Cameroun : Voici les origines lointaines de la pénurie des pièces de monnaie

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La thésaurisation, les pratiques des bijoutiers et les usages détournés dans les casinos remontent au début des années 2000.

Il y a trois ans déjà, le sujet était sur la table des hautes instances de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac). Le conseil d’Administration alors réuni en session ordinaire le 1er avril 2019 à Douala s’était penché sur ce qui n’était encore que « le risque de pénurie des pièces de monnaie ». Le communiqué de presse signé le même jour dévoilait une vraie préoccupation du conseil d’Administration de la Beac : « Dans l’optique de prémunir la sous-région contre les risques de pénurie des pièces de monnaie, le conseil a autorisé le gouvernement de la Banque, d’une part, à entreprendre des démarches auprès des États de la Cemac en vue d’interdire l’usage des pièces de monnaie dans les salles de jeux et, d’autre part, à définir un plan pluriannuel de mise à disposition des pièces au profit des populations ».

Lors du 4ème comité de politique monétaire de la Beac en juillet 2019, le gouverneur de la Beac disait n’avoir qu’un aperçu sommaire du phénomène de la pénurie des pièces de monnaie bien que des mesures correctives étaient envisagées : « Je n’en ai pas connaissance de façon précise. Nous avons appris qu’il y a des comportements de certaines entreprises qui, non seulement transfèrent des pièces de monnaie FCFA, mais exportent ces pièces. Nos services mènent des enquêtes avec les autorités des pays membres de la Communauté des Etats de l’Afrique centrale (Cemac) pour déterminer l’ampleur de ce phénomène afin de nous doter des moyens pour la circonstance. C’est un sujet sur lequel nos équipes sont à pied d’œuvre pour déterminer l’ampleur, les circuits, et l’historicité. Nous nous sommes effectivement penchés sur cette question. C’est d’ailleurs le vice-gouverneur qui s’en est occupé, et des commandes ont été passées. Dès novembre 2019, les pays de la Cemac seront ravitaillés en pièces de monnaie, pour conjurer la pénurie actuelle ».

Des mesures d’interdictions de l’usage des pièces de monnaie dans les salles de jeu ont été prises çà et là. « Les Chinois possèdent dans plusieurs villes camerounaises les machines à sous, dans des salles de jeux, qui servent à collecter les pièces de 50 et 100 FCFA. Des Chinois en partance pour leur pays, avaient été interpellés maintes fois à l’aéroport de Yaoundé, en possession de sacs de pièces de monnaie. Certains de nos compatriotes auraient fait de la collecte des pièces une activité rémunérée au profit des Asiatiques. Il s’agit d’un vaste réseau de trafic de pièces de monnaie. Le gouvernement fait de son mieux pour le démanteler », jurait un responsable camerounais.

Ce trafic de pièces de monnaie désormais circonscrit peut-il être endigué ? L’organisation intergouvernementale créée en 1992, le Groupe international d’étude sur le cuivre (Icsg) dont le but est d’accroître la transparence du marché mondial de ce métal, indique que le cuivre est toujours autant prisé à cause de sa valeur marchande et se revend à prix d’or à plus de 4 millions FCfa la tonne. « Ceci peut expliquer la raison pour laquelle les pièces de monnaie camerounaises sont clandestinement exportées en Chine. Vos pièces de monnaie exportées en Chine ne servent pas seulement à fabriquer des bijoux, elles sont également moulées pour faire des cadeaux », ajoute la même source.

Au total, la lutte pour que la monnaie ne sorte pas de son utilisation légale, et reste un moyen d’échange économique n’est pas gagnée. La mise en circulation de nouvelles pièces de monnaies en mars 2006 visait déjà à mettre fin à leur pénurie sur le marché. Selon une étude alors menée par la BEAC, la proportion des pièces de monnaies en circulation avait considérablement baissé depuis cinq ans, c’est-à-dire autour de l’année 2001. Entre les années 1970 et autour de 2006, le volume des pièces en circulation sur le marché a chuté de 10 à 3,5%. La thésaurisation, les pratiques des bijoutiers et les usages détournés dans les casinos étaient déjà identifiés comme les causes principales.

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