Faux titres fonciers : Henri Eyebe Ayissi réussira-t-il à stopper la saignée ?

Henri Eyebe Ayissi

Moqué par le puissant lobby d’administrateurs, entretenant un système de gouvernance nocif qui génère une myriade de difficultés dans la chaine de production du document, la sortie du ministre des Domaines, du cadastre et des affaires foncières (Mindcaf) sonne comme une provocation.

Le sourire s’est éteint des visages. Plus rien à mettre sous la dent. Les barons de la mafia foncière sont amers. Derrière les lambris dorés des luxueux bureaux administratifs de Yaoundé, c’est le temps des lamentations. Le Think-tank mis en place en symbiose avec les relais locaux pour brader les terres se sent durement persécuté. De quoi en est-il exactement ? En effet, le ministre des Domaines, du cadastre et des affaires foncières (Mindcaf), a signé le 02 février dernier une lettre-circulaire interdisant la reconnaissance et l’admission, par les services relevant du Mindcaf, des documents intitulés « Attestation aux certificats d’abandon des droits coutumiers » délivrés par les chefs traditionnels et homologués par les autorités administratives compétentes. Place au décret no 76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre foncier modifié et complété par le décret no 205/481 du 16 décembre 2005.

Voilà donc l’étincelle qui vient activer le courroux des gouvernants qui voient en cette décision, une volonté manifeste de siphonner leur honorabilité. « Le ministre cours dans le sac. Il sait bien que le mal se trouve dans ses services corrompus qui délivrent plusieurs titres pour le même espace. Doit-on conclure que nous sommes enfin à la fin de règne de la corruption dans le domaine foncier? », S’offusque sous anonymat, un Mvog-Beti, chef de la communauté. A la vérité, le Cameroun est en plein dans ce qui s’apparente à une crise foncière. Nous le voyons, la décennie 2010-2020 s’est présentée comme un moment crucial pour le présent et le futur de la question des droits communautaires au Cameroun.

Des scénarios du futur du type « un pas en avant et deux pas en arrières » ne sont pas exclus. Une réflexion revigorée doit donc accompagner les effets rétrogrades globaux nationaux durant la suite de cette décennie. Pour les observateurs, il est temps pour la communauté de la connaissance et les spécialistes du plaidoyer de mobiliser les processus de réflexion adaptative et d’apprentissage-action, à travers les apports analytiques et stratégiques qualitatifs, mais mesurables. « Pour y parvenir, que le Minat retire d’abord tous ses hommes et laisse le champ du processus d’immatriculation aux vrais technocrates que nous sommes. Oui pour le toilettage, mais pourquoi avoir laissé prospérer pendant longtemps une telle pratique ? » Se désole un des délégués régionaux des Cadastres que nous avons joint par téléphone.

Contraintes juridiques

Comme le pensent les analystes, «le droit foncier obsolète hérité de l’administration coloniale est resté appliqué au Cameroun ». C’est pourquoi le décret du 21 juillet 1932 en vigueur hier et aujourd’hui se traduit globalement par des échecs politiques, sociaux et économiques cuisants. Tout en étant opposées juridiquement et idéologiquement, les ordonnances no 74-1 du 06 juillet 1974 fixant le régime foncier et celui fixant le régime domanial ont toujours cohabité. A bien regarder, ce sont les atermoiements politiques du gouvernement central qui rend la situation explosive. « La question du foncier n’est pas un long fleuve tranquille. Il faut y aller avec tact », conseille un administrateur civil principal. Une piste pour ainsi comprendre la non-signature à date, de la convention no 169 relative aux peuples indigènes et tribaux de 1989 par le Cameroun.

Axel ABANDA / 237online.com

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