Obala : La leçon de'champs de l'Institut agricole

L??arrondissement du département de la Lékié abrite l??unique établissement d??enseignement secondaire agricole du pays,véritable pépinière de l??élite rurale de demain. La tenue, chemisette blanche à carreaux bleus et pantalon assorti, ressemble beaucoup à celle du lycée d??Obala voisin. Le marquage de certaines salles de classe, où on peut lire des « 6e A » par exemple, aussi. Tout au plus, notera-t-on comme singularité, la pause lascive que prend un groupuscule d??élèves au milieu de la grande cour, alors qu??il est déjà un peu plus de 13h. Ou encore cette bande de jeunes filles, occupées à mixer différents ingrédients dans une marmite léchée par

les flammes adoucies d??un feu de bois à l??ancienne. Un trouble-fête se glisse de temps à autre au milieu des filles, pour tenter de distraire leur attention avec quelques vannes. Yves Enonguene Ewane est élève en première, option Production animale, à la différence de ses camarades du s*e*xe opposé, qui sont de la filière Transformation des produits agricoles. Pensionnaire de l??Institut agricole d??Obala depuis trois ans maintenant, après son C.A.P en comptabilité, le jeune homme pense avoir trouvé le domaine qui lui convient. En dehors de ses heures de cours, il a déjà une petite ferme composée de poulets et de porcs qui, en plus de lui permettre d??avoir quelques revenus, lui sert de champ d??application pratique des leçons qu??il reçoit à l??Institut. Après son baccalauréat agricole, il envisage en 2011 de poursuivre des études d??ingénierie et rêve d??être un grand exploitant fermier demain.Comme lui, ils sont ainsi près d??une centaine, sur les quelque 350 élèves que compte l??IAO, à avoir choisi le créneau de l??enseignement technique agricole, à travers les trois options que sont la Production animale, la Production végétale, et la Transformation des produits agricoles. Leur quotidien d??apprenant n??est pas si différent de celui de leurs camarades de l??enseignement général. Une salle de classe avec tables-bancs et tableaux où ils reçoivent des cours de français, de mathématiques ou d??histoire, se font examiner régulièrement, bouquinent. Mais en plus de ces tâches classiques, leur emploi du temps consigne des exercices d??application dont les « terrains » sont une porcherie, un poulailler, une provenderie, ou encore le grand verger qui s??étend sur le terrain vague attenant.Fermiers en herbeSur les trois hectares qui constituent sa superficie actuelle, l??Institut agricole d??Obala s??est doté des infrastructures et équipements nécessaires aux travaux pédagogiques spécifiques qu??il développe. Sous la conduite de Bertrand Benoît Messanga, le chef d??atelier, l??équipe de CT procède à la visite guidée de ces installations. La porcherie, ses deux reproducteurs et ses porcelets, la couveuse où sont « élevés » à température ambiante ??ufs de cailles, de poulets de chair ou de dindons, les ateliers de basse-cour où ces différentes espèces de volailles appuient les travaux école avant d??être éventuellement commercialisées, le grand magasin où sont parqués le tracteur et le semoir, la provenderie où le maïs est transformé sur place, etc. Une variété qu??on retrouve également dans l??espace agricole du complexe. La saison sèche a durci la terre et les feuilles de certains plants jaunissent déjà sous les morsures du soleil. Le chef d??atelier regrette qu??il n??y ait pas de rivière à proximité pour drainer l??eau. D??autant que le puits aménagé à proximité, commence lui aussi, à tarir. Certes, le grand château que l??Institut a aménagé dans son enceinte, permet de pallier ces manques. Mais cela impose un arrosage manuel, souvent pénible. Toujours est-il que pour les exercices pratiques de l??école, entre les palmiers, les arbres fruitiers où les feuilles vertes (marrane, corète, etc.), il y a de quoi montrer, et de quoi voir.Du haut du perron du bâtiment qui abrite ses bureaux, Louis Ndjie, le fondateur et directeur général de l??établissement, se tient de temps en temps debout pour contempler l??ensemble de l??ouvrage, non sans une certaine satisfaction. Ce projet, né de sa thèse de soutenance d??ingénieur agronome à Angers, n??était encore en 2003 qu??un vaste terrain vague en friches. Grâce aux financements du canton du Jura Suisse, à l??appui des élites de la Lékié et des pouvoirs publics dont il a su progressivement gagner la confiance, l??IAO a pu voir le jour, et a déjà livré quatre cuvées de baccalauréats agricoles. Au lendemain de la 44e édition de la fête de la jeunesse, le discours fédérateur du chef de l??Etat a balayé bien des états d??âme pour beaucoup de ces élèves. Une des jeunes pensionnaires de la filière transformation des produits, reconnaît que l??étiquette d?? « élève des champs » n??est pas toujours facile à porter, surtout pour ceux qui jugent ce domaine d??activités sous le prisme des clichés. « Les gens vont progressivement comprendre que même dans le domaine agricole, il faut être bien formé. Travailler dans les champs n??est pas une honte, ni le sort réservé à ceux qui n??ont pas pu faire de bonnes études. Nous espérons juste que le gouvernement mettra tout en ??uvre pour que le secteur offre suffisamment de possibilités », lance la jeune fille. Depuis Obala en tout cas, la pépinière de cette génération appelée à devenir le principal acteur d??un secteur moteur de l??économie, couve bien ses graines.Eric ELOUGA, CT

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