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Cameroun : La journaliste Mimi Mefo incarcérée à la prison de New-Bell à Douala

Mimi Mefo en service à la radio et télévision Equinoxe a été écrouée dans ce pénitencier tard mercredi 07 novembre 2018, après un passage à la Légion de gendarmerie et au Tribunal militaire.

Dans les locaux de radio et télévision Equinoxe au quartier Akwa à Douala ce jeudi 08 novembre 2018, l’atmosphère est lourde. Même si des journalistes s’emploient à dire que le moral est au beau fixe, la petite onde de choc qui traverse les différentes pièces de ce groupe de médias est perceptible. Les visages sont serrés. C’est à peine si un sourire se dessine sur les lèvres à la vue de personnes familières. Après une réunion stratégique qui aura duré plusieurs minutes, les principaux responsables de la direction sont sur le pas de course. Ils se sont rassemblés au rez-de-chaussée de l’immeuble pour se rendre à la prison centrale de Douala, au chevet de leur collègue, la journaliste Mimi Mefo incarcérée depuis la veille mercredi.

L’horloge affiche 13h ce jeudi. Mais depuis le début de la journée, les auditeurs et téléspectateurs d’Equinoxe sont mis au parfum de la situation que traverse la journaliste, rédactrice en chef adjoint du service anglais, à travers des éditions spéciales du journal. En interne, les employés de l’entreprise de presse se sont également engagés pour réclamer la libération de leur consœur. Les présentateurs des émissions ont accroché sur la poitrine des mini pancartes sur lesquelles on peut y lire le message : «Libérez Mimi Mefo». «Le moral est au beau fixe parce que personne ne veut se laisser abattre. On croit aux qualités professionnelles de Mimi Mefo. Il faut continuer à travailler pour répondre à ceux qui croient qu’ils peuvent atteindre notre moral», soutient Cédric Noufélé, le rédacteur-en-chef adjoint d’Equinoxe Television.

A La Nouvelle Expression, une branche du groupe logée à un étage au dessous de radio Equinoxe, les employés sont également affectés et remontés par l’incarcération de Mimi Mefo. « Je suis démoralisé. Je n’ai pas dormi de toute la nuit. Je ne m’attendais pas à ce qu’on la conduise en prison. Elle n’est pas un brigand, ni une fugitive. On a l’impression qu’on jette les journalistes en pâture », s’offusque Hervé Villard. Il n’a pas revu Mimi Mefo depuis que les portes de la prison centrale de Douala se sont refermées derrière elle à 23h15 mercredi 07 novembre 2018. La journaliste a passé la nuit dans ce pénitencier et s’y trouvait encore jusque tard dans la nuit de jeudi, lorsque nous allions sous presse.

Tribunal militaire

Personne au sein de la corporation des médias et du collectif des avocats commis pour la défense de Mimi Mefo n’avait prédit un tel dénouement de l’affaire, quand la journaliste s’est présentée plus tôt dans l’après-midi du 07 novembre pour répondre à une convocation à la Légion de gendarmerie du Littoral. Elle y a été convoquée à 14 h pour être entendue sur le motif de « propagation de fausses nouvelles». Une information en lien avec la crise anglophone relayée sur son compte Facebook. « Elle avait d’ailleurs donné les sources pour dire qu’il parait que la balle qui a tué des personnes était de l’armée régulière. On nous dit que c’était ça la propagation de fausse nouvelle. D’après les textes, des peines encourues vont de trois mois à deux ans. A la légion, Mimi a usé de son droit à garder le silence», détaille dans une sortie face à la presse, Me Alice Nkom qui conduit un collectif de 14 avocats constitués par le Syndicat national des journalistes du Cameroun (Snjc).

D’après le récit de l’avocate, l’attente à la Légion de gendarmerie va s’étaler jusque tard vers 21h. Les avocats sont ensuite invités à se rendre chez le commissaire du gouvernement, près le tribunal militaire. « La première chose qu’on lui a dit c’est que le Cameroun a signé un engagement de ne pas traduire un civil devant un tribunal militaire. C’est un principe général placé sous le contrôle de la Cour suprême qui a déjà rendu des arrêts dans ce sens. Mimi étant un civil pour une infraction qui est mineure finalement, on ne sait pas pourquoi elle devait être là», s’interroge Me Alice Nkom. Qui déplore le fait que Mimi Mefo n’a pas bu une seule goutte d’eau de la journée. L’avocate décrie des méthodes qui s’apparentent à de la torture.

Boycott

Au tribunal militaire, le commissaire du gouvernement a soutenu que ce qui a été fait par la journaliste s’apparente aux actes de terrorisme et qu’il s’agit d’une atteinte à la sureté de l’Etat. Selon lui, il revenait alors au tribunal militaire de s’occuper de ce cas. Autour de 23h, Mimi Mefo est menottée et placée sous mandat de dépôt à la prison centrale de Douala. « Je promets de ne pas dormir tant que Mimi est en prison je vais me battre jusqu’au sang pour la sortir de là », a promis Me Alice Nkom, remontée. Les journalistes se sont aussitôt mobilisés en chaine de solidarité pour réclamer la libération de Mimi. Dans une déclaration jeudi soir, le syndicat a demandé la libération immédiate de Mimi Mefo. Il a également appelé au boycott par les journalistes et les médias, de toutes les activités du gouvernement pendant 10 jours à compter du 08 novembre, entre autres mesures. Mimi Mefo qui a entamé sa deuxième nuit en détention hier a reçu les premières visites de proches dans la matinée de jeudi. Les uns et les autres disent avoir rencontré une journaliste « forte qui tient le coup». Mais sa maman n’a pas pu supporter de voir sa fille derrière les barreaux. Elle s’est effondrée en larmes.

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