Succession au sommet de l’État: Maurice Kamto choisit-il la guérilla de rue ?

En choisissant de ne pas participer aux élections législatives et municipales, le leader du Mrc se donne 14 ans d’inéligibilité à la présidentielle au Cameroun et de tuer littéralement tous les acteurs politiques qui voyaient à ce parti un appareil leur permettant d’accéder au pouvoir.

Si théoriquement, les raisons évoquées par Maurice Kamto pour la non-participation de son parti au législatives et aux municipales peuvent être justifiées : crise dans le Nord-Ouest et au Sud-ouest, non-révision du code électoral, tracasserie dans la confession des dossiers des candidats et non-libération de certains militants du Mrc encore incarcérés. « Le MRC a décidé de ne pas prendre part aux élections législatives et municipales du 9 février 2020. J’appelle les électeurs à rester chez eux et à ne pas aller voter », a déclaré l’opposant Maurice Kamto au cours d’une conférence de presse aux allures de meeting politique, tenue lundi dernier au siège de son parti à Yaoundé. L’opposant a également justifié la décision de son parti en dénonçant un code électoral « taillé sur mesure » pour la victoire du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti au pouvoir. Il affirme vouloir éviter une répétition de la crise post-électorale qui a crispé la sphère politique pendant plusieurs mois. « Le MRC a cru jusqu’au bout que le régime se ressaisirait et se souviendrait que le jeu démocratique doit être arrêté de façon consensuelle par tous les acteurs (…) Mais à ce rythme, les mêmes causes produiront les mêmes effets », a martelé le challenger du président Paul Biya, sous les applaudissements de ses militants.

Cependant ,l’attitude du Président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) présente de nombreuses incohérences qui indiquent que sa prise de position de lundi dernier est peut-être le premier round d’un combat qui ne fait que commencer. Et pour cause, il y a d’abord la volte-face du président Kamto qui en deux semaines seulement a rendu public par moins de trois communiqués .Le premier, officialisant la participation du Mrc au double scrutin du 09 février 2020 ; un deuxième créant la commission de sélection des candidatures chapotées par lui –même; et un troisième communiqué annonçant la non-participation du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc). Pour la grande partie des Camerounais, militants et sympathisants du Mrc, c’est une grosse déception et une grosse désillusion au moment même où le Mrc avait déjà acquis la place de leader de l’opposition capable de bousculer le Rdpc et obtenir l’alternance souhaitée par les Camerounais depuis plus d’une décennie.

Que s’est-donc t-il passé ? Qu’est ce qui peut expliquer le revirement spectaculaire ? Comment le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), dont tous les indicateurs montraient qu’il avait une carte à jouer lors du double scrutin du 9 février 2020, peut-il décider de boycotter le scrutin ? Pour les plus septiques, Maurice Kamto vient là de tuer définitivement le Mrc et d’enlever toute possibilité de candidature à la présidentielle au Cameroun pour les 14 prochaines années si le code électoral ne change pas entre-temps. Dans cette hypothèse, ce sera l’implosion du Mrc avec des défections en cascades pour ceux des militants qui se montreraient impatients. Bien plus, ce serait la mort politique de Kamto qui ne pourrait plus briquer un mandat électif au sein du Mrc au courant de cette même période. Il leur reste alors une seule porte de sortie : La rue et la guérilla.

Dans son propos d’annonce de la non-participation du Mrc aux législatives et aux municipales, Maurice Kamto indiquait déjà qu’il allait poursuivre la lutte pour le changement. Mais comment le faire sans élus si ce n’est pas la rue ? Une rue qu’il l’a déjà conduite en prison à travers les événements de Janvier 2019 où des manifestations au Cameroun et à l’étranger avec en prime l’apparition de la brigade anti-sardinard ont clairement montré la capacité du Mrc à représenter une menace dans la rue. Et dans cette hypothèse, beaucoup y voient l’installation d’un K.O avec la bénédiction de la communauté internationale et l’installation d’un gouvernement de transition qui remettrait les cartes à plats avec une nouvelle constitution, un nouveau code électoral et de nouvelles élections générales. Mais c’est un choix bien risqué pour Maurice Kamto et le Mrc.

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