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Cameroun – Fraudes douanières: Un douanier accable Siaka et les Brasseries du Cameroun :: Cameroon

Dans une correspondance en date du 13 mai 2013 adressée au Ministre des Finances, sous le couvert de madame le Directeur général des Douanes, Eugène Prosper Diyouckey, inspecteur principal des Douanes retraité fait état des fraudes douanières perpétrées par les Brasseries du Cameroun à l’époque de l’ancien Directeur général, André Siaka. Près de 4 milliards de FCFA de perte enregistrée par le Trésor public. Alors question: faut-il que les uns et les autres soient suffisamment contrariés aujourd’hui que nous avons décidé de rendre publique cette enquête sur la Société anonyme des Brasseries du Cameroun (Sabc) pour que nous soyons traités de tous les noms d’oiseau, même au risque de stigmatiser notre prétendu parti-pris en nous présentant à tort comme les bras séculiers de quelques forces coalisées tapies dans l’ombre du pouvoir dont l’objectif est de jeter gratuitement l’opprobre sur André Siaka? Pourtant depuis près d’un mois, nous nous sommes rapprochés des responsables de la Sabc pour tenter de comprendre comment l’impéritie dénoncée depuis des années par Eugène Prosper Diyouckey, cet inspecteur principal des Douanes qui faisait partie de la mission de contrôle chargée de voir clair, courant 2000, dans les exportations des produits fabriqués par la société brassicole dirigée par André Siaka à l’époque, comment cette impéritie a pu allègrement prospérer. Pour une icône de la bonne gouvernance comme André Siaka, par ailleurs présenté à raison comme l’un des grands Camerounais dont le prestige de la réussite professionnelle et de la rectitude morale, lui valent des lauriers mérités à travers le monde, en lisant cette correspondance que nous publions sans commentaire dans cette édition, il y a de quoi donner des boutons. Ce d’autant plus que l’inspecteur principal des Douanes retraité semble aussi stigmatiser l’attentisme complice des différents responsables du Ministère des Finances au courant de cette affaire depuis 2000. Qu’est-ce qui peut donc à ce point expliquer le silence des responsables de la Sabc? Nous avons décidé de rompre ce silence en publiant dans un premier temps la correspondance qu’Eugène Prosper Deuckey adresse le 13 mai 2013 au Ministre des Finances sous le couvert du Directeur général des Douanes, en attendant la réaction des responsables de la Sabc. Affaire à suivre. Lisez plutôt

Monsieur le Ministre,
J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que la Société anonyme des Brasseries du Cameroun (Sabc) est redevable envers le Trésor Public de la somme de FCFA 3 961 860 082 (Trois milliards neuf cent soixante un millions huit cent soixante mille quatre-vingt-deux francs). Cette somme devrait être majorée de pénalités fixées à la discrétion du gouvernement.

En effet, cette situation résulte du procès-verbal de constat N°027 du 16 juin 2001 sanctionnant le contrôle des exportations des produits fabriqués par la Sabc sous les régimes de la Tva et des droits d’assises (Da) pour les exercices 1997/1998, 1998/1999 et 1999/2000, suivant ordres de missions N°003 et 045/Minefi/Ddi des 08/08 et 12/12/2000.

Dans le procès-verbal précité, les quatre enquêteurs, Ndogo Edjana Olivier, Diyouckey Eugène Prosper, Nkendo Augustin et Siade Assoba Antoine, ont relevé contre la Sabc trois (03) infractions:

1) Des exportations sans déclaration ayant entraîné des droits compromis de:
• Tva 688 723 259 Fcfa
• Da 499 207 385 Fcfa
• Total 1 187 930 644 Fcfa

2) Des violations de la réglementation des changes qualifiées d’exportations sans déclaration pour des marchandises d’une valeur de 16 600 000 000 FCFA.
3) Des réimportations sans déclaration d’emballages pour une valeur totale de 7 947 271 800 FCFA ayant entraîné des droits compromis évalués b 3 258 381 438 FCFA.
Soit au total des droits compromis évalués à 4 446 312 082 FCFA. Sur instructions de Monsieur le Ministre des Finances de l’époque, cette affaire est «terminée» administrativement par lettre N°00826/Minefi/Ddi du 21 novembre 2001 de la manière suivante:

1- Liquidation immédiate des droits compromis découlant de la 1ère infraction: 484 452 000 FCFA
2- Amende:
• Pour la 1ère infraction 242 252 000 FCFA
• Pour les deux infractions, passer outre.
Le montant des droits restants dus sur ce procès-verbal est donc de: 4 446 312 082 – 484 452 000 = 3 961860 082.
Je rappelle que dans la note N°0000/20 Minefi/Ddi du 04 juillet 2001, Monsieur Manga Massina Antoine, directeur des Douanes à l’époque des faits, avait rapporté au Ministre des Finances que les constatations du service avaient été «reconnues sans réserve sur le procès-verbal intermédiaire de conciliation des données par Messieurs Mourot Jean Denis et Nseke Nseke Oscar, respectivement directeur d’agence et responsable de la fiscalité a /a direction générale de la Sabc».

