Cameroun – Phénomène : Arrosé, le jour de son anniversaire

anniversaire

En lieu et place du champagne, les élèves versent de l’eau et toutes sortes de produits sur leurs camarades, le jour où ils sont nés.

Trois des cinq élèves tremblaient comme des feuilles de papier. Traduits au conseil de discipline pour des faits survenus la veille dans leur classe, les trois filles de la bande ont avoué n’avoir pas dormi cette nuit. Devant leurs parents convoqués, elles crient leur innocence. Leur faute pourtant, c’est d’avoir le 26 avril dernier, arrosé d’eau leur camarade, une autre fille, en début de journée. Il est en effet 7h40, lorsqu’elles s’en vont puiser de l’eau dans trois seaux.

Les surveillants qui les voient passer pensent à des punis. Elles vont entreposer leurs seaux à l’angle du mur et l’une d’elles va appeler leur camarade, malgré la présence du professeur. Cette dernière pense à une belle confidence. C’est alors qu’elle la conduit à l’angle, où les deux autres lui balancent les trois seaux d’eau sur la tête. L’exercice est tellement brutal qu’elles-mêmes se mouillent. De passage, le garçon de la bande aide l’une d’elles à se nettoyer. Et ils crient tous : « joyeux anniversaire ». Le coup était bien monté et seule la victime n’était pas au courant. « Je savais que c’était mon anniversaire mais je n’ai rien dit à personne pour qu’on ne m’accuse pas de trouble à l’école », raconte-t-elle au conseil.

« Je ne savais pas que c’est interdit », clame le garçon, dans la peau d’un bienfaiteur. « C’est comme cela que nous on fêtait les anniversaires de nos camarades à Douala », explique celle qui a organisé. Elle dit veiller au contrôle du calendrier pour ne pas louper l’occasion d’arroser un camarade qui a un an de plus. Encore chanceuse cette victime : quand il n’y a pas d’eau, d’autres produits entrent en jeu comme la poudre de farine, de maïs, la poussière, le vin blanc, la bouillie, etc. On utilise aussi la boue ! « Il s’agit de traumatiser notre camarade qui a un an de plus, pour qu’il n’oublie jamais ce jour », font savoir ces blagueurs d’un autre genre. « Chez les Blancs, ils célèbrent les bonnes chances avec du champagne. Comme nous n’avons pas de l’argent pour les imiter, nous gérons avec ce que nous trouvons », explique un autre. De manière générale, les autres camarades de classe applaudissent lorsqu’ils se rendent compte que la victime est vraiment affectée. Très souvent, le matériel scolaire en paie les frais. Mais les arroseurs prévoient des tenues de rechange pour eux-mêmes. Lorsque les encadreurs sont distraits, ils filment leur cinéma qu’ils font vite de poster sur les réseaux sociaux, avec des commentaires osés.

Le phénomène prend tellement de l’ampleur que plusieurs établissements scolaires ont décidé de légiférer là-dessus. Des sanctions sont désormais prévues pour ceux qui humilient ainsi leurs camarades, au motif qu’ils sont devenus plus grands. « Il n’est pas normal qu’une jeune enfant sorte du domicile propre et qu’avant 8h, on la mouille pour qu’elle passe la journée avec cette eau, parfois de qualité douteuse, sur le corps. C’est sale et contraire à la morale », plaide un proviseur. Sans compter que lorsque cela se négocie mal, ça débouche sur des bagarres parfois rangées.

F. K. / 237online.com

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