Cameroun : Une montée en puissance de la Crise anglophone ?

Combattans neutralisés

Depuis la mi-octobre 2017 cette crise a pris la forme d’une révolte armée et s’est étendue dans les zones francophones telles que Fongo-Tongo, Babadjou et aussi Mbanga dans la région du littoral.

Après la publication le 13 décembre 2018 d’un communiqué du secrétaire général de la présidence de la République, faisant état de l’arrêt des poursuites devant le tribunal militaire contre 289 détenus de la crise anglophone arrêtés pour des délits commis dans le cadre de la crise dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, on s’attendait à ce que les séparatistes mettent un terme à crise qui dure depuis 2016. En lieu et place d’une paix de brave, toutes les parties sont au contraire mobilisées pour semer le chaos. Et nombreux sont les analystes et camerounais qui pensent que le problème anglophone risque de plonger une bonne partie du pays dans le chaos.
Quelques jours seulement après la libération des 289 détenus, des attaques se sont poursuivies dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. La dernière attaque des séparatistes à Bangourain, département du Noun, région de l’Ouest le dimanche 23 décembre dernier est venue une fois de plus montrer que les assaillants ne sont pas prêts à lâcher. Près de deux semaines après, les populations de Bangourain sont encore sous le choc. Le bilan de l’incursion fait état d’un mort, plusieurs blessés et près de 80 maisons incendiées. Le moins que l’on puisse dire, c’est que malgré les signes incessants du président de la République pour l’apaisement, la construction d’une paix durable et concertée reste utopique. Le chiffre de 289 détenus libérés est encore loin du compte mais bien naïf celui qui estime leur libération totale conduirait à la cohésion
pacifique dans lesdites régions.

Par contagion, la crise meurtrière a franchi les zones anglophones et étend progressivement ses tentacules dans les régions francophones. Inquiète comme depuis le début de cette situation, le Social Democratic front a tenu le 30 décembre 2018 à Bafoussam, une réunion de crise sur la situation sécuritaire dans le département du Noun et plus précisément dans l’arrondissement de Bangourain en présence des membres du Nec résidant à l’Ouest, des Parlementaires, maires, membres du bureau régional, militants et sympathisants du parti de la balance. Au cours de cette réunion, le secrétaire général, Jean Tsoumelou a profité pour rappeler les stratégies de sortie de crise. Le Sdf appelle le chef de l’Etat à procéder à la relaxe de tous les détenus de la crise anglophone et de créer les conditions favorables aux fins du retour au bercail pour ceux qui vivent dorénavant dans la clandestinité ou en exil. Pour lui, Bangourain n’est pas la première zone francophone à ressentir de manière pressante les effets de la crise anglophone.
Dans ce registre, il cite Fongo-Tongo, Babadjou et aussi Mbanga dans la région du littoral. Des données qui montrent que l’idée d’une médiation républicaine pour un dialogue franc et serein avec les vrais représentants d’une communauté anglophone exaspérée et désespérée n’est pas pour demain. Pour l’instant, les sécessionnistes sont divisés. Une multiplicité de petits mouvements rivaux, voire de francs-tireurs, se disputent les commandes. Ils donnent l’impression d’être affaiblis et multiplient chaque fois des stratégies.

En face, l’Etat n’entend pas aussi se laisser faire et développe aussi chaque jour des ruses pour conserver son autorité. Dans son discours de fin d’année le 31 décembre 2018, Paul Biya s’est appesanti sur la crise qui secoue le Cameroun depuis deux ans déjà. Le chef de l’État a évoqué les multiples mains tendues du gouvernement «pour éviter le recours à des mesures extrêmes», sans exclure cependant l’intensification de l’option militaire. «Si l’appel à déposer les armes que j’ai lancé aux entrepreneurs de guerre reste sans réponse, les forces de défense et de sécurité recevront instruction de les neutraliser», a-t-il déclaré.

Entre les multiples gestes d’apaisement préconisés par l’Etat central, les séparatistes tels de l’eau versée sur un canard sont opiniâtres. Ils minimisent la violence étatique et la création d’un comité de désarmement et de réintégration et d’une commission de promotion du bilinguisme. En rappel, c’est depuis la mi-octobre 2017 que cette crise a pris la forme d’une révolte armée après les manifestations du 1er octobre 2016 brutalement réprimées par l’armée. Les populations assistent impuissants au pourrissement de la situation. C’est un truisme de dire que la position ferme des autorités camerounaises sur la forme de l’Etat, modification unilatérale de sa forme de l’Etat par les présidents Amadou Ahidjo et Paul Biya qui se sont succédé à la tête de l’Etat du Cameroun depuis son indépendance le 1er janvier 1960 électrise la situation. Comment éteindre efficacement et durablement le volcan en éruption? La situation complexe au vu des velléités et des postures politiciennes des uns et des autres. L’Etat, les élites et les séparatistes doivent urgemment et courageusement y trouver des réponses humaines, durables et des solutions constitutionnelles définitives.

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