Lutte contre la faim: 795 millions d’affamés dans le monde

Selon le rapport annuel des Nations Unies sur « l’État de l’insécurité alimentaire dans le monde 2015 (SOFI) », l’Afrique subsaharienne est la région qui accuse la prévalence la plus élevée de sous-alimentation dans le monde avec 23.2 %, soit près d’une personne sur 4.
Le combat contre la faim est loin d’être gagné. C’est le triste constat que laisse entrevoir le rapport que les Nations Unis ont publié le 27 mai 2015. En 2000, les dirigeants mondiaux réunis à l’Assemblée générale des Nations Unies ont adopté la Déclaration du Millénaire. Huit (08) objectifs du Millénaire pour le développement (Omd) ont été énoncés. Le premier d’entre eux, était de réduire de moitié les taux de l’extrême pauvreté et de la faim. Six mois avant la date buttoir des Omd, la famine fait encore des ravages dans le monde. Le nombre de personnes victimes de la faim dans le monde s’établit à 795 millions, ce qui équivaut à 1 personne sur 9, d’après le rapport. L’Afrique subsaharienne est la région qui accuse la prévalence la plus élevée de sous-alimentation dans le monde.
Sofi 2015 rapporte qu’en Afrique subsaharienne, un peu moins d’une personne sur quatre, soit 23,2 % de la population, devrait être sous-alimentée entre 2014 et 2016. La région compte environ 220 millions de personnes souffrant de la faim dans cette période. En fait, le nombre de personnes sous-alimentées a même augmenté de 44 millions entre 1990-1992 et 2014-2016, malgré la baisse de la prévalence de la sous-alimentation dans la région. Si la prévalence de la sous-alimentation a fléchi assez rapidement entre 2000-2002 et 2005-2007, ce rythme a ralenti au cours des années suivantes en raison de certains facteurs tels que la hausse des prix des denrées alimentaires, la sécheresse et l’instabilité politique dans plusieurs pays constate le rapport. Dans la sous-région d’Afrique centrale par exemple, le nombre de personnes sous-alimentées a doublé entre 1990-1992 et 2014-2016, alors que la prévalence de la sous-alimentation a diminué de 23,4 %.
L’Afrique de l’Est reste la sous-région qui, avec 124 millions de personnes sous-alimentées, connaît le problème de la faim le plus grave. Comme en Afrique centrale, la région continue de connaître une croissance rapide de la population. La proportion de personnes sous-alimentées a chuté de 33,2 % tandis que le nombre de personnes souffrant de la faim a augmenté de près de 20 % au cours de la période de suivi des Omd. La situation est plus favorable en Afrique australe, où la prévalence de la sous-alimentation a reculé de 28 % depuis 1990-1992, et où un peu plus de 3 millions de personnes restent sous-alimentées. D’après Sofi 2015, la sous-région qui a le mieux réussi à réduire la faim est l’Afrique de l’Ouest, où le nombre de personnes sous-alimentées a diminué de 24,5 % depuis 1990-1992, tandis que la prévalence de la sous-alimentation devrait être inférieure à 10 % en 2014-2016.
Au total, 18 pays d’Afrique subsaharienne ont atteint le premier objectif des Omd à savoir réduire la pauvreté de moitié, et quatre autres sont près de l’atteindre (ils sont censés y parvenir avant 2020 si la tendance actuelle persiste). Le Cameroun figure dans la liste des pays ayant atteint ce premier objectif. «Certes, cette évolution est satisfaisante, mais les progrès ont été réalisés à partir de niveaux de sous-alimentation qui étaient très élevés, et nombre de ces pays enregistrent encore des taux de malnutrition très importants. Les pays les plus peuplés qui ont atteint la cible 1c des Omd concernant la faim sont notamment l’Angola, le Cameroun, l’Éthiopie, le Ghana, le Malawi, le Mozambique, le Nigéria et le Togo. En outre, beaucoup de petits pays, notamment le Bénin, la Gambie, Maurice et le Niger, l’ont également atteint. D’autres, dont le Tchad, le Rwanda et la Sierra Leone, sont proches d’atteindre cette cible, même si le taux de sous-alimentation dans ces pays reste très élevé, en termes relatifs et absolus », indique le rapport. Sofi 2015 note cependant que la plupart des pays d’Afrique subsaharienne ne progressent pas par rapport aux objectifs internationaux, et que de nombreux pays, dont la République centrafricaine et la Zambie, sont toujours confrontés à des niveaux élevés de prévalence de la sous-alimentation.
Des éléments concrets suggèrent que les gains de productivité agricole ont aidé les pays à réduire la sous-alimentation. Sur la période allant de 1990-1992 à 2012-2014, la valeur ajoutée agricole moyenne par travailleur a augmenté de 42 %. Les experts conseils à cette occasion les Etats à mettre l’accent sur les politiques agricoles. «Pour assurer la sécurité alimentaire, il faut des politiques publiques qui reconnaissent la diversité et la complexité des défis auxquels sont confrontées les exploitations familiales, et ce tout au long de la chaîne de valeur. Une productivité améliorée des ressources agricoles qui mise sur une intensification durable est déterminante pour accroître les disponibilités alimentaires et améliorer la sécurité alimentaire des ménages et leur nutrition », indique Sofi 2015.

