 après une manifestation pour le respect des droits des anglophones, Mancho Bibixy a été condamné à 12 ans de prison pour « actes terroristes ».

La trentaine, le leader anglophone emprisonné, apparaît affaibli lorsque nous le voyons pour la dernière fois dans la cours du tribunal militaire de Yaoundé, mais déterminé comme toujours à mener le combat jusqu’au bout. Ce jour-là, juste avant de monter dans le fourgon qui le ramène à la prison centrale de Kondengui, Mancho Bibixy s’écrie : « Southern Cameroon will win ! », « le Sud-Cameroun vaincra ! ».

C’est lui qui lança d’abord l’idée de la fédération, puis celle de l’indépendance du Cameroun anglophone après la répression sauvage des marches des avocats et enseignants anglophones par les forces de l’ordre. Ainsi, nous pensons qu’il devrait être autour de la table de négociation avec le gouvernement parce qu’il a probablement contribué à renforcer la position sécessionniste.

Aussi, depuis le déclenchement de la crise anglophone, le jeune « révolutionnaire » défie le gouvernement en faisant référence à la création d’Ambazonia, cette République imaginaire dans laquelle les contestataires du Nord-Ouest et Sud-Ouest, les deux régions anglophones qui représentent 20 % de la population du Cameroun, rêvent d’être mieux traités. Plus d’affectations de magistrats, d’enseignants, de médecins ne maîtrisant pas la langue de Shakespeare dans les palais de justice, les écoles, les universités et les hôpitaux anglophones… Et surtout, un gouvernement 100 % anglophone qui saura résoudre leurs problèmes.

Même étant en prison, « BBC » avait débuté une grève de la faim, pour « protester » contre leur emprisonnement sans « fondement » et la « maltraitance de ses frères et sœurs ». Durant une semaine, des amis, avocats, membres de sa famille, hommes d’église et politiques ont défilé à la prison pour le supplier de mettre fin à cette grève de la faim. Il l’a finalement interrompue huit jours plus tard, lors d’une énième visite de son avocat qui l’a convaincu que « sa mort ne résoudra pas le problème ».

Avant de devenir ce leader « déterminé », « courageux », « révolutionnaire », comme le décrivent ses collègues et confrères, Mancho Bibixy était l’un des animateurs vedettes d’Abakwa FM, une radio installée à Bamenda, fief du Social Democratic Front (SDF), principal parti d’opposition, et épicentre de la contestation anglophone. Du lundi au vendredi, il coanimait deux émissions : « Business Center » et « Comedy Show ».

Ce dernier programme était le plus prisé par ses nombreux auditeurs. Durant une heure, il passait en revue l’actualité sous l’angle humoristique. Le tout en pidgin, une langue véhiculaire au Cameroun. Au plus fort de la crise, Mancho s’était exprimé face à cette foule, assis dans un cercueil, « prêt à mourir » pour que les anglophones « vivent bien ».

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *