Cameroun – Menace : Les équipes de football communautaires en danger

Union Sportive de Douala

Plongés par des querelles intestines et un management archaïque, certains clubs mythiques ont quitté les championnats d’Elite alors que d’autres peinent à s’y maintenir.

Union sportive était le seul club mythique de la ville de Douala encore en Elite One. Après 63 ans en première division, les Nassaras Kamakaï ont été relégués en Elite Two suite à une saison tumultueuse tant au niveau des résultats que du management. Le « vieux » a succombé sous le poids d’une gestion régulièrement décriée par ses supporters. D’autres clubs mythiques de la ville de Douala tels que Oryx, Caïman ou encore Dynamo ne se portent pas non plus bien. Certes, ils continuent de drainer du monde en Ligue régionale ou en Elite Two, mais l’engouement d’antan s’est effrité.
Tonnerre, Racing de Bafoussam, Fédéral du Noun, Aigle de Nkongsamba, Aigle de Dschang, Bamboutos Fc, Ouragan, etc. sont quelques autres clubs communautaires qui ont, à un moment également donné de l’histoire, marqué ou continuent de marquer les esprits de par leur performance ou de par leur capacité à faire foule. Aujourd’hui, ces clubs sont en difficulté. La descente d’Unisport de Bafang en Ligue régionale de l’Ouest est perçue jusqu’ici comme une fiction. Pourtant, les sang-or pourront bien s’engager en Ligue régionale de l’Ouest dès la saison prochaine. « Je n’arrive pas à croire. Cette équipe nous a fait rêver à un moment. L’équipe a beaucoup souffert financièrement ; elle était presqu’abandonnée à elle-même », explique Narcisse K., un fan de football. Il y a encore quelques jours, c’est Tonnerre de Yaoundé qui signait son retour en Elite Two ; 3 ans seulement après sa montée. Des querelles internes sont le lot quotidien de ces équipes.
Dans le département du Bui, région du Nord-Ouest, Kumbo Strikers reste l’enfant de la communauté. L’équipe a permis à cette partie du pays d’être sous les feux des projecteurs en l’an 2000 grâce à la finale de la Coupe du Cameroun remportée face à Unisport de Bafang.

L’éclosion des clubs unipersonnels

Caïman de Douala a connu le même problème. L’arrivée de l’artiste Petit Pays à la tête de cette équipe en 2009, était une source de motivation. Elle avait ouvert une nouvelle ère aux rouge-blanc d’Akwa. L’artiste avait mis sa passion et son art au service du club. « Rabba Rabbi » avait d’ailleurs composé une chanson en hommage à cette équipe. Caïman, sous sa houlette avait retrouvé l’Elite One. Son bail à la tête de Caïman a été très court. La star a été vite rattrapée par les réalités des clubs communautaires. Son départ a eu un impact négatif sur le club. Caïman est aujourd’hui noyé dans la Ligue régionale du Littoral. « On a perdu un grand président. Petit Pays était arrivé à la tête de cette équipe avec une nouvelle façon de faire. Son image était un plus, non seulement pour Caïman mais pour le football camerounais. Il est parti dans l’anonymat total. Les clubs communautaires sont des curiosités », se désole David Steve Ottou. A une époque récente, le Tonnerre kalara club et le Canon Sportif de Yaoundé se livraient en spectacle. « Vous êtes sans ignorer qu’on a eu à un moment deux équipes de Tonnerre. Une vraie honte. Nos clubs ont des problèmes », confie Joël Onana, un supporter du Pka Kum. Des exemples sont légions.

Ces équipes assises sur des communautés vont très mal dans l’ensemble. Certains prédisent même leur mort prochaine : « Vous avez des adultes qui s’échangent des coups de poings pour le contrôle d’un club de football. Ils sont incapables de mettre leurs calories au service de la construction d’un bon projet. Le modèle de gestion des équipes a évolué. Vous avez des grands clubs comme Canon, TKC, Bamboutos, Racing, Union qui n’ont pas leurs propres installations. C’est grave. Vous comprenez facilement que ceux qui gèrent ces clubs ne pensent pas loin », explique David Eloundou, analyste sportif. Et d’ajouter : « Plusieurs clubs communautaires sont versés dans les Ligues régionales et d’autres peinent en Elite. Ils vont tous disparaitre un à un si les dirigeants ne se remettent pas professionnellement en question. »

Repenser les clubs communautaires

Pour se soustraire des querelles, devenues monnaie courante au sein de ces équipes communautaires, certains ont décidé de lancer leur propre projet sportif. C’est le cas de Faustin Domkeu avec New Star de Douala, de Célestin Mbombock avec Cosmos de Bafia. On a également le Capitaine Joseph Feutcheu avec son club éponyme, rebaptisé Djiko Fc il y a quelque temps. « Dans ces clubs, le président se bat à mettre les joueurs dans des conditions minimales. Mais ce n’est pas évident si le club n’est pas structuré et ouvert aux actionnaires. Là au moins, on n’a pas trop de bruits comme dans les clubs dits communautaires où tout le monde est coach et président », glisse Yannick Ndoh, tout souriant. Et de conclure : « Il faut tout de même reconnaitre que nos différents championnats ont besoin de tous ces clubs communautaires. Ils apportent une autre coloration autour des matchs. Ces clubs doivent se structurer et se professionnaliser. Il faut sortir de la gestion moyenâgeuse. Et la fédération doit imposer un cahier des charges aux clubs. L’Etat pourrait même les accompagner dans ce sens. Quand vous regardez Apejes ou As Fortuna jouer, c’est très beau. Les dirigeants ont mis un projet solide qui ne passerait pas, je vous assure, dans les clubs communautaires ».

La restructuration de ces équipes, selon certains, passe entre autres par le nettoyage des textes, avec un président élu pour une durée déterminée : « Il faut que ces équipes se dotent de textes à la hauteur des attentes et d’une réorganisation interne. Tous ces clubs communautaires, sans exception, sont menacés de disparition si rien n’est fait. Un club ne saurait plus se reposer sur une personne », a conclu Armel Ngouffo, supporter de Stade Renard de Melong.

Solière Champlain Paka

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