Protection sociale
Environ 150 millions de personnes à travers le monde échappent au piège de la pauvreté extrême grâce à la protection sociale, selon le Sofi 2015, mais plus des deux tiers des pauvres de la planète n’ont toujours pas accès à une forme régulière et prévisible de soutien social. «La protection sociale a contribué directement à la réduction de la faim pendant la période de suivi des Omd. Depuis la fin des années 90, les transferts monétaires et autres programmes d’assistance sociale se sont multipliés dans le monde, une tendance déterminée en partie par les crises financières qui ont sévi à l’époque dans les économies de marché émergentes. D’après de récentes études, 150 millions de personnes à travers le monde échappent au piège de l’extrême pauvreté grâce à la protection sociale. Toutefois, l’impact des programmes d’assistance sociale tels que les transferts d’espèces favorisant le bien-être va au-delà des effets directs découlant de ces transferts », mentionne le rapport. Au Cameroun, le taux de couverture sociale est de 11% selon les statistiques communiquées par la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps). Encore des améliorations attendues dans ce sens.

Tendances mondiale
Sur la base des dernières données, on estime que 795 millions de personnes sont sous-alimentées à l’échelon mondial, soit 167 millions de personnes de moins au cours des dix dernières années, et 216 millions de moins qu’en 1990-1992. Cela veut dire qu’actuellement, dans le monde, un peu plus d’une personne sur neuf n’est pas en mesure de se nourrir suffisamment pour pouvoir mener une vie saine et active. Environ 780 millions de ces personnes, soit la grande majorité des personnes sous-alimentées, vivent dans les régions en développement. Dans ces régions, la prévalence de la sous-alimentation a reculé de 44,4 % depuis 1990-1992, et la proportion de personnes sous-alimentées par rapport à la population totale est désormais de 12,9 %.
De grands écarts persistent entre les régions. Certaines ont enregistré des progrès rapides en matière de réduction de la faim: l’Amérique latine ainsi que l’Asie de l’Est et du Sud-Est ont atteint à la fois la cible 1c des Omd et celle plus ambitieuse du Sma. L’Asie centrale, le Caucase, ainsi que l’Afrique du Nord et de l’Ouest y sont également parvenus. L’Asie du Sud, les Caraïbes, l’Océanie, ainsi que l’Afrique australe et l’Afrique de l’Est ont aussi enregistré des progrès. Enfin, l’Afrique centrale et l’Asie de l’Ouest s’éloignent des objectifs de réduction de la faim, ces régions enregistrant aujourd’hui au sein de leur population une plus grande proportion de personnes sous-alimentées par rapport à 1990-1992.
«Les progrès accomplis vers la pleine réalisation des objectifs de sécurité alimentaire 2015 ont été entravés ces dernières années par un contexte économique mondial difficile. Phénomènes météorologiques extrêmes, catastrophes naturelles, instabilité politique et troubles intérieurs sont autant de facteurs responsables de cette situation. Vingt-quatre pays d’Afrique sont actuellement confrontés à des crises alimentaires, soit le double par rapport à 1990; une personne affamée sur 5 environ vit dans des conditions de crise caractérisées par une faible gouvernance et une vulnérabilité aiguë à la mort et à la maladie» déplore le rapport. Sofi 2015 fait remarquer qu’en 2012, cette situation concernait quelque 366 millions de personnes, dont 129 millions étaient sous-alimentés, soit 19% de toutes les victimes d’insécurité alimentaire de la planète. Pourtant, parallèlement, 1,9 milliard d’habitants sont venus gonfler les rangs de la population mondiale depuis 1990, ce qui rend d’autant plus impressionnantes les réductions du nombre de personnes victimes de la faim, souligne le rapport. Depuis les années 1990-1992, le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde a diminué de 216 millions, soit une réduction de 21,4 %.
José Graziano da Silva, Directeur général de la Fao rêve d’une génération «Faim zéro ». «La quasi-réalisation des cibles de l’Omd relatives à la faim nous montre que nous sommes tout à fait en mesure d’éliminer la faim de notre vivant. Nous devons être la génération Faim Zéro. Ce but devrait être incorporé dans toutes les interventions de politique et au cœur même du nouvel agenda de développement durable qui sera mis en place cette année », projette-t-elle. Pour parvenir à l’éradication de la faim et offrir des emplois décents, Kanayo Nwanze pense qu’’il est indispensable d’investir dans l’agriculture. « Si nous aspirons réellement à créer un monde exempt de pauvreté et de faim, notre priorité doit être d’investir dans les zones rurales des pays en développement où vivent la plupart des populations les plus pauvres et les plus affamées de la planète. Il nous faut œuvrer pour générer une transformation au sein de nos communautés rurales afin qu’elles offrent des emplois décents, des conditions de vie décentes et des opportunités décentes. Nous devons investir dans les zones rurales pour la croissance équilibrée de nos nations de sorte que les trois milliards d’habitants peuplant ces zones puissent réaliser leur potentiel », a-t-il souligné.

Benjamin Ombé

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