Cameroun – Santé maternelle: Mourir en donnant vie

Près de 800 femmes meurent chaque année au Cameroun durant l’accouchement, du fait d’un système de santé précaire. La nouvelle a défilé hier sur le réseau social Facebook. Une femme meurt à Yaoundé en donnant naissance à des jumeaux, apprend-on de la présidente du Relais parents-enfants du Cameroun (Repcam), Marie Claire Dissamba. « C’est grave », s’insurge un internaute. Le plus déplorable est que la femme en question décède avec l’un des jumeaux dans le ventre. Conduite en urgence à l’hôpital Central de Yaoundé, il n’y avait personne, apprend-on, pour signer la garantie du payement d’une somme de 73 000 Fcfa. Un autre cas de mortalité maternelle parmi des centaines qu’enregistre annuellement le Cameroun. Lorsqu’il lance le Programme national multisectoriel de lutte contre la mortalité maternelle, néonatale et infanto-juvénile le vendredi 9 mai 2014, le ministre de la Santé publique, André Mama Fouda n’est pas rassurant. « Les statistiques sont très préoccupantes, et même inacceptables », lance-t-il devant un parterre de professionnels de la santé parmi lesquels le représentant du Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa).
C’est que, selon l’enquête Démographique et de Santé 2011, au Cameroun, le ratio de mortalité maternelle est de 782 décès pour 100.000 naissances vivantes. Des chiffres qui donnent le tournis aux fervents défenseurs de la vie. Et pour expliquer cette mortalité maternelle, un médecin de l’hôpital Central de Yaoundé indexe le retard de la prise en charge. Un retard très souvent dû au manque de moyens financiers pour payer la note hospitalière, une longue distance séparant l’hôpital du lieu d’habitation de la femme devant accoucher. La mortalité maternelle est aussi imputable, poursuit cette dernière, à des cas d’hémorragies pré ou post-natales, entre autres. Les finances entrent toujours dans la flopée des causes de la mortalité maternelle. Dans un pays où le tarif de l’accouchement par césarienne diffère d’un hôpital à un autre ; quitte à toucher le plafond des 300.000 Fcfa. A l’observation, beaucoup reste à faire pour garantir la sécurité sanitaire de la femme. D’autres raisons sont évoquées en sourdine. Certains membres du personnel de santé convoquent leur « difficiles conditions de travail ».

Cadavres
Une explication à laquelle « Meuma Claire », présidente du Repcam, réagit vivement. « Oui les médecins et infirmières ont des salaires de misère et se vampirisent pour survivre ; oui ça arrive tous les jours dans nos hôpitaux…Oui la faute à l’Etat. Moi je dis que hé ! [Stop !] Rien absolument, rien ne doit nous faire perdre notre humanité… Le « on va faire comment » ne nous donne pas le droit de banaliser la vie », tranche-t-elle sur son post diffusé hier sur Facebook, Que dire de ces cas désespérés ? Il y en a qui manquent d’argent pour payer une note très souvent salée, elles en viennent donc à prendre la fuite après avoir accouché dans un hôpital (public ou privé). « En effet, on enregistre de nombreux cas de fuites de femmes dans nos hôpitaux, faute de moyens financiers pour honorer leur facture », corrobore un médecin employé à l’hôpital Central de Yaoundé. Un phénomène qui pousse des membres de la société civile à plaider pour un accouchement gratuit au Cameroun. Mais le système de santé camerounais n’est manifestement pas prêt à changer la donne.

Monique Ngo Maya

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