Cameroun – Cohabitation: Guerre ouverte entre sénateurs et députés :: Cameroon

La session budgétaire clôturée hier, mercredi 11 décembre 2013 à l’hémicycle du palais des verres de Ngoa-Ekélé (Assemblée nationale) et au palais des congrès (Sénat) a permis de mettre à nu les manquements qui risquent de compromettre le bon fonctionnement du parlement de notre pays.Ainsi, le Sénat consommera au cours de l’année 2014, un budget qui n’a pas été discuté en commission, comme le recommande la loi. L’institution a été dotée d’une enveloppe de 15 milliards de nos francs. 13 milliards Fcfa seront consacrés au fonctionnement, et seulement 2 milliards aux investissements. Calculatrice en main, l’on se rend à l’évidence que chaque sénateur est ainsi crédité d’un montant de 120 millions l’an. Ce qui suscite le courroux des députés à l’Assemblée nationale qui auraient bien voulu discuter des contours de ce budget jugé faramineux pour une si jeune institution. A l’occasion de la plénière d’adoption du budget à l’hémicycle du palais des verres de Ngoa-Ekélé dimanche dernier, les députés du Social democratic front (Sdf) ont d’ailleurs quitté la salle de délibération, pour dénoncer le refus de la chambre haute de venir défendre son budget devant la commission des finances. Quelques élus du parti au pouvoir les ont même suivis dans cette voie. Mais cela n’a rien pu empêcher. Car la majorité restée en salle a voté pour l’adoption de cette loi. « Si nous avions eu l’occasion de discuter ce budget, peut-être que nous aurions compris pourquoi il est si élevé », s’indigne Joseph Mbah Ndam, l’un des vice-présidents de l’Assemblée nationale.

Pour Gaston Komba, député du Rassemblement démocratique du peuple camerounais pour le Nkam, cet incident relève des incompréhensions de départ. « Nous sommes les deux chambres du parlement et nous sommes condamnés à cohabiter ensemble. Mais il faut noter que les députés représentent le peuple entier alors que les sénateurs représentent les collectivités territoriales décentralisées. La loi indique clairement que c’est l’Assemblée nationale qui vote le budget. Je pense qu’il faut mettre cet incident dans les incompréhensions de départ. Mais il faut dire que les rumeurs qui circulent sur la différence de traitement entre les sénateurs et les députés ne contribuent pas à la sérénité et à l’objectivité entre les collègues parlementaires », explique-t-il.

Au Social democratic Front (Sdf) notamment, d’aucuns vont même plus loin, en déclarant anti-constitutionnelle la loi portant règlement intérieur du Sénat. « Le projet de règlement intérieur à été rédigé par le Pr. Joseph Owona et le feu Anicet Atangana qui était conseiller technique au secrétariat général de la présidence de la République. Mais une fois acheminée auprès du chef de l’Etat, le règlement a été modifié par Michel Meva’a Meboutou qui y a ajouté des éléments qui aujourd’hui rendent difficile la cohabitation avec l’Assemblée nationale », confie un élu de l’opposition. Il révèle que seule l’Assemblée nationale est la courroie de transmission entre l’exécutif et le législatif. « Mais curieusement, le Sénat a adopté son règlement intérieur et y a écrit que le Sénat a adopté et le chef de l’Etat a promulgué. Pourtant, c’est l’Assemblée qui devait l’adopter comme toute loi, à l’occasion d’une plénière. Cela signifie que le règlement intérieur du Sénat est anti-constitutionnel », tranche ce député.
Même si aucun sénateur n’a accepté de se prononcer sur le sujet, les spéculations vont bon train dans les couloirs de cette institution sur les raisons ayant motivé la décision de ne pas défendre le budget auprès de la commission des finances de l’Assemblée nationale. « Le Sénat est la chambre haute et son président est la deuxième personnalité de la République. Il va bien falloir que l’on révise la constitution pour que le Sénat ait la place qu’il mérite. Sinon on doit changer l’appellation sénat pour trouver un autre moins prestigieux que l’Assemblée nationale », marmonne une source au Sénat. Selon celle-ci, la chambre haute se serait préparée à braver toutes les épreuves pour imposer son prestige que veut ravir l’Assemblée nationale. C’est dire que la guerre ne fait que commencer.

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