Cameroun – Réflexion: L’avenir de la presse écrite face à Internet en débat





Une table ronde sur cette thématique a réuni jeudi 24 juillet dernier à l’hôtel Hilton de Yaoundé les professionnels des médias, dans le cadre de la célébration du quarantenaire de Cameroon Tribune.[pagebreak] Avec en toile de fond, la complémentarité entre les deux outils d’information dans un univers de plus en plus globalisé.
« La presse écrite internationale se meurt. Depuis quelques années, les victimes tombent les unes après les autres: le quotidien Le Temps va licencier, Frankfurter Rundschau dépose son bilan, l’allemand Financial Times est menacé, le fleuron de la presse espagnole, El Pais, a supprimé le tiers de ses effectifs, le grand quotidien italien, Corriere della Sera, pourrait se séparer d’une centaine de salariés, les quotidiens grecs, Apogevmatini, Vina et Eleftherotypia ont fermé, France soir l’a déjà fait, La Tribune a mis fin à son édition quotidienne, l’américain Newsweek a cessé de paraître en papier et la fragilité des journaux Le Monde et Libération fait débat ». Tel est l’un des extraits de la chronique du journaliste algérien Amel Bidi publiée le 8 décembre 2012 sous le titre « La presse internationale à l’agonie ». Extrait repris par le rédacteur en chef technique du quotidien national bilingue Cameroon Tribune, pour planter le décor de la table ronde qui s’est déroulée jeudi dernier à Yaoundé ; dans le cadre de la célébration de l’an 40 de Cameroon Tribune.

« L’avenir de la presse écrite face à la montée en puissance d’Internet ». C’est le thème qui était au centre des échanges entre les professionnels de médias venus de plusieurs pays (Sénégal, Tchad, Burkina-Faso, France, Guinée équatoriale, …) pour contribuer au débat sur le sort de la presse imprimée, face à la razzia qu’impose Internet aujourd’hui, en matière d’information et de communication. Avec également en bonne place l’ambassadeur de Turquie au Cameroun, S.E. Omer Faruk Dogan. Les échanges ont permis de se rendre à l’évidence que la presse écrite, malgré qu’elle soit la « mère » des médias, subit ces dernières années la pression des technologies de l’information et de la communication (Tic), notamment Internet et les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.).

Ce qui ne l’empêche pour autant pas de rester leader, à en croire le directeur de l’agence tchadienne de presse pour qui « la presse écrite restera toujours une presse de recherche et de documentation pour ses lecteurs ». Un sentiment unanimement partagé par Daouda Mane, rédacteur en chef du quotidien dakarois Le Soleil. « La presse écrite est sollicitée fréquemment par les professeurs d’universités et étudiants-chercheurs pour leurs recherches », précise-t-il. La presse va rester immortelle, conviennent les participants, mais l’immense défi à relever pour conserver cette immortalité, c’est la professionnalisation des pratiquants qui, seule permettra de séparer le bon grain de l’ivraie. « Le journalisme est menacé non par Internet, mais par les hommes qui le pratiquent, et qui ne respectent pas les canons de la profession. La presse écrite va subsister, à condition de fournir une écriture sans faute, sans tâche, … face à un public extrêmement rigoureux et exigeant », dixit Calixthe Beyala, écrivaine. Toujours est-il qu’ « on aura beau regarder la télévision, suivre la radio, surfer sur le net ; mais on aura toujours besoin de la presse écrite pour en savoir davantage. En tout cas, le papier a encore de beaux jours devant lui », souligne Xavier Messe, directeur de publication par intérim du quotidien Mutations.

Complémentarité
Loin d’être un obstacle pour la presse écrite, Internet constitue plutôt un atout pour sa survie et sa vulgarisation, tel que le souligne Dr Baba Wame, universitaire et expert en question des Tic. « La presse écrite ne pourra jamais mourir, c’est sûr. Par contre, elle doit se préparer à une mutation … pour une plus grande visibilité sur la toile », confie-t-il. Il estime par ailleurs que face à la montée en puissance d’Internet, le salut de la presse papier repose sur trois facteurs : le renouvellement des outils, le respect (toujours) scrupuleux des règles déontologiques de l’écriture journalistique, enfin la variation des supports pour maximiser les revenus. En tout état de cause, il est question pour la presse écrite de subsister à l’ère du digital, qui présente bien des avantages en l’occurrence la générosité de l’internaute qui n’hésite pas à partager systématiquement l’information. Contrairement à la presse écrite dont l’accessibilité impose un sacrifice financier (400Fcfa pour un quotidien au Cameroun ; ndlr).

Pis, le numérique et le support papier doivent travailler en synergie pour offrir davantage d’opportunités d’information aux lecteurs. Une cohabitation nécessaire et irréversible en fait, de l’avis du Coordonateur de Cameroon Tribune en ligne, Josué Monda Bakoa, et pour qui « il ne faut pas considérer Internet comme une menace, mais comme une opportunité. Sinon,poursuit-il, comment réussirons-nous à satisfaire notre lectorat de la diaspora ? ». Visiblement, Internet est un complément et non un concurrent. Mieux, les panelistes s’accordent à dire que c’est un partenaire incontournable et privilégié pour le développement de la presse écrite, en ce sens qu’il peut l’aider à mieux circuler et à traverser les frontières physiques des territoires. Entre le papier imprimé et le numérique, c’est davantage un mariage de raison, qu’un combat entre David et Goliath.

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