Par ailleurs, le directeur des Douanes avait proposé une amende égale au montant droits compromis soit 4 500 000 000 (quatre milliards cinq cent millions francs Gia), somme inférieure à l’amende prévue par le code des Douanes et qui est égale au double de la valeur des marchandises concernées par l’infraction. Pour ce qui est de l’infraction relative aux changes, le directeur des Douanes retient l’amende prévue par les textes en vigueur sans possibilité de modification: 20% de la valeur des marchandises soit 3 320 000 000 FCFA ceci donne «une amende globale de 7 820 000 000 FCFA, comme largement en dessous de celle prévue par le Code des Douanes».

Après avoir relevé à l’attention du chef de département que «les inspecteurs verbalisateurs chargés de ce dossier ont fait preuve de courage, d’honnêteté, d’abnégation et de probité pour aboutir aux résultats présentés et qui honorent non seulement l’administration des Douanes, mais aussi tout le département», le Directeur des Douanes suggère les mesures d’accompagnement suivantes:

• Une part spéciale de 15% du produit de l’amende venant s’ajouter aux 10% qui leur sont dus d’office:
• Des décorations,
• Une cérémonie officielle de remise de chèques!
Quelle n’a été notre désillusion et notre déception quand le Ministre Meva’a M’Eboutou n’a fait payer qu’environ 10% des droits compromis et une amende insignifiante de 243 millions!

Depuis 2001 j’ai décidé de me battre pour faire réviser cette décision. C’est ainsi que par note N° 001431/Minefi/Dgd2 du 21 mars 2006, Monsieur Mange Massina Antoine devenu directeur général des Douanes m’a fait mandater «à titre exceptionnel» par la Caisse centrale du contentieux une somme de 2 000 000 de FCFA (Deux millions) et que par notre N°07/1491/Cf/Minefi/ Cab du 17 août 2007 le Ministre Abah Abah m’a fait octroyer une «prime forfaire de FCFA 10 000 000 (dix millions). Pour solde de tout Compte».

Ces deux primes exceptionnelles me confortent dans l’idée que personne ne souhaite la révision de ce dossier. Tous les responsables des Finances savent que ma requête est fondée. C’est pour cette raison qu’ils me donnent à l’occasion un peu d’argent pour me faire taire. Ils n’ont pas compris que je suis déterminé à obtenir ce qui nous est dû légalement. Je ne réclame que le réexamen de ce dossier et l’application du droit douanier.

Monsieur le Ministre,
Un procès-verbal de constat est un acte authentique de procédure en matière de contentieux douanier. L’administration n’a aucun droit de le modifier à sa guise. Aucun texte réglementaire ne l’autorise. L’article 313 du code des Douanes stipule expressément que «les procès-verbaux de douane rédigés par deux agents des douanes ou de toute autre administration font foi jusqu’à inscription de faux des constations Matérielles qu’ils relatent». Notre procès-verbal est donc opposable à la Sabc et à l’administration. Les droits constatés sont dus en intégralité jusqu’à ce jour et cela pendant 30 ans. C’est ce que j’ai appris au cours des 27 ans où j’ai été inspecteur plus inspecteur principal des Douanes.

Madame le directeur général des Douanes est inspecteur principal des Douanes comme moi. C’est elle qui m’a fait payer les 10 000 000 de FCFA (dix millions) que Monsieur Manga avait refusés de payer. Elle connait ce dossier qu’elle a trouvé dans son cabinet du moment de sa prise de fonction et je ne comprends pas pourquoi aucune action n’est menée pour recouvrer près de quatre milliards qui constituent une créance légale et certaine. Le Ministre Meva’a m’Eboutou a été induit en erreur par Ses collaborateurs qui ont traité ce dossier pendant la réunion du 16 octobre 2001 dont le secrétaire général a rendu compte par note N° 080/Minefi/Sg du 19 octobre 2001. Mais en refusant d’ordonner le recouvrement du solde de ces droits compromis, c’est un acte de complicité de la direction générale des Douanes. Pourquoi? Si par extraordinaire, le Ministre des Finances et la direction générale des Douanes persistent dans le refus de réclamer les droits assortis de pénalités à la Sabc, alors qu’on me donne une prime conséquente qui récompenserait à la juste mesure, le travail que j’ai effectué et qui a arraché des appréciations élogieuses de tous les hauts responsables qui ont eu à examiner ce dossier en 2001:

• Le secrétaire général du Ministre
• Le conseiller technique N°4
• Le Directeur des Douanes (Manga Massina de regretté mémoire!)
Je me permets de rappeler qu’à la suite de sa décision, le directeur des Douanes, s’appuyant justement «sur les appréciations élogieuses du secrétaire général» avait demandé au Ministre de «bien vouloir autoriser, à titre tout à fait exceptionnel, que pour ce dossier, la part du trésor soit retenue pour attribuer des primes spéciales aux personnels de la direction des Douanes ayant effectué ce contrôle». (Cf Note N° 40/Cf/Minefi/Dd 1 du 07.11.2001).

Monsieur le Ministre,
Les quatre verbalisateurs sont depuis longtemps à la retraite, mais l’injustice que nous avons subie par le traitement de ce dossier est insupportable. Pour ma part, je pense que vous avez le devoir, le pouvoir et les moyens de nous rendre justice. L’ensemble de ce dossier plaide en notre faveur. Monsieur Siaka André est toujours Directeur général de Sabc, il sait ce qui s’est passé. Il sait que nos constatations sont fondées car avant notre contrôle les exportations n’étaient pas maîtrisées. C’était une gestion manuelle d’une activité certainement considérée comme marginale. Il en a résulté des dérives et es agents des Brasseries ont organisé un réseau de ventes de produits destinés à l’exportation sur le marché local. Il devait savoir que ces produits se vendaient à New-Bell à un prix inférieur au prix de vente normal. C’est ainsi que nous avons eu l’information que nous avons exploitée! Nous avons fait un travail remarquable et titanesque de reconstitution de ces opérations. Nous méritons d’être récompensés sur la base de la réglementation en vigueur en fonction des résultats obtenus.

Monsieur le Ministre,
Depuis plus de douze (12) ans, personne n’a cru devoir tenir compte des intérêts légaux des verbalisateurs. Ma démarche n’est solitaire qu’en apparence, car je suis absolument solidaire de mes autres camarades. Je suis convaincu que des solutions justes et responsables peuvent être trouvées à votre niveau sans qu’il soit nécessaire de déranger Monsieur le Président de la République pour ce genre de litige. C’est dans cet esprit que je suis calme depuis de si longues années. Mais le temps a eu raison de notre patience et de notre sens du devoir de réserve. Nous avons épuisé nos énergies. Vous comprendrez certainement que la présente correspondance soit un recours ultime, un véritable appel de détresse.

Notre travail a été salutaire pour la Sabc. Il leur a permis de découvrir le réseau de trafic de produits destinés à l’exportation et d’assainir leur-marché. A la suite de ce contrôle, ce service a été restructuré et enfin informatisé.

Il y a eu des sanctions internes car il nous est revenu que des hauts cadres de l’entreprise avaient dû démissionner. Nous avons donc fait pour la Sabc un «audit» non rémunéré. Ce n’est pas juste. Tout travail mérite un salaire approprié et c’est ce que je réclame pour mes collègues et moi.

A notre avis, la Direction générale de la Sabc est responsable de cette situation. En 2001 le service qui s’occupait des exportations n’était pas informatisé, ce qui nous a semblé surprenant. Mais le plus curieux est la pratique des Paiements systématiques en numéraire de la quasi-totalité des commandes à l’exportation. La manipulation d’une telle masse d’argent liquide était incompréhensible dans une entreprise de cette taille. Il en a résulté que des commerçants locaux pouvaient payer en espèces des produits pour le compte de destinataires fictifs. C’est ce mode de règlement, que le Ministre Meva’a n’a pas voulu sanctionner, qui a permis aux responsables de la Sabc d’organiser des ventes frauduleuses de produits destinés à l’exportation. Notre contrôle a permis de mettre un terme à ces dérives qui ont fait perdre beaucoup d’argent au Trésor public. Comment comprendre et accepter que le Ministère des Finances et la Direction générale des Douanes refusent de réclamer ces recettes pour les affecter à la réalisation de projets profitables à l’ensemble des Camerounais? Pourquoi sacrifier les mutuelles?

Je reste à votre disposition pour des explications supplémentaires si nécessaire.
En vous remerciant d’avance de l’intérêt que vous voudrez bien accorder à la résolution de notre problème, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma considération distinguée.

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