Le FMI doute de la capacité du Cameroun à respecter les délais de l’émergence 2035

Selon des indicateurs présentés par le Fonds monétaire international (FMI) sur l’économie camerounaise, le rendez-vous pris pour l’émergence du pays à l’horizon 2035 risque de ne pas être respecté, si des mesures concrètes ne sont pas prises, a-t-on appris le 28 avril 2015 en marge de la présentation des perspectives globales de l’économie africaine par le FMI.«Dans les prévisions de son Document de stratégie pour la croissance et l’emploi, les autorités camerounaises envisageaient d’atteindre une croissance d’au moins 10,2% d’ici 2020. On remarque sur les projections, que 2015 aurait dû être une année décisive. Or, les performances actuelles, selon nos estimations, laissent voir qu’on atteindra difficilement les 5% de croissance dans les cinq prochaines années», a fait savoir en substance Mario Zamaroczy, un des membres de la mission du FMI, qui connait bien le Cameroun.
En effet, dans le rapport sur les perspectives économiques de l’Afrique présenté par le FMI, les indicateurs sur le Cameroun sont sources de pessimisme. Alors que le pays était parvenu à atteindre une stabilité budgétaire au lendemain de l’atteinte de l’initiative Pays pauvre et très endetté (PPTE) en 2006, sa situation budgétaire et extérieure s’est depuis quelques temps dégradée. Le déficit public continue de croître, malgré la réduction des subventions aux hydrocarbures. Bien qu’il soit toujours soutenable, l’endettement a presque doublé en quatre ans, passant de 15% du PIB à un peu plus de 30%, tandis que le solde extérieur se détériore.

Plan d’urgence gouvernemental
Ajouté à cela, le Cameroun doit aujourd’hui faire face à un double choc. Le premier est lié à la baisse des cours mondiaux du pétrole, cette matière constituant aujourd’hui près de 20% de ses recettes budgétaires et 54% de ses recettes d’exportation. L’autre choc que traverse le pays est la situation d’insécurité dans certaines de ses frontières, notamment à l’Est du pays, région frontalière à la RCA en crise, mais surtout dans l’Extrême-Nord avec une forte mobilisation de ressources pour la lutte contre le mouvement terroriste nigérian Boko Haram.
A ces indicateurs pessimistes, les autorités camerounaises mettent un bémol, en soutenant que le gouvernement a anticipé sur cette question, en prenant des mesures d’urgence à l’instar du plan d’urgence triennal doté d’une enveloppe de 925 milliards FCfa actuellement implémenté par l’Etat du Cameroun. Certains observateurs sont cependant très sceptique, quant à la capacité du plan d’urgence à véritablement relancer la machine économique, déjà en raison du retard que prend la mobilisation des ressources extérieures (750 milliards FCfa) devant servir au financement de la plus grosse partie de ce plan.
En guise de solutions, le FMI est resté constant dans ses propositions : construire des matelas budgétaires, éliminer les subventions au carburant, améliorer le climat des affaires pour accroitre les investissements privés, promouvoir le développement inclusif et optimiser la stratégie d’endettement. Ce panier de solutions est aussi fortement critiqué par certains experts camerounais.
«Ce que le FMI ne dit pas dans ses solutions, c’est comment toutes ces mesures seront financées et, surtout, quel sera le coût réel de leur mise en œuvre. De l’autre côté, si on fait tout cela et qu’on doit toujours sortir des quantités importantes d’argent pour importer des biens et services, nous restons dans un système de rente et aucun pays ne peut se développer pleinement dans de telles conditions. Ce qu’il faudrait faire, c’est de complètement réorienter notre stratégie économique et notre gestion de la monnaie. Or, cela, le FMI ne le dit pas du tout», a fait savoir Dieudonné Essomba, un ingénieur statisticien camerounais, auteur d’un livre sur les vertus de la monnaie binaire.

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