Que retenir de la balance commerciale du Cameroun ?

Simon Bassilekin Ndomilep

L’économiste Simon Bassilekin Ndomilep fait une analyse de la balance commerciale au regard des données publiées par l’Institut national de la statistique au début du mois de septembre.

Pour commencer, en ce qui concerne le décalage qui va, en s’accentuant, entre, d’une part, nos exportations et, d’autre, part nos importations, il faut retenir que, d’une manière générale, notre pays, fait face à une grave crise sécuritaire, laquelle se prolonge plus que de raison. Il doit ainsi, en même temps, dans ses importations, inclure beaucoup de matériels et d’équipements de guerre dont nous n’avons pas encore la capacité de produire localement. Il s’agit, là, de dépenses préexistantes qui se sont, cependant gravement alourdies et qui justifient à suffisance, les chiffres que vous exposez avec raison. Ensuite, la survenue de Covid 19 a, plus que de raison, freiné fortement nos capacités des mises sur le marché, une partie considérable de ce que nous exportons habituellement. Le troisième et dernier facteur, c’est l’éternelle « détériorations des termes de l’échange » qui fait que ce que nous avons à offrir coûte, toujours et constamment, nettement moins cher que ce que nous achetons. Dans ces conditions-là, seuls ceux qui voudraient ne pas voir le monde tel qu’il est, pourraient s’étonner de notre insuffisance de performances en matière de Balance des Paiements.

Cependant, bien que la situation présente soit suffisamment alarmante, la structuration de notre Économie nationale, du fait de ses capacités diverses et multiples, lui confère cette résilience qu’ont souvent évoquées nos autorités et qui est loin d’être un vain mot.
Bien de projets en cours de relance ou de redynamisation (l’exploitation des mines de Fer, de Bauxite, d’or, etc.), la prochaine augmentation de notre capacité d’offre en production d’énergie électrique, le dynamisme bien reconnu par beaucoup, de nos compatriotes, loin d’être des mirages sont autant d’éléments qui peuvent pousser à une espérance raisonnable de nos capacités à inverser la situation qui, en l’état, doit être déplorée, précisément parce qu’elle est déplorable. Cette situation doit nous amener à réfléchir et travailler en ne perdant pas de vue que notre pays est l’une des principales locomotives de l’Economie sous-régionale et donc, plutôt que de sombrer dans les condamnations sans réserve de tout ce qu’elles entreprennent (nos Autorités), il faut (plutôt) leur donner matière à réflexion et, mais, surtout, bien qu’elles ne semblent pas toujours demanderesses, des suggestions et des encouragements…

Ainsi, la réalisation des ouvrages et autres investissements qui dure des décennies en consommant ,souvent bien au-delà des prévisions initiales des biens et équipements nécessitant d’importantes dépenses en devises, quand des consommations de luxe, mais gourmandes en devises sont malheureusement encouragées, quand, enfin, des étrangers peuvent bénéficier (quasiment) sans les moindres contreparties, de nos terres et les exploitent à leurs seuls avantages, nous n’empruntons pas la voie de notre enrichissement par l’industrialisation (ce qui est de nature à satisfaire les exigences d’une Balance commerciale équilibrée). De même, enfin, quand nous acceptons que le dogmes des Organismes de Bretton-Woods qui prescrivent que, pour chacune de nos réalisations économiques d’importance, il faille impérativement s’endetter chez eux, nous choisissons d’entretenir, ad vitam æternam, des balances de paiement constamment déséquilibrées et appauvrissantes. Pour clôturer le tout, nous devrions savoir que s’endetter en devises et placer, systématiquement et exclusivement celles-ci au seul profit du Trésor français (comme c’est le cas des pays de la zone Franc CFA), ce n’est pas travailler en vue d’équilibrer, un jour (même lointain) nos balances de paiement et cela, nous sommes simplement responsables de nos malheurs des Balances commerciales déséquilibrées, de l’absence du développement économique et du bien-être matériel subséquent auxquels devrait avoir droit tout être humain vivant sur la planète terre.

Serge Alain Godong, économiste : « Notre économie est historiquement déficitaire »

La balance commerciale c’est sur le commerce. Et nous avons deux points : un point d’entrée dans ce que vous importez et un point de sortie sur ce que vous exportez. La justification du déficit de la balance commerciale au Cameroun est simple, dans la mesure où la quantité et la valeur des biens que nous exportons sont inférieures à celles des exportations. S’agissant de notre pays, notre économie a toujours été déficitaire car depuis fort longtemps le Cameroun importe plus qu’il en exporte. Nos besoins de consommation et d’investissement sont également très élevés avec une population jeune et très urbaine. Par conséquent, l’Etat est obligé d’acheter beaucoup de biens et d’équipements à l’étranger pour satisfaire cette demande. Pour y arriver, il faut produire plus. Ce qui n’est pas le cas pour notre pays. Pour remédier à cette situation, nous avons de manière globale deux types de solutions qui sont proposées. Nous avons l’industrialisation. Il est question de mettre sur pieds localement un tissu industriel productif permettant de produire suffisamment de biens de consommation pour exporter également. Un point de vue que je ne partage dans la mesure où notre pays ne dispose pas des infrastructures adéquates qui permettent de porter cette industrialisation. Je proposerais une augmentation quantitative du nombre et du volume de produits primaires exportés.

Propos recueillis par M.L.M

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