Cameroun – Dorothy Achu Fosah : « Le premier vaccin est déjà en cours d’utilisation »

Dorothy Achu Fosah

Le médecin et secrétaire permanent du Programme national de lutte contre le paludisme affirme que le Cameroun pourrait bénéficier du RTS, S.

Des chercheurs de l’université d’Oxford et des scientifiques du Burkina Faso viennent de mettre au point un vaccin, le R21/Matrix- M. Les premiers essais concluant ont été effectués sur 450 enfants de 5 à 17 ans. Aucun effet secondaire observé. Avez-vous connaissance de cela?

Oui, nous savons qu’il existe plusieurs candidats vaccins en cours de développement par les firmes pharmaceutiques. L’Organisation mondiale de la santé (Oms) a mis en place un Programme de mise en œuvre de la vaccination antipaludique (Mvip) pour assurer l’introduction effective des vaccins développés pour l’usage dans la santé publique. C’est ainsi que le vaccin RST, S/AS01 (RTS, S) a été recommandé et est en cours d’évaluation dans trois pays d’Afrique, le Ghana, le Kenya et le Malawi.
L’autre vaccin R21/Matrix-M est en cours, en phase 2 de développement, c’est-à-dire qu’il n’est pas encore prêt pour l’utilisation par la population. Mais, nous espérons que les études supplémentaires vont confirmer son efficacité et son innocuité pour qu’on dispose de plusieurs options de vaccination.

Ce vaccin arrivera-t-il au Cameroun ?

Peut-être pas encore le R21, mais plutôt le premier vaccin RTS, S qui est déjà en cours d’utilisation par les pays. A la fin de la période d’évaluation (2022), nous allons développer les directives sur l’introduction des vaccins antipaludiques.

Y-a-t-il une politique gouvernementale par rapport à la vaccination contre le paludisme ?

Pas encore. La politique sera élaborée quand nous serons prêts à introduire les vaccins et en fonction des résultats de l’évaluation qui est en cours.

Où en est-on avec les recherches au Cameroun pour éradiquer le paludisme ?

L’éradication du paludisme n’est pas chose facile. Nous avons fait une modélisation pour comprendre ce qu’il faut pour y arriver. Il ressort qu’elle nécessite plusieurs interventions notamment la lutte antivectorielle, la chimio-prévention, la prise en charge correcte des cas et une meilleure surveillance épidémiologique. Chacune de ces interventions est l’objet de plusieurs recherches qui permettent d’adopter les meilleurs outils pour la lutte tels que les moustiquaires de nouvelle génération pour faire face à la résistance des vecteurs aux insecticides, les moyens complémentaires de lutte anti-vectorielle ( pulvérisation
intra-domiciliaire et la lutte antilarvaire) ; des nouvelles interventions de chimio-prévention chez les femmes enceintes et jeunes enfants et des stratégies innovantes pour assurer la couverture de la population en services à travers la participation communautaire.

Selon vos statistiques, combien de ménages utilisent une moustiquaire ? La distribution est-elle effective sur toute l’étendue du territoire?

Selon l’enquête démographique et de santé 2018, 71% des ménages disposent au moins d’une moustiquaire imprégnée et 69% de ceux qui ont accès à une moustiquaire les utilisent. Ces indicateurs devraient s’améliorer après la troisième campagne nationale de distribution des Milda qui s’est achevée dans 08 régions. Seules les régions du Centre et du Sud-ouest n’ont pas organisé la campagne.

Pensez-vous que la politique de distribution des moustiquaires est encore efficace? Ne faut-il pas adopter ou employer d’autres méthodes?

Cette politique reste efficace tant que la population utilise effectivement les moustiquaires. C’est à cause de l’utilisation des moustiquaires imprégnées que les pays ont enregistré des baisses importantes du fardeau de plus de 30%. Il existe d’autres méthodes comme la pulvérisation intra-domiciliaire. Malheureusement, cette méthode coûte cinq fois plus cher et est difficile à réaliser dans toutes les régions du pays.

Les moustiques(Anophèles), vecteurs de la maladie, ont-ils doublé dans les quartiers? Pourquoi?

Les moustiques deviennent très résistants aux insecticides à cause de l’utilisation irrationnelle des pesticides de la même famille et la disponibilité d’un grand stock des moustiquaires imprégnées avec ces insecticides. Pour y faire face, des moustiquaires doublement imprégnées avec différents insecticides seront introduites progressivement dans les zones concernées par la résistance.

Comment pensez-vous éradiquer le paludisme qui sévit depuis?

Le processus d’éradication du paludisme est progressif. Nous avons stratifié le pays par niveau d’endémicité. Ceci nous permet de cibler les zones où l’élimination du paludisme est faisable. Ainsi, nous pouvons intensifier la mise en œuvre des interventions décrites plus haut.

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