Fête nationale du Cameroun 2018 – Emmanuel Macron : 160.000 réfugiés camerounais passé sous silence !

Macron et Biya le sage

À l’occasion de la célébration de la fête nationale du Cameroun, le 20 mai 2018, le président français, Emmanuel Macron, a adressé au président camerounais, Paul Biya, un message de solidarité de l’État français envers l’État du Cameroun.
Deux extraits de ce message ont créé un véritable choc dans l’opinion, le premier en relation avec la guerre civile en cours dans les deux provinces anglophones du Cameroun, le second au sujet de la crise des réfugiés que cette guerre a entrainée.
Au sujet du premier extrait, le président français écrit : «…Je souhaite également vous dire la solidarité de la France face aux crimes commis contre, notamment, des représentants de l’État, dans le contexte de tensions que connaissent les régions anglophones du Cameroun. »
L’État français défend donc unilatéralement l’État camerounais, et tait les violations des droits de l’homme par l’État du Cameroun à l’encontre de la population anglophone. Pourtant, le président français sait que les Anglophones ont toujours été non violents, depuis la marche pacifique des juristes, des enseignants et des étudiants en 2016, depuis les différentes autres marches qui ont suivi dans les villes et les campagnes en 2017, et que, lors de ces marches pacifiques, ils ont subi, de la part des agents de l’État, toutes sortes de violences qui les ont poussés à l’autodéfense. En taisant cette violence étatique sur les populations, et en n’éprouvant de la sympathie que pour les agents de l’État, Emmanuel Macron montre qu’on est vraiment là en contexte néocolonial, et que la France souffre de ce que les structures de l’État néocolonial, qu’elle a installées au Cameroun, soient remises en cause par la révolte anglophone.
Ceci permet de voir le type de soutien extérieur dont jouit Paul Biya dans la guerre au Nord-ouest et au Sud-ouest, et pourquoi il refuse d’y mettre fin, malgré les nombreux et multiples appels au dialogue. La relation entre la France et le Cameroun n’est donc amicale qu’au niveau du pouvoir politique. À l’échelle des gouvernés, l’État français et le peuple camerounais n’ont rien en commun, et ceci se manifeste encore plus dans le deuxième extrait de la correspondance de l’Élysée : « …Je veux aussi saluer le rôle stabilisateur que joue le Cameroun dans son environnement régional, en accueillant généreusement de nombreux réfugiés venus de pays voisins. »
Emmanuel Macron félicite ici Paul Biya pour son accueil généreux des réfugiés d’autres pays et tait le fait que la gestion de la guerre civile dans les régions anglophones par ce dernier a déjà fait 160.000 (cent soixante mille!) réfugiés camerounais répartis dans les pays voisins. Et là, bien malin qui chercherait à comprendre. Seules, les questions rhétoriques peuvent faire ici fonction d’analyse: En évitant d’évoquer le cas des réfugiés camerounais, Emmanuel Macron les classe-t-il dans la catégorie de réfugiés d’un autre pays (l’Ambazonie par exemple) ? Sinon, imagine-t-il que Paul Biya soit tranquille du fait que 160.000 Camerounais se retrouvent à être des réfugiés dans les pays voisins? Si oui, pour Emmanuel Macron, Paul Biya serait-il plus un Français en mission au Cameroun qu’un Camerounais qui se doit de protéger son peuple? Si la France ne considère pas le Cameroun comme une province de son empire, mais plutôt comme un véritable ami, alors toutes ces questions se résument en un dénominateur commun de morale universelle qui s’énonce comme suit : Est-il logique de féliciter un ami pour son hospitalité à l’égard des autres, lorsque cet ami encensé n’a pas créé, chez soi-même, des conditions et des structures d’accueil pour les réfugiés de son propre peuple?
Au regard de ces questionnements, deux options s’offraient au président français :
Ne pas évoquer l’hospitalité du Cameroun vis-à-vis des réfugiés des pays voisins, puisque l’État camerounais a lui-même fait de sa propre population des réfugiés dans d’autres pays.
Évoquer l’hospitalité du Cameroun vis-à-vis des réfugiés des pays voisins et formuler le vœu pour le retour des réfugiés Camerounais.
Par l’option 1, l’État français aurait montré sa neutralité et aurait évité de conforter le peuple camerounais en général, et les Anglophones en particulier, à l’idée que la France est à l’origine de leurs malheurs.
Par l’option 2, l’évocation des réfugiés camerounais aurait été perçue comme le message de sympathie de la France, non seulement à l’État camerounais, mais aussi au peuple de ce pays, en même temps qu’il aurait traduit son attachement aux droits de l’homme et des libertés.

Maurice NGUEPÉ
Le 19 mai 2018

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