Cameroun – Insalubrité: Yaoundé sous les immondices

Les rues de la capitale politique camerounaise sont jonchées de détritus, la situation perdure depuis des semaines et les populations en ont marre et craigne un retour du choléra.
Bata Nlongkak, Total Ngousso, Eleveur, Nkolfouklou, Ebogo pour ne citer que ces quelques quartiers de la ville de Yaoundé croulent sous les ordures. Depuis le début de l’année l’on se demande si les agents de la société d’hygiène de la ville (Hysacam) sont en grève ou ont oublié ces zones. «Depuis le 25 décembre on n’a pas vue d’agents d’entretien d’Hysacam ici. La poubelle déborde déjà et menace de retrouver la chaussé», confie un riverain d’Ebogo. Le quartier est pourtant proche du siège d’Hysacam, les habitants se disent proche du paradis mais pourtant si loin de Dieu. Rien n’est fait pour mettre la propreté sur l’axe Yaoundé-Soa. Un agent de la société d’hygiène de la ville qui a souhaité garder l’anonymat nous donne quelques raisons qui puissent justifier cette situation d’insalubrité; «il arrive souvent que les camions soient en panne ou manquent de carburant c’est pour cela que les ordures s’accumulent dans les rues. Mais il y a tout de même des agents qui viennent de temps en temps pour balayer les rues et essayer d’entasser les ordures à fin qu’elle ne gêne pas les populations». «Je vous assure que cette situation n’est pas normale, les bacs se remplissent, débordent et les ordures occupent même le passage des piétons ici…quand il verra chaud à midi personne ne pourra respirer ici parce que la poubelle va sentir mauvais. Pour nous qui vivons à coté avec les enfants et autres ce n’est plus supportable», déclare une riveraine de Nlonkak. Le spectacle est triste et désolant. Les enfants qui zigzaguent entre les ordures pour se déplacer et s’amuser. Aidant les parents à la maison pour les travaux c’est eux qui vont chaque fois à la poubelle pour jeter la saleté. Du coup ils courent des risques et sont exposés à de nombreuses maladies. «J’ai peur pour la santé de mes enfants et la mienne. C’est dans ces rues qu’ils jouent en ramassant tout et n’importe quoi au sol. Ils pourraient revenir un de ses jour avec le choléra», ajoute-t-elle.

La maladie de la saleté
Au début de l’épidémie de choléra au Cameroun le 6 mai 2010, André Mama Fouda, le ministre camerounais de la Santé publique avait expliqué que le choléra est la « maladie de la saleté ». En fait, dans certains quartiers populaires à l’exemple de la Briqueterie, les dispositions d’assainissement ne sont pas prises. Les eaux usées s’écoulent le long du chemin. C’est un mélange de déchets ménagers et de selles qui dégage une odeur d’œufs pourris. La maison d’Adjia, comme celle de la plupart des habitations du quartier, n’est pas pourvue d’eau potable. Elle doit s’approvisionner dans un puits d’eau creusé derrière la maison, près des latrines. «Les médecins ont dit que c’est à cause de cette eau que mes enfants sont morts. Les eaux de la fosse septique des toilettes se mélangent à celles du puits d’eau et les polluent», explique Kadjidja. Le choléra représente désormais un problème
national. A ce jour, huit régions camerounaises sur dix ont été touchées par l’épidémie. Une campagne de sensibilisation pour éduquer les populations à se laver les mains avec de l’eau et du savon a été lancée sans grand succès. Le gouvernement a annoncé l’aménagement de 250 points d’eau potable et de toilettes publiques ainsi que la réhabilitation de certains forages d’eau. Malgré toutes ces mesures, les mentalités restent difficiles à changer. Kadjidja par exemple est le prototype de personnes qui, par leur refus de changer d’habitudes, contribuent à propager la maladie. Après le décès des enfants de Kadjidja, le personnel de santé lui a expliqué qu’elle doit désinfecter sa maison et brûler tous les effets ayant appartenu aux morts, afin de stopper la propagation de la maladie. Elle ne l’a pas fait. Elle se réfugie derrière la pauvreté. «Nous n’avons pas d’argent pour acheter le chlore. Nous ne pouvons brûler les effets des enfants décédés car les autres enfants pourront les réutiliser», se justifie-t-elle. Elle sait pourtant que son attitude met la vie de son voisinage en danger, mais elle semble résignée. «C’est Dieu qui nous garde. Si le choléra doit t’attraper, ça t’attrapera quelles que soient les précautions que tu prends», dit-elle.

Emmanuelle Omondo

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