La ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (Mindcaf) s’oppose à la réhabilitation des titres fonciers de Me Benjamin Matip, décidée par la Chambre administrative de la Cour suprême. Depuis 3 ans, Benjamin Matip, a eu gain de cause dans un procès l’opposant aux collectivités Lendi, Ngombe et Ngoma, dans le département du Wouri. Malgré l’arrêt de la Chambre administrative de la Cour suprême du 24 octobre 2012, ordonnant la réhabilitation de ses titres fonciers attaqués par ces collectivités, Me Matip peine à rentrer en possession de sa propriété. En effet, après le verdict de la Cour suprême, Me Matip l’homme entendait enfin lancer son projet de construction de 10.000 logements sociaux.
Visiblement, Mme Matip n’était pas avisé des faits d’armes de Mme Koung à Bessiké depuis sa nomination au Mindcaf. On ne compte pas les dossiers régulièrement tranchés par l’instance faitière de la justice camerounaise dont elle a mis l’exécution des décisions à rude épreuve. La ministre est connue pour assurer une exécution à tête chercheuse des arrêts de la Cour suprême. C’est à la pelle que se déclarent les scandales fonciers dans les grandes villes, notamment à Douala. Et à chaque fois, on découvre que c’est toujours pour des raisons inavouées qu’elle se manifeste. Il se rapporte dans l’entourage de la Mindacf que celle-ci aurait adopté cette attitude désinvolte vis-à-vis de la plus haute juridiction du pays parce qu’elle entretiendrait des relations étroites avec le ministre délégué au ministre de la Justice. En effet, indique-t-on, celle qui a été secrétaire générale dans plusieurs ministères, aurait passé plusieurs deals fonciers obscurs avec Jean Pierre Fogui.
Imbroglio. En tout cas, il est difficile de dire pourquoi Me Matip n’est pas toujours rentré en possession de ses terres depuis trois ans. Après le verdict, une copie de l’expédition a été transmise à ce membre du gouvernement. En témoigne cette note de notification du greffier en chef de la Chambre administrative de la Cour suprême du 25 octobre 2013. Cette notification est restée lettre morte. Tout comme sont restées vaines toutes les démarches de Me Matip et de ses conseils pour amener Mme Koung à déclencher la procédure de réhabilitation des titres fonciers querellés.
Ne sachant plus à quel saint se vouer, il s’est vu obligé de solliciter l’intervention de la présidence de la République. Par une correspondance du 25 mai dernier, il a saisi la Première dame Chantal Biya. A la même date, la victime a sollicité l’arbitrage du chef de l’État. On peut dans cette dernière correspondance : «Monsieur le président de la République, lorsqu’on sait quelle importance vous accordez au principe de la séparation des pouvoirs qui vous est cher, quelle explication peut-on donner au refus d’exécuter une décision de justice exempte de tout recours ? Il s’agit ni plus ni moins des goulots d’étranglement et points de blocages administratifs que vous avez décriés dans votre discours du 31 décembre 2013 à la nation. Il s’agit de ces actes incompréhensibles de certains hommes et femmes de votre équipe, qui rament à contre-courant de votre politique gouvernementale et s’offrent ouvertement le sadique plaisir d’aller jusqu’à se placer au-dessus des institutions républicaines les plus respectables en piétinant librement et de manière imperturbable leurs décisions.»
[b]Inertie[/b]
Me Matip Benjamin n’a pas manqué de présenter au chef de l’État l’impasse dans laquelle l’inertie de la Mindcaf est en train de conduire son projet de construction de 10.000 logements sociaux : «Au demeurant, nous avons pris depuis plus d’une année des engagements fermes avec des opérateurs nationaux et étrangers soucieux de vous accompagner dans votre politique de promotion de l’habitat social. Ces partenariats ont commencé à porter du fruit. On enregistre à ce jour un accord de financement d’un montant de 226.191.400.000 francs Cfa obtenu par l’un de nos partenaires, la Société des travaux publics généraux (Stpg), auprès d’une banque chinoise par l’entremise de la China Railway Group Co, pour la construction de 10.000 logements sociaux sur le site objets de nos deux titres fonciers. (…) Malheureusement, les inerties administratives évoquées plus haut nous empêchent tout simplement d’avancer. Et il y a plus, elles nous placent dans la situation fort inconfortable d’être souvent traîné à un âge avancé dans des commissariats et peut-être bientôt à la justice par les partenaires qui tardent à se faire payer en nature ou en numéraire, les tires fonciers n’étant pas toujours réhabilités», peut-on également lire dans la correspondance.
Si cette affaire n’était pas en train d’hypothéquer des investissements importants et de constituer le drame de la faillite d’un Camerounais, on aurait souri de voir le chef de l’État obligé d’intervenir pour l’application d’une décision de justice. Mais, il se trouve que de plus en plus, certains collaborateurs du président de la République renoncent à leur engagement, l’obligeant à tout faire. Au demeurant, il est à espérer que cette énième démission de Mme Koung à Bessiké sera sévèrement punie pour servir d’exemple.
[b]Mamouda Labaran[/b]