Cameroun – Abakar Ahamat: « Les parents sont plus que jamais en danger »

Abakar Ahamat ancien gouverneur

L’ancien gouverneur, auteur de plusieurs ouvrages pense que, avec les mouvements des jeunes scolaires dans les établissements scolaires, le strict respect des mesures barrières applicables aux parents d’élèves ne sert plus à rien.

Comprenez-vous les craintes de la population Scolaire face à la décision du gouvernement de renvoyer les enfants à l’école ?

Oui, compréhensible sans aucun doute. La logique gouvernementale est totalement déroutante et incompatible. Lorsqu’on était à moins de 200 cas, toutes les écoles furent fermées. Au moment où on a dépassé 5500 cas avec des prévisions plus sombres pour les jours à venir, on rouvre les écoles. Les parents et les enseignants ont raison d’être sceptiques sur la sincérité et la bonne foi des gouvernants.

Comment appréciez-vous ce manque de cohérence?

Non seulement le gouvernement est sourd aux revendications et désidératas des populations, mais les décideurs donnent la preuve que seuls leurs intérêts comptent. Ils donnent la preuve qu’ils ignorent tous des tristes réalités de terrain, des vraies préoccupations des populations. Tout se passe comme si les enseignants, seuls joueurs de champ, n’ont aucun avis à émettre. Les décideurs donnent la preuve qu’ils prennent les autres pour des machines, des mécanismes et non des humains.

Les mouvements des élèves des établissements scolaires pour les domiciles peuvent-elles créer un danger dans les familles?

Évidemment, le risque est là ! Il est grand et plus que jamais dévastateur. Ces enfants vont être et servir de véhicules sûrs et infaillibles de transmission de grande échelle. Les parents sont plus que jamais en danger. Aussi, leur confinement, leur stricte observation des mesures barrières ne serviront à rien. C’est dommage !

Comment entrevoyez-vous la situation dans les zones reculées et rurales ?

Les contaminations massives seront au rendez-vous. Les décideurs donnent encore la preuve de leur mimétisme quelque peu idiot est contreproductif.On ne peut pas gérer cette pandémie comme on le fait sans se faire accuser d’incompétence ou du moins d’irrationnels.Toutes les localités de la République n’ont pas les mêmes problèmes. Si dans les grandes villes, à cause des contraintes de toutes sortes, on peut soulager les populations en leur offrant des seaux avec robinet ou non, des morceaux de savon, des masques faciaux dans l’espoir de contribuer à la lutte préventive contre cette pandémie, dans l’arrière pays, ce ne sont pas ces matériels qui sont importants pour cette lutte. L’eau manque affreusement et atrocement aux populations. Pas nécessairement l’eau potable, mais l’eau tout court. L’eau pour boire et cuire les aliments. Pas l’eau pour se laver, pour la lessive, pour la vaisselle, mais juste pour se désaltérer…Comment peut-on croire qu’avec le savon et le seau ces gens pourraient se laver les mains sans eau ? C’est complètement dingue !Dans l’arrière-pays on attend non pas seulement des seaux et du savon, mais on attend del’eau.

Faut-il redouter une rentrée des classes à double vitesse du fait d’un manque d’adéquation entre l’école de la ville et la rentrée des classes dans les établissements de campagne?

Le pays ne se résume pas aux capitales régionales et départementales. Renvoyer les enfants à l’école dans la situation actuelle, c’est mettre sciemment en danger la vie de leurs parents et de leurs enseignants ; ce qui n’est pas acceptable. C’est inadmissible.

Réalisé par Souley ONOHIOLO